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La Grande Mosquée d'Alger (4e partie)
Aucune valeur ajoutée algérienne
Publié dans Liberté le 27 - 03 - 2012

Depuis quelques années, l'Algérie est devenue un espace d'expérimentation de l'architecture musulmane moyen-orientale, une architecture qui n'a rien à voir avec l'art maghrébin. Dans la mosquée de Chevalley, près d'El-Biar, les Saoudiens ont érigé un style étranger qui sert de référence à beaucoup d'architectes algériens qui ne font pas l'effort d'étudier l'histoire de l'art musulman maghrébin au lieu de copier l'Arabie Saoudite, croyant que toutes les moquées du monde sont pareilles et ignorant que le Maghreb se distingue par un cachet particulier.
Avons-nous besoin de références anciennes et de surcroît qui ne nous appartiennent pas ? Une gigantesque masse de béton jetée dans le décor et qui pique une flèche inutile et insouciante dans le ciel ne peut, même si elle le croit dur comme fer, être “un témoignage spirituel, culturel et architectural des réalisations de la nation”, pour reprendre les mots pompeux du communiqué officiel annonçant l'adoption par le gouvernement de ce projet coûteux. Au XXIe siècle, l'architecture algérienne mérite mieux qu'une masse de Guinness Book copiée à la va-vite sur les modules omeyyade, des Abbassides ou Séfévides. Et si l'Algérie, 44 ans après l'indépendance, n'a que quelques grands architectes, c'est parce qu'on n'a pas jugé utile de construire des édifices d'utilité publique comme des stades, des opéras ou des musées qui peuvent amener leurs auteurs à créer aussi des édifices de culte comme celui, de taille pharaonique, que le pouvoir désire avoir aujourd'hui pour damer le pion à Hassan II.
Si la maquette a été dessinée par des architectes allemands, la réalisation de la mosquée sera l'œuvre de la société chinoise China State Construction Engineering Corporation (CSCEC) qui a signé le contrat avec la partie algérienne le 28 février dernier, sans préciser le véritable coût, car tantôt on dit un milliard, tantôt 1,6 milliard d'euros.
On ne connaît pas le nombre de soumissionnaires pour la réalisation du projet, mais les articles de presse ne donnent que deux (le groupement algéro-espagnol constitué par Cosider, ETRHB et FCC Construction ainsi que le groupement italo-libanais composé d'Astaldi et ACC) pour un appel qui aurait dû intéresser des dizaines de soumissionnaires. Ce n'est que par souci de transparence, pas pour remettre en question la société chinoise ni ses compétences que de se poser des questions sur les raisons qui ont présidé à l'octroi du projet à cette société qui a déjà réalisé de nombreux projets dans notre pays et remporté presque tous les gros contrats de réalisation de logements implantés à travers le territoire national, même si les retards accumulés (imputés à la pénurie de ciment par l'entreprise) ont incité Ahmed Ouyahia en 2008 à interdire aux administrations nationales de conclure des contrats avec elle. Lors de la signature du contrat, le directeur général de la filiale de CSCEC en Algérie, Chen Wenjian, avait promis que son entreprise “finira le projet dans les temps impartis avec une excellente qualité” mais il n'a pas précisé combien il emploiera de travailleurs algériens.
Les Allemands ont donc réalisé la maquette, et les Chinois vont la réaliser avec des techniciens et une main-d'œuvre chinoise, des matériaux et des équipements étrangers et nous fournir un monument clés en main, comme si cinquante années après l'indépendance l'Algérie ne savait rien produire et pas même fournir une main-d'œuvre pour au moins sauver la face. Si le pays n'a pas ces compétences (ce qui n'est pas le cas) il ne commande pas un édifice aussi superflu pour faire savoir au monde son incompétence dans un domaine aussi sensible que le génie civil, l'architecture et la construction. Il fallait être capable d'intégrer au moins des ouvriers algériens dans le projet, ou des artisans, ou un savoir-faire national avant d'engager le pays dans un projet aussi démesuré. Pis encor, toute l'opération a été menée dans une opacité presque totale, donnant les informations au compte-gouttes afin que les critiques n'aient pas d'éléments à même de permettre la contradiction. L'argent algérien, le devenir de la capitale, son esthétique et son urbanisme sont mis en jeu sans engager la société civile, sans impliquer le peuple, sans même lui montrer les maquettes des projets ou donner les raisons de tel ou tel choix.
Mosquée clés en main et âme culturelle !
Comment un édifice entièrement livré clés en main peut-il refléter l'âme culturelle et cultuelle du pays ? Le bureau d'architecture est allemand, le constructeur chinois et les travailleurs le seront certainement, en majorité du moins ? Dans ce projet, tous les matériaux, équipements et produits seront étrangers, à part le sable, le ciment et peut-être la brique ! Zéro intégration nationale dans un projet au coût faramineux, comme ce fut le cas dans l'autoroute Est-Ouest qui a coûté plus de onze milliards de dollars sans même bénéficier au pays et aux nationaux sur le plan de l'apprentissage technique et technologique ! La mosquée d'Alger sera elle aussi d'une valeur ajoutée nulle sur tous les plans, scientifique, économique, culturel et social. Elle s'inscrit dans la logique de l'import-import et de dépendance vis-à-vis de l'étranger, une logique inaugurée en 1999 et dont on voit les conséquences catastrophiques sur l'économie nationale, désormais dépendante des recettes des hydrocarbures à 90% ! Suite à la destruction de nombreux secteurs productifs, les hydrocarbures représentent aujourd'hui 97,25% du volume global des exportations, soit 27,02 MDS de dollars, tandis que les secteurs hors hydrocarbures ne représentent que 2,75% des exportations, soit 765 millions de dollars, alors qu'Ouyahia lui-même admettait en 2008 que l'or noir allait vers l'épuisement et connaîtrait un recul considérable à partir de 2030 sans pour autant rien faire pour diminuer cette dépendance et renforcer la production nationale par des mesures incitatives. L'état a dépensé des centaines de milliards de dollars pour accroître la dépendance de l'étranger dans tous les secteurs au lieu de renforcer notre économie, et il vient de nous rendre dépendants même dans le domaine des mosquées ! Les autorités nationales ont dit que ce “monument” devrait donner une âme culturelle, philosophique, religieuse et bien sûr architecturale à la baie d'Alger ! Fallait-il qu'Alger attende 2012 pour cela ? Alger n'a peut-être pas une âme mais une véritable identité culturelle issue de temps immémoriaux, une identité qui se reflète dans la culture de son peuple issue d'une mosaïque de cultures diverses, africaines, européennes, arabes, et dans son architecture issue de plusieurs horizons du pourtour méditerranéen. Méditerranéenne, arabe, africaine, Alger a elle-même construit ses monuments et édifices, réalisé ses jardins et potagers, ses ateliers ou ses cimetières, et n'a pas attendu que l'on vienne lui ramener un mastodonte acheté au souk de l'import avec l'argent du pétrole. Alger laborieuse a elle-même façonné son identité, il y a des millénaires, même si certains la disent jeune fille de deux mille ans seulement. Elle a travaillé ses ors et ses trésors, ses bâtisses issues de brassages où les sons doux du marteau et de l'enclume ont couvert le tintamarre de l'épée qui tranche et du canon qui tonne et des navires qui échouent contre la falaise et les Charles Quint décidés qui s'en retournent bredouilles, vaincus et tristes mais rêvant encore de revanche. Alger a une identité philosophique qui ne renie pas le passé et revendique le présent, et des religions qu'elle a connues, une a été adoptée par la majorité sans pour autant écraser les autres, dans un esprit de tolérance dont témoignait un certain Napoléon et tous ceux qui sur cette terre ont pris racine. Elle n'attend pas l'an 2012 pour claironner qu'un nouveau temple vient d'être édifié à la gloire d'Allah en étalon dollar qui sent à peine la sueur et le sang algériens. Qu'ils soient civils ou militaires, religieux ou profanes, tous les lieux d'Alger respirent le labeur, la sueur, le sang même des Algériens, et ils n'ont pas cherché à être les plus grands ni les plus beaux du monde mais seulement à être utiles, à servir humblement ceux qui les utilisent, à exister sans profaner la terre ni le ciel, sans chercher à concurrencer quiconque, sachant que la valeur est partout, même chez l'ennemi qui nous a donné mille et une choses, y compris dans le domaine de l'architecture. Voilà pourquoi Alger n'a jamais cherché à damer le pion à Casablanca ni à aucune autre ville, mais seulement à s'élever continuellement, en faisant l'effort d'intelligence et en donnant sa sueur au jour qui se lève et même à la nuit qui vient. Alger a toujours été modeste ; et être tapie dans une baie qui la protège des mauvais vents y compris de la prétention ne l'a pas empêchée d'édifier une Casbah qui utilise la pente comme nulle autre ville et l'adossement au bâtiment mitoyen mieux que toute autre. En hommage à cela, Buchenal y a développé l'architecture néo-mauresque, Le Corbusier y a développé sa théorie d'architecte urbaniste alors qu'Oscar Niemeyer y a concrétisé un beau projet, et Pouillon offert à la mer un autre éclat de bâtiments blancs.
(À suivre)
A. E. T.


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