Dévoilant ses projets d'extension pour l'année 2012, mais aussi ses projets à moyen terme, le patron de Hyundai Motor Algérie (HMA), Omar Rebrab, croit dur comme fer que tout projet non protégé et qui ne s'inscrit pas dans un environnement propice est appelé à disparaître. De la mort de Fatia au projet (en cours) de Renault, qualifié de “Fatia-bis”, M. Rebrab estime que ce genre de programmes nécessite plus qu'une visibilité. Affirmant que la valeur ajoutée est reléguée au dernier plan en Algérie, notre interlocuteur refuse qu'un secteur dépende de 7 ministères alors qu'il n'y a absolument aucune passerelle entre l'Etat et les concessionnaires. Il revient également sur les résultats de HMA au dernier Salon de l'automobile d'Alger, de l'année 2011 et développe les perspectives du groupe, notamment avec le projet de reprise, la fabrication de composants, le phénomène des revendeurs, les “voitures cercueils”, avant de nous inviter à une virée sur le site de Oued Smar où d'importants projets sont en cours. Ecoutons-le… Liberté : La 15e édition du Salon de l'automobile d'Alger a connu un grand succès, et ce, malgré les aléas inhérents à l'organisation. Quel bilan tirez-vous de cette manifestation ? ll Omar Rebrab : C'est vrai que cette année, le Salon de l'auto a été une exception que je n'ai jamais vue ! Il y avait effectivement un rush extraordinaire et dès le premier jour, il y avait foule. Pour nous, le bilan a été très positif et nous avions eu plus de 1 000 commandes en portefeuille. J'espère que la prochaine édition sera meilleure que celle de cette année. Mais il faut reconnaître que le Salon de l'automobile est devenu incontournable et une référence régionale. Il faut savoir une chose, les augmentations des salaires ont fait qu'il y a une forte demande sur l'automobile, et ce, malgré une conjoncture économique difficile. Car, acheter un appartement est devenu inaccessible, du coup la voiture est devenue le seul refuge pour les placements. Le Salon de l'automobile a également coïncidé avec une fin d'année où Hyundai Motor Algérie occupe la deuxième place au hit-parade des ventes. Quels sont vos objectifs pour 2012, surtout avec l'introduction de nouveautés, comme Atos Eon, le Vélostère et la I40, des modèles qui ont eu du succès au Salon ? Chaque année, nous faisons un bilan prévisionnel. Cette année, nous avons fait un business plan pour faire 70 000 véhicules. C'est un peu notre objectif, mais maintenant tout dépend si les Coréens mettront à notre disposition assez de produits et tout dépend aussi de la disponibilité et du marché. Je sais pertinemment que le marché, pour cette année, va encore augmenter. Mais les Coréens vont-ils nous suivre sur les produits ? Justement M. Rebrab, concernant la disponibilité. Avez-vous prévu un plan de travail avec la maison mère pour répondre à la forte demande, notamment sur certains modèles comme le New Tucson et Accent ? Je ne vous cache pas, si je vous parle du New Tucson, il y a une forte demande sur le marché international que les Coréens n'arrivent pas à satisfaire, alors nous essayons d'arracher le produit au profit de notre clientèle. Concernant Accent, nous avons demandé cette année pour avoir plus de 23 000 véhicules. Nos partenaires nous ont promis que nous les aurons. Et nous espérons satisfaire notre clientèle. C'est un bras de fer de tous les jours avec les Coréens pour qu'ils puissent nous donner plus de quotas. Mais le client algérien ne comprend pas ces tendances du marché. Dès qu'il paye, il veut son véhicule… D'un pays à l'autre vous avez la demande. Je vais vous citer quelques exemples : vous allez en France c'est la I10, la I20 et la I30 qui sont les plus demandées. Car le niveau de vie de ces pays n'est pas le même. Par contre chez nous, les deux segments les plus demandés sont les segments A et B. À eux seuls, ces deux segments représentent plus de 60% du marché et même un peu plus. C'est pour cela qu'aujourd'hui vous ne pouvez pas comparer le marché d'un pays à un autre. En revanche, vous avez des pays tels que la Libye où ce sont les petites voitures qui sont demandées et cela s'explique par le pouvoir d'achat. Mais il y a autre facteur qui perturbe aussi la bonne démarche des concessionnaires, à savoir le phénomène des revendeurs… La semaine dernière, j'ai remboursé 10 Atos pour des clients ! C'était des revendeurs. J'ai mis une commission à qui j'ai clairement notifié que si une personne vient avec un registre du commerce et veut acheter plusieurs voitures et qu'il s'agit d'une entreprise, la commande serait faite et suivie. Mais pour un privé, s'il demande deux voitures sans registre du commerce, le refus est systématique. Je vous le dis, la semaine dernière j'ai remboursé plusieurs personnes qui étaient des revendeurs. Avant de passer à un autre sujet, quel est votre commentaire sur les véhicules hors normes et qui circulent en Algérie ? Quand tu vois des voitures qui ne sont pas homologuées, quelle que soit leur provenance, moi je les appelle des cercueils ambulants. Le problème, on les laisse rouler. Aujourd'hui, HMA mise davantage sur le service après-vente, véritable force de frappe. Vous avez un maillage national rationnel et équilibré et qui arrive jusqu'à l'extrême Sud sachant que vous avez lourdement investi sur le SAV. Pouvez-vous nous éclairer sur ce point ? Il faut savoir que nous avons investi de trois manières. La première, nous avons ouvert nos propres succursales. Aujourd'hui, nous avons la succursale d'Alger, qui est le siège avec les 3S. Nous avons celle d'Oran et celle de Bordj Bou-Arréridj. Le deuxième point, nous avons des associés. Nous avons 6 associés à travers le territoire national. Le troisième point, nous avons des distributeurs à qui nous avons donné des agréments et nous faisons les 3S. Cela signifie la vente du véhicule, le service après-vente et la pièce de rechange. C'est la manière dont nous nous sommes organisés. Aujourd'hui, certes, notre réseau représente 60% de notre chiffre d'affaires. Cela veut dire que nous assurons non seulement la vente, mais aussi le SAV. Prenons l'exemple de notre agent de distribution de Béjaïa. Il est l'un des meilleurs agents distributeurs aujourd'hui ! Il a vendu à lui seul plus de 4 000 voitures l'année dernière. Vous êtes également sur beaucoup de projets. Pouvez-vous nous énumérer les projets prioritaires pour HMA pour l'année 2012 ? Nous avons des investissements d'extension. Nous allons commencer à construire le nouveau showroom pour la reprise. À côté, nous allons faire une extension des bureaux et nous allons ouvrir un restaurant. Cela concerne l'investissement local au niveau de la zone industrielle de Oued Smar. Il y aura une extension pour la pièce de rechange et nous allons construire l'équivalent de 7 000 mètres carrés de hangars pour recevoir toutes les références en pièces de rechange supplémentaires et l'extension pour le SAV. Cela se fera également au niveau de Oued Smar. Nous allons ouvrir au courant de l'année 2012 une nouvelle succursale à Blida et une autre à Cheraga (Alger). Pour ces deux projets, nous sommes déjà en plein chantier. À la rue Hassiba Ben Bouali, sur Alger-centre, nous allons avoir les 3S. Ici, le showroom ouvrira au courant de la semaine. Car, au départ, à la rue Hassiba nous avons toujours eu les 2S. C'est une nouveauté pour le SAV et pour faciliter l'accès au client qui habite à Alger-centre. Nous avons des agents sur Alger-centre qui font les 3S, comme à Riadh El-Feth et à Birkhadem. Et comment assure HMA cette proximité en matière de transport des véhicules ? Pour le transport des véhicules, nous avons une de nos filiales qui fait de la location de voitures, la location de matériel de travaux publics et qui fait également la location de camions. Ils ont acquis dernièrement 26 camions porte-véhicules. Ils sont autonomes. Sur ce point, nous faisons de la sous-traitance avec tous nos partenaires, y compris avec nos concurrents. La seule chose, nous sommes aujourd'hui à Jijel avec un parc de 300 000 mètres carrés et qui peut porter jusqu'à 25 000 véhicules. Quel sont les perspectives d'avenir pour HMA, notamment en ce qui concerne vos projets de construction de bus et de camions et la fabrication de composants et pièces de rechange ? J'ambitionne d'ouvrir une usine de fabrication de bus et de camions en Algérie. Je pars bientôt en voyage pour visiter une usine Hyundai qui fait dans le montage des bus pour tenter le même modèle en Algérie. Aujourd'hui, parler d'une usine en Algérie suppose bien sûr de lourds investissements et des garanties. Pour moi, le projet Renault d'ouvrir une usine en Algérie ne verra jamais le jour. C'est Fatia bis et vous pouvez le dire. Il n'y a pas d'environnement propice à cela. Même pas le minimum de loisirs. Aujourd'hui quand ont fait une usine, cela suppose aussi la proximité avec un port, mais aussi la disponibilité d'une main-d'œuvre qualifiée. Il faut mettre tout un environnement. À l'AC2A, nous croyons d'abord à un système intégré qui protégerait et l'investisseur et son capital. Bref, pour 2012 nous continuerons à investir. Il va y avoir d'autres nouveautés et nous allons vers la fabrication de quelques pièces de rechange, puis nous irons vers l'extension de l'entreprise de montage de bus et camions. La voiture, ça ne m'intéresse pas, c'est trop compliqué. Et ce sera pour quand le premier bus made in Algeria ? Je voudrais vous dire bientôt, mais tout dépend des autorités du pays et de la protection de nos investissements. La SNVI perd de l'argent et l'Etat éponge ses dettes. En revanche, si je perds de l'argent, qui me protégerait ? Si j'avais au moins un vis-à-vis ! Il faut savoir que la grande part des ventes des bus se fait sur les créneaux Ansej et Cnac. Si un Chinois introduit un bus clés en main et le vend en hors taxes et moi je fabrique le bus et je le vends en hors taxe quelle est mon intérêt ? Je vais perdre de l'argent, je ne suis pas protégé. De plus, dans le secteur de l'automobile, nous dépondons de 7 ministères. Il est urgent que l'Etat établisse une passerelle avec les concessionnaires ! Cela va sans dire, j'ai deux projets en tête pour la pièce de rechange. Nous allons fabriquer du verre pour l'automobile, du moment que le groupe Cevital fait du verre industriel à Larbaâ, et nous allons acheter les moules. L'autre projet concerne la carrosserie si le groupe se lance dans la sidérurgie, et probablement les filtres. Et le dernier touchera tous les composants en plastique pour l'automobile. Farid. Belgacem. / Djazia. Safta.