Le ministre de l'Education a commencé à appliquer, hier, les mesures répressives contre les enseignants grévistes. Les proviseurs éprouvent du mal à exécuter les instructions. Les collèges et les écoles primaires menacent de rejoindre la protestation. Son Conseil national extraordinaire s'est tenu, hier, à Alger Le Cnapest refuse de céder Alors que le ministère avance un taux de reprise de plus de 73%, les délégués de 43 wilayas de ce syndicat contestent avec vigueur ce chiffre. Le siège du Cnes n'a jamais accueilli autant de monde que depuis la naissance du mouvement de contestation des enseignants du secondaire. La salle ne pouvait pas contenir tout ce beau monde venu des quatre coins du territoire national. Les délégués des professeurs syndicalistes affiliés au Cnapest représentant 39 wilayas se sont déplacés à Alger pour prendre part au conseil national extraordinaire. Pour la première fois, les enseignants représentant le CLA et le Cnapest, se sont retrouvés dans ce siège en rangs unis. Ces deux organisations ont réuni leurs bases pour consultation et décider de la suite à donner à leur mouvement de protestation : “Le pouvoir ne fait pas de distinction entre le CLA et le Cnapest. Nous sommes tous dans le même bain et nous avons intérêt à nous serrer les coudes face aux menaces d'un autre âge”, déclare un professeur. Il était 11h30 quand M. Mériane, accompagné de M. Osmane, est venu prendre la parole devant l'assistance nombreuse de professeurs du CLA. C'est une première depuis la création de ces deux organisations, et le coordinateur du Cnapest a été fortement ovationné : “L'union fait la force”, scandaient les présents. Dans une courte intervention, le coordinateur du Cnapest a attiré l'attention sur l'importance et la portée de leur organisation : “C'est la première fois qu'un mouvement de cette ampleur se constitue dans le milieu de l'éducation. L'objectif du pouvoir est de casser cette nouvelle dynamique qu'il ne peut pas domestiquer. Restons unis, car nos revendications sont nobles et porteuses de bien pour notre pays.” Le conseil national du Cnapest a débuté aux environs de 13h30, et les délégués des wilayas ont présenté les taux de suivi de la grève. Les chiffres présentés sont en totale contradiction avec ceux présentés par le ministère de l'éducation. Ces représentants ont traité de tous les noms l'ENTV à qui ils reprochent d'avoir déformé et versé dans la manipulation des chiffres. Les délégués de Constantine, Tébessa, Mila, Annaba, Mascara, Ouargla, Blida, Bouira, Alger, donnent une moyenne de maintien de la grève de plus de 90%. Néanmoins, dans quelques wilayas comme El-Taref, Aïn Témouchent, Relizane, le taux est de 45 %. Il est à relever ici, la franchise dont ont fait preuve les délégués de ces wilayas qui ont été relativement démobilisées. Par ailleurs, beaucoup de professeurs qui ont rejoint les classes se sont rétractés hier. La plupart ont été reçus d'une manière humiliante par leurs élèves : “Allez aider vos collègues. Que faites-vous ici monsieur le professeur alors que vos collègues sont en grève. Vous avez peur ?” leur lançaient-ils. L'exemple le plus frappant vient de la wilaya de Béjaïa. Alors qu'on s'attendait à une baisse du taux de suivi de la grève qui était de 87 % après les menaces du gouvernement de procéder aux radiations des enseignants, ce taux a, au contraire, augmenté à 92 %. Les délégués de Béjaïa ont mis à la disposition de la presse et du conseil tous les procès-verbaux des assemblées générales pour appuyer les chiffres avancés. Les enseignants de cette région du pays, choqués par les manipulations de l'unique, ont rejoint le mouvement de protestation en signe de solidarité avec leurs collègues : “Ce que nous avons vu à la télévision nous a choqués. Nous étions sur place, et tout ce qui a été montré est faux. Nous pensions que ces pratiques étaient révolues”, soulignent ces délégués. Un taux “officiel” de reprise de 73% Dans un communiqué parvenu, hier, à notre rédaction, le ministère de l'éducation fait état d'un taux de 73,72% de reprise des cours sur le territoire national. Par ailleurs, on peut lire sur ce document que conformément aux mesures arrêtées par le gouvernement, des avis de radiation ont été acheminés, hier, à tous ceux qui n'avaient pas regagné leur poste. La wilaya la plus concernée par ces remplacements est Alger, dont le taux de reprise ne dépasse pas les 27 %, et la tutelle compte commencer les recrutements des nouveaux diplômés à partir d'aujourd'hui. Ce communiqué fait état de dépôts de plaintes à l'encontre de 16 responsables, meneurs de cette grève qualifiée d'illégale. Mourad Belaïdi Un proviseur face au “Sale Boulot” Le cœur et la raison La mort dans l'âme, un responsable d'un grand lycée d'Alger nous livre son angoisse de signer les radiations contre ses anciens collègues. Témoignage. C'est un responsable d'un grand lycée d'Alger complètement déchiré que nous avons rencontré, hier, dans son bureau. Ancien enseignant dans le même établissement, Rachid, appelons-le ainsi, ne sait plus quoi faire, confronté qu'il est à une situation où le cœur le dispute à la raison. D'un côté, ce proviseur se doit d'obéir à sa tutelle qui exige de lui à ce qu'il abatte les oukases de Benbouzid sur ses malheureux professeurs grévistes. De l'autre, il éprouve une indescriptible peine à passer à l'acte contre ses anciens collègues et amis… Dans son bureau jonché d'une montagne de paperasses, le responsable de cet établissement nous montre, inquiet, une pile de radiations remplies qu'il devrait envoyer à l'inspection académique. Le téléphone sonne à intervalles réguliers, mais notre brave proviseur ne prête pas trop attention à la voix insistante qui réclamait les fameux documents devant sceller le licenciement d'une vingtaine d'enseignants de son lycée. Grande et grave décision à prendre pour quelqu'un qui a tissé des liens amicaux avec ses enseignants. “Je leur demande de patienter sous prétexte que je n'ai pas encore rempli ces fiches pour reculer le plus tard possible leur envoi à l'inspection”, affirme ce responsable en proie à un dilemme cornélien. Pour cause, les grévistes n'ont théoriquement pas droit d'accès à l'établissement d'après les instructions fermes du ministère, mais lui, ferme les yeux. Il les autorise gentiment et solidairement à discuter dans l'enceinte. “Comment voulez-vous que je fasse ? Ce sont des amis avec lesquels j'ai travaillé des années durant, et maintenant pensez-vous qu'il est facile de les mettre à la porte…”, lâche-t-il visiblement dépité. Mieux encore, il se permet même de discuter allègrement avec des partisans du Cnapest dans le hall de l'établissement, histoire de décrisper un peu l'atmosphère. “Vous savez, je ne veux pas altérer mes relations avec ces enseignants avec ces histoires de radiation alors que cette crise sera certainement réglée”, dit-il, avouant même sa sympathie pour la cause des enseignants en rupture de ban. En attendant, il s'accroche à un “immense” espoir : celui de voir le département de Benbouzid accéder aux revendications des grévistes et ces derniers reprendre le chemin de son lycée. “Quitte à ce que ce soit le président de la République qui intervienne pour mettre fin au conflit”, souhaite-t-il. HASSAN MOALI Portrait d'un professeur remplaçant “Pas question de casser la grève” “Pas question de casser la grève, je ne suis pas capable de débuter ma carrière dans ces conditions”, c'est avec ces mots que Mlle L. Djamila, licenciée depuis quatre ans de l'Ecole normale supérieure (ENS) de Kouba, commente la dernière décision prise par le ministère de l'Education nationale qui avait déclaré qu'il procédera au recrutement de nouveaux diplômés, fraîchement sortis de l'université, pour assurer les cours dans les établissements paralysés par la grève depuis huit semaines. Selon cette jeune diplômée aux traits juvéniles, les revendications sont tout à fait légitimes et les enseignants ne méritent pas une mesure aussi extrême que celle de la radiation. “J'attendais impatiemment ce poste de travail et maintenant qu'on me le propose, je suis obligée de refuser par solidarité avec les professeurs radiés”, déclare Djamila qui ajoute : “Je ne veux pas d'un poste de travail où je serai sous-payée, où mes droits seront bafoués et où le ministre nous menace de recourir aux mesures extrêmes au moindre problème. Et même si tous les stagiaires acceptent les remplacements proposés par le ministre, nous ne serons jamais crédibles aux yeux des élèves. Ils nous considérerons toujours comme les universitaires qui ont fauché les postes à leurs enseignants.” Un choix difficile à faire pour ce jeune professeur de sciences naturelles qui n'a jamais exercé et qui estime que l'enseignement n'est pas une profession de substitution destinée au remplacement des grévistes en cas de crise, mais une vocation chargée de former des milliers de citoyens. “J'ai opté pour ces études par choix, j'ai eu des enseignants tellement épris de leur métier qu'ils nous ont transmis l'envie de marcher sur leurs traces. Je ne peux les trahir même en sachant qu'une telle occasion ne se représentera jamais”, affirme Djamila qui pense que c'est le moment de mettre fin au bras de fer entre les enseignants et le ministère de l'Education. “Le remplacement des protestataires n'est pas une solution. Je refuse d'être une victime de ce conflit”, conclut-elle. N. A. Le gouvernement met à exécution ses menaces Les décisions de radiation sont arrivées Si l'application de la mesure de radiation n'est pas la même dans tous les établissements, certains professeurs se sont vus licenciés avant même la parution des instructions visant les grévistes. La date-butoir pour la reprise des cours devait expirer, hier matin, à huit heures. Et les enseignants récalcitrants à l'appel du ministre de l'éducation, lancé vendredi, devaient se voir signifier leur radiation définitive. Ces derniers, à qui l'administration a interdit l'accès aux établissements, ont refusé catégoriquement d'accuser réception du document. “J'ai refusé de prendre la radiation, conformément aux instructions du conseil national de notre syndicat (cnapest)”, assure une enseignante au lycée émir-Abdelkader qui qualifie, par ailleurs, la mesure de “ridicule”. “C'est absurde de vouloir radier d'un trait 50 000 professeurs et les remplacer au pied levé par des contractuels qui n'ont aucune expérience”, observe encore notre interlocutrice pour qui “le ministère fait dans l'improvisation”. Concrètement, l'application de la mesure n'est pas la même dans tous les établissements. Au lycée émir-Abdelkader, l'administration s'est limitée à établir un état anonyme des absents, exprimant en pourcentage les besoins en enseignants pour chaque matière. Ailleurs, certains proviseurs, accusés par les grévistes de “faire du zèle”, ont envoyé à l'académie les listes des professeurs qui ont refusé de reprendre les cours. “On a transmis les listes des enseignants qui ont refusé d'accuser réception des avis de radiation, on attend les instructions pour la suite à donner”, explique un proviseur qui dit n'avoir “qu'un seul souci, celui de voir les choses rentrer dans l'ordre et réconcilier les enseignants avec l'administration”. Il est vrai que cette grève a créé un clivage profond entre une administration tenue d'obéir aux injonctions de la tutelle et les enseignants plus que jamais derrière leur syndicat. La mesure de radiation est considérée “illégale” par d'autres enseignants qui accusent le ministre de l'éducation de “violer la loi”. Pour Hamid, professeur au lycée de Rouiba, “la radiation ne devait intervenir qu'au terme de l'échec de la négociation dûment constaté par une instance d'arbitrage”. Ce qui n'a pas été le cas jusque-là, dans la mesure où le ministre de l'éducation s'est adjugé le rôle de juge et partie dans ce conflit, qui perdure en grande partie à cause de cette situation de confusion entre les protagonistes. Radiés avant le conseil de gouvernement Par ailleurs, le conseil de gouvernement tenu, lundi dernier, n'a fait qu'entériner la décision de radiation des enseignants grévistes prise auparavant. En effet, alors que la réunion qui a consacré cette mesure s'est déroulée en date du 24 novembre, des avis de radiation portant la signature de certains directeurs de l'éducation sont parvenus la veille aux concernés. C'est en tout cas ce qui s'est passé à Oran (voir ci-contre fac-similé). L'avis en question, qui cite de nombreuses dispositions de la loi, ne fait aucune allusion au conseil de gouvernement. Est-ce à dire que le chef de l'exécutif s'est contenté d'avaliser la décision de son ministre de l'éducation ? Ou s'agissait-il d'un préalable à une opération d'exclusion généralisée ? En tout état de cause, ces radiations sont, selon les grévistes, illégales et en violation de la loi 91-12 du code du travail qui stipule que toute décision de ce genre est un ultime recours dont l'instance judiciaire peut uniquement se saisir après l'épuisement de toutes les voies de règlement possibles. N. S./S. L. 4 syndicats promettent de débrayer aujourd'hui si Ouyahia persiste Menaces sur le moyen et le primaire Le conflit de l'éducation n'est visiblement pas près de connaître un épilogue rapide. Réuni, hier, en assemblée générale, le Conseil des collèges d'Alger, le Conseil du primaire d'Alger, la Coordination des adjoints de l'éducation, ainsi que la Coordination des travailleurs de l'éducation de la daïra de Bab El-Oued et Bologhine, affiliés à la Fédération nationale des travailleurs de l'éducation (FNTE), menacent de faire grève aujourd'hui, si le ministère de l'éducation nationale met à exécution les mesures extrêmes. En effet, le collectif des conseils de la wilaya d'Alger, Béjaïa, Oran, Tipasa, Tizi Ouzou et El-Oued soutiennent le mouvement de contestation des enseignants du secondaire qui paralyse les lycées depuis huit semaines, et rejettent le mépris affiché par le ministère de l'éducation en refusant les injonctions de conjoncture : la radiation des enseignants grévistes de la famille de l'éducation et la poursuite judiciaire des deux porte-parole des conseils autonomes, le Cla et le Cnapest. “Nous condamnons cet arsenal de sanctions décidé par le ministre de l'éducation, et nous considérons que la mesure de radiation ainsi que celle de remplacement est comme une insulte au noble métier qu'exercent ces enseignants depuis des années”, atteste le représentant du Conseil des collèges d'Alger. Et d'ajouter : “Les pouvoirs publics ont les moyens de répondre positivement à toutes les revendications des enseignants grévistes, notamment celle qui concerne l'augmentation des salaires car leur rétribution ne suffit guère pour couvrir les besoins d'une famille à sa charge”. N. A. Sur les pas du président du CNAPEST Mériane contre Benbouzid Depuis deux mois, ce professeur de lycée ne se contente plus d'enseigner les rudiments de la citoyenneté à ses élèves. Comme Monsieur tout le monde, Méziane Mériane marche dans la foule, indifférent. Il fait glisser ses pas nonchalants sur le bitume et se confond aux innombrables passants qui vaquent à leurs tâches quotidiennes. Ses lunettes sur le nez, son cartable à la main et sa cravate soigneusement nouée autour du cou, il porte son habit d'enseignant comme d'autres portent une religion. Pour cause, depuis deux mois, ce professeur de lycée ne se contente plus d'enseigner les rudiments de la citoyenneté à ses élèves, mais est en train de donner une belle leçon de démocratie aux décideurs politiques du pays. “Ce pouvoir a montré ses limites. Il ne répond que par la violence”, assène-t-il sur un ton dépité. Lui, ce petit enseignant de province, propulsé au rang de figure syndicale emblématique, sait de quoi il parle. Dénigré, suspendu de son poste, malmené et interpellé par la police, il ne doit son salut qu'à sa témérité et à son endurance. Sur son visage placide, dans son verbe calme et tempéré, rien ne laisse pourtant entrevoir un quelconque profil de leader. Da Méziane a gagné la sympathie de dizaines de milliers d'enseignants, sans doute parce qu'il leur ressemble. Il parle leur langage et reflète leur mal vie. “Nous ne reculerons pas”, dit-il résolu. Sur le chemin qui le mène, en ce dimanche matin, vers le siège du Conseil national des enseignants du supérieur (CNES) à la rue Charras, des visages souriants donnent, çà et là, dans la foule anonyme, des poignées de main. Des collègues grévistes, harassés par les velléités de mise au pas des pouvoirs publics, puisent à sa rencontre un regain d'espoir. Venus aux nouvelles, les uns et les autres expriment des craintes légitimes. Ils ont peur d'être sacrifiés, sans pitié ni compassion. “Nous avons gagné. Leur passage à l'artillerie lourde prouve que nous avons réussi”, claironne le président du Cnapest devant un auditoire enthousiaste. Dans cette ancienne salle de cinéma que le syndicat autonome des enseignants universitaires a gracieusement concédée aux grévistes, les clameurs fusent comme des cris de victoire. Le moment est historique. Depuis le début du mouvement de contestation, c'est la première fois que les deux initiateurs de la grève se retrouvent au même endroit, face à une seule assemblée. “Qouwa wahida” (force unique), scandent les enseignants. Après son bref et néanmoins retentissant laïus, Mériane quitte le siège du CNES. Il a convoqué les onze membres du bureau du syndicat pour une réunion urgente avant la tenue du conseil national prévu à midi. Les délégués sont néanmoins confrontés à un problème logistique de taille. Où se tiendra la rencontre ? Comme des SDF, les délégués sont contraints de solliciter l'hospitalité du tenancier de l'hôtel Djurdjura — à proximité du boulevard Amirouche — où ils sont hébergés. Malheureusement, la petite pièce qui les abritait auparavant est encombrée par un lit. De retour sur le trottoir, Mériane et ses compagnons sont obligés d'annuler leur conclave et de retourner dans leur unique refuge : le siège du CNES. Habitué à ce genre de péripéties, le président du Cnapest ne désarme pas pour autant. Fort de la mobilisation de la base, il estime que le pouvoir n'a qu'un seul choix : faire machine arrière. “Le collectif du primaire et du moyen menace de rejoindre la grève dès demain”, le réconforte le délégué d'Oran. Ce dernier lui apprend que des enseignantes contraintes à la reprise des cours se sont vu délivrer des certificats médicaux pour justifier leur longue absence et occulter la grève… Sur le portable de maître Mériane, les appels de soutien se succèdent. “Les enseignants comptent occuper la rue”, lui annonce un correspondant de Tizi Ouzou. “Nous avons refusé d'accuser réception des avis de radiation”, lui dit un autre de Blida. Dans cette ville, un proviseur et deux surveillants ont été suspendus par le directeur de l'éducation pour avoir laissé entrer les grévistes à l'intérieur de l'établissement, l'informe-t-on. Révulsé, Mériane comprend le désarroi des pouvoirs publics. “À leurs yeux, il était impossible qu'un syndicat autonome ratisse aussi large”, fait-il remarquer avec un brin de fierté. Le président du Cnapest dénonce le jeu sournois des autorités qui font semblant de tendre la carotte alors qu'elles privilégient le bâton. “Le ministère nous appelle au dialogue, mais refuse de reconnaître notre existence syndicale”, fait-il remarquer. A contrario, les pouvoirs publics se sont évertués, selon lui, à discréditer le Cnapest en agitant l'épouvantail islamiste. “Le délégué de Jijel est un chef Patriote”, soutient-il en montrant du doigt le concerné. Ce dernier arrive. Il fouille dans ses poches et cherche sa carte de résistant. “Je combats le terrorisme depuis 1994. Je lutte désormais contre l'Etat !” constate-t-il désolé. Perdus dans les dédales de la grande ville, Mériane et ses amis ont dépensé leurs dernières économies dans la location de chambres d'hôtel. Leurs téléphones à carte Jezzy sont les seuls moyens à leur disposition pour répercuter leur voix. “Ils ont la télévision, nous avons la presse indépendante”, se félicite Mériane avant de renchérir outré : “Ces gens-là (les tenants du pouvoir, ndlr) se trompent d'époque.” SAMIA LOKMANE À travers le pays Tizi Ouzou Près de 2 000 enseignants menacés de radiation Mille cinq cent quarante enseignants sont menacés de radiation dans la wilaya de Tizi Ouzou. Hier, ils ont été destinataires de mises en demeure pour reprendre le travail aujourd'hui. Le directeur de l'éducation devait réunir, hier après-midi, les chefs d'établissement pour faire le point sur la situation et demander à ces derniers de procéder à l'application des décisions ministérielles. Pour la structure locale du Cnapest : “Ces mesures aussi iniques que démesurées, par leur simple effet d'annonce pouvaient ébranler la détermination des PES en grève, si ceux-ci avaient le moindre doute sur la légitimité de leurs revendications”. A. T. Annaba Le travail de sape des médias L'annonce de l'essoufflement du mouvement de grève des enseignants du secondaire à travers l'ensemble des wilayas du pays, faite par le biais du journal télévisé de 20 heures, samedi, et la lecture des taux de reprise des cours au niveau des différents lycées et technicums ont provoqué un véritable vent de panique dans les rangs des professeurs engagés dans le conflit à Annaba. Ces derniers se sont retrouvés désemparés, hier, face à la tournure qu'ont prise les évènements, ne sachant plus trop s'il s'agissait d'un “lâchage massif” de leurs collègues ou tout simplement “d'une action de désinformation fomentée par un pouvoir dépassé par l'ampleur du mouvement de grève et surtout par son prolongement dans le temps”. Au niveau de la direction de l'Education de la wilaya d'Annaba, on considère que la situation tend vers la stabilisation. Les chiffres avancés par des sources autorisées font état de 41% et de 75% des effectifs qui auraient rejoint leur poste de travail. Chiffres que confirment les différentes associations de parents d'élèves, tout en se “félicitant que la sagesse ait prévalu dans cette affaire où les uns et les autres s'entêtaient”, et ce, au détriment de leurs enfants. Il semblerait que des démarches aient été entreprises par ces mêmes parents d'élèves auprès de certains enseignants, dans le but de les inciter à rejoindre leur établissement au plus tard ce matin. A. ALLIA