Hier, c'était la consternation totale à Blida, et plus précisément à l'intérieur de l'enceinte de l'hôpital Frantz-Fanon. Pratiquement, toute la corporation des psychiatres a marqué de sa présence pour faire le dernier adieu, à leur collègue et ami Ridouh Bachir, enfant de Bab El-Oued, considéré comme le père de la psychiatrie algérienne. Des travailleurs et des malades ont veillé dans la nuit de vendredi à samedi au côté de la dépouille du défunt. Des femmes psychologues n'ont pas retenu leurs larmes, en venant rendre un dernier hommage à l'éminent professeur Ridouh. L'image la plus frappante était celle d'un de ses anciens patients. En effet, Lakhdari, un des plus anciens patients de Ridouh, qui devint par la suite son secrétaire particulier, n'a pas cessé de sangloter depuis qu'il apprit que Ridouh est décédé. “Mon père est mort”, lance Lakhdari, considéré comme l'homme l'ombre du professeur Ridouh. Pour sa part, M. Tabèche, directeur de l'hôpital psychiatrique, nous prend à témoin : “Son grand souhait, de son vivant, était de reprendre la salle de la bibliothèque pour relancer la spécialité de l'ergothérapie ou la sociothérapie par laquelle les malades peuvent organiser des fêtes, des soirées musicales comme cela se faisait par le passé.” Et d'ajouter : “Ridouh était très mal à l'aise ces derniers temps du fait que l'hôpital a perdu de sa vocation, en raison de l'avancement du béton à travers la construction de nouvelles structures de santé au détriment de l'espace réservé aux malades”. “Il est venu à Blida, en 1967, lorsqu'il a été envoyé par le divisionnaire de la santé d'Alger à l'époque, juste après qu'il eut terminé ses études. Depuis il n'a jamais quitté la ville des Roses. Pourtant, il a toujours souhaité travailler dans un bloc opératoire, car il a toujours voulu faire la spécialité de chirurgien”, expliquera encore le directeur. De son côté, le psychiatre Nabil Souilamas, qui a 34 années de service aux côtés du Professeur Ridouh, témoigne avec émotion : “Il est parti sans prévenir. Sans même assurer de passer le flambeau. Le premier et le dernier pilier de la psychiatrie algérienne est parti sans dire un mot. Pour nous, c'est une très grande perte, car il incarne l'esprit de Fanon. Sa raison de vivre est la prise en charge des malades mentaux”, Pour rappel, le professeur Ridouh est né à Bab El-Oued à Alger en 1942. Il était professeur en psychiatrie, médecin légiste, criminologue et était jusqu'à ses derniers jours responsable du service de psychiatrie légal au CHU Frantz-Fanon de Blida. Il a également écrit plusieurs ouvrages notamment celui ayant pour titre La Dynamique Boudiaf, la mécanique Boumaârafi, qui est une analyse psychiatrique du Professeur Ridouh étant donné que c'est lui-même qui a expertisé Lembarek Boumaârafi, l'assassin du président Mohamed Boudiaf. K. F