Entamées jeudi dernier dans la capitale égyptienne, les négociations entre les douze organisations palestiniennes pour la conclusion d'une trêve dans les attentats contre Israël butent d'ores et déjà sur plusieurs points. Cette fois-ci, il faudra batailler dur pour arracher un accord de cessez-le-feu aux mouvements palestiniens, notamment les plus radicaux d'entre eux. Ces derniers ont clairement affiché leur opposition à une trêve similaire à celle qu'ils ont observée du 29 juin au 22 août 2003, et qu'ils ont rompue à la suite de la multiplication des incursions et des raids ciblés de l'armée israélienne visant directement leurs dirigeants militaires ou politiques. Leur offre conditionnée se limite aujourd'hui à la cessation des attaques contre les civils israéliens. Le Hamas, le Djihad islamique, le Front populaire de libération de la Palestine (FPLP), le Front populaire, commandement général, et Al-Saïka rejettent catégoriquement la proposition du Fatah pour la conclusion d'une trêve d'une année. Ils s'engagent uniquement à “épargner les civils” dans les attaques contre Israël. Cette offre est conditionnée par : la levée du blocus des villes, villages et camps palestiniens, l'arrêt par Israël des incursions, assassinats, expulsions, saisies de terrains et la destruction de maisons, ainsi que la libération de tous les détenus palestiniens dans les prisons israéliennes. Les détails de cette proposition seront élaborés une fois qu'Israël aura donné son accord. Ces cinq mouvements justifient leur refus de cessez les attaques contre Israël par la poursuite de l'occupation de leur territoire. La proposition d'une trêve générale conditionnelle d'un an par le Fatah a provoqué de sérieuses divergences, qui ont conduit le chef de la délégation de l'organisation que préside Yasser Arafat à quitter la salle des négociations. Ce dernier a affirmé que l'attaque des civils n'a jamais fait partie de la stratégie de sa formation dans sa lutte contre Israël. Dans le but de rassembler les participants à ces discussions autour d'une même ligne de conduite et de rapprocher davantage les points de vue, le Front populaire de libération de la Palestine a suggéré la création d'“une direction nationale unifiée” composée des membres du Comité exécutif de l'Organisation de libération de la Palestine (CE-OLP). Cette instance aura pour mission de prendre des décisions politiques que l'Autorité palestinienne sera tenue de respecter. Cette proposition n'a fait qu'accentuer la tension entre les différents protagonistes. Elle a fait l'objet d'un rejet total de la part du représentant du Fatah, qui y a vu une tentative de forcer son mouvement à partager le pouvoir avec les autres formations politiques. Les Egyptiens, qui parrainent cette réunion, devront faire preuve de davantage de persuasion pour rapprocher les vues des douze mouvements palestiniens, notamment celles des plus radicaux d'entre eux, pour espérer leur arracher un accord de cessez-le-feu. Il faut dire que le mépris affiché jusque-là par Ariel Sharon à l'égard des Palestiniens ne les encourage guère à s'engager dans la voix de paix, surtout qu'Israël poursuit sa politique répressive dans les territoires autonomes. K. A. Sharon refuse l'offre palestinienne Israël a rejeté, hier, un accord trouvé par des organisations palestiniennes au Caire afin de stopper les attentats suicide dans l'Etat hébreu sans arrêter les attaques contre des soldats ou des colons israéliens dans les territoires occupés. Un responsable israélien a déclaré à Reuters qu'un tel accord ne suffirait pas à permettre la reprise des négociations de paix israélo-palestiniennes ou à organiser un sommet envisagé entre le Premier ministre Ariel Sharon et son homologue palestinien Ahmed Qoreï. “Je dirais qu'une telle demi-mesure est vouée à l'échec. De quel type de trêve s'agit-il lorsqu'il n'y a pas de cessez-le-feu et qu'on continue à tirer ?” a-t-il fait remarquer. Mais il a assuré qu'Israël imiterait les organisations palestiniennes si elles cessaient toute attaque. Saeb Erekat, négociateur membre du gouvernement palestinien, a déclaré que le directeur de cabinet de Sharon et le bras droit de Qoreï se devaient se rencontrer, hier, pour préparer un éventuel sommet jugé crucial pour reprendre les négociations dans le cadre de la “feuille de route” parrainée par les Etats-Unis. Mais le responsable israélien a constaté que les désaccords persistants au Caire sur une trêve pesaient sur la crédibilité de la réunion. Sharon s'est engagé à poursuivre les discussions avec Qoreï pour faire progresser la “feuille de route” qui prévoit une série de mesures réciproques destinées à mettre un terme aux violences israélo-palestiniennes et à mettre en place un Etat palestinien d'ici 2005. Les projets de sommet ont été ajournés depuis des semaines sur fond de conflits concernant l'établissement des conditions adéquates pour des discussions. Israël a rejeté la demande palestinienne, en guise de geste avant un sommet, de l'arrêt de la construction d'un mur en Cisjordanie qui est considéré comme une conquête de territoire, mais que l'Etat hébreu juge nécessaire pour empêcher les kamikazes d'atteindre ses villes. Sharon a exigé que Qoreï prenne des mesures pour mettre un terme aux violences des activistes contre Israël. Israël considère les discussions du Caire comme une première étape vers cet objectif, a ajouté le responsable. Qoreï est venu au Caire pour essayer de sceller un accord de trêve, mais les discussions ont échoué, les principales organisations musulmanes ayant préparé un accord qui ne fait pas référence à un cessez-le-feu en Cisjordanie et à Gaza, occupés par Israël depuis la guerre de 1967. De son côté, le cheïkh Ahmed Yassine, chef spirituel du mouvement islamique Hamas, groupe armé qui a tué des centaines d'Israéliens dans des attentats suicide en trois ans d'Intifada, s'est déclaré opposé à l'existence d'un Etat juif séparé sur la terre palestinienne. Il a estimé que les Israéliens devraient créer un Etat en Europe s'ils refusent un Etat où coexisteraient les religions. “Nous sommes contre un Etat juif d'apartheid sur la terre de Palestine”, dit le cheïkh Yassine dans une interview, parue, hier, dans Der Spiegel. La poursuite des violences a également pesé sur les discussions. L'armée israélienne a abattu trois Palestiniens dans la bande de Gaza — un adolescent et deux hommes armés. De source militaire israélienne, on a affirmé que des soldats d'un avant-poste près d'une colonie israélienne non loin de Gaza avaient déjoué vendredi soir une tentative d'attaque en abattant deux suspects. Un porte-parole du Hamas a revendiqué la responsabilité de cet incident dans un coup de téléphone à Reuters. Par ailleurs, dans le camp de réfugiés de Rafah, près de la frontière avec l'Egypte, un adolescent de 16 ans a été touché de six balles dans la tête, la poitrine et le dos.