Au-delà des 150 recours déposés auprès du Conseil constitutionnel et autant de plaintes envoyées à la Cnisel qui rendra son rapport définitif le 24 mai, au plus tard (date butoir de fin de mission), des démarches de nature purement politique sont entreprises pour saborder le verdict des urnes. L'Assemblée nationale, élue le 10 mai dernier, sera installée ce dimanche, conformément à une disposition de la loi organique portant régime électoral, qui dit que les nouveaux députés entament leur mandat quinquennal le dixième jour suivant la date du scrutin. La septième législature commence, toutefois, sur fond de contestatation de l'issue du scrutin qui consacre une victoire, aux proportions inattendues, du FLN. À peine le Conseil constitutionnel a rendu public les résultats validés des élections législatives, qu'il reçoit un premier lot de recours. Les partis politiques ayant présenté des listes électorales et les candidats indépendants ont le droit de déposer, auprès du Conseil constitutionnel dans un délai de 48 heures, des requêtes remettant en cause les chiffres qu'il a proclamés. L'institution, présidée par Tayeb Belaïz, dispose de 72 heures pour statuer sur le recours. Si elle le juge fondé, elle peut, par décision motivée, soit annuler l'élection là où elle est contestée, soit reformuler le procès-verbal des résultats établis et proclamer le candidat qui est régulièrement élu. Le Conseil constitutionnel a reçu plus de 150 recours, émanant de plusieurs partis politiques et présentant des motifs divers, selon une source qui a briffé la rédaction de l'APS. Le chiffre, communiqué avant l'expiration du délai réglementaire, soit jeudi à 20 heures, pourrait être plus important. Un cadre du Front pour la justice et et le développement (FJD), drivé par Abdallah Djaballah, qui a obtenu 7 sièges dans la nouvelle assemblée nationale, affirme avoir présenté au Conseil constitutionnel “des preuves matérielles fondant les recours afin de récupérer des sièges. Si le Conseil constitutionnel examine et tranche nos recours avec neutralité et intégrité, nous pourrons au moins récupérer les sièges qui nous permettront de constituer un groupe parlementaire dans la future APN”, a-t-il déclaré à l'APS. La commission nationale indépendante de surveillance des élections législatives (Cnisel) devra rendre public son rapport définitif au terme de sa mission, c'est-à-dire le 24 mai prochain. Ce document est attendu dans une version contenant les multiples irrégularités et dépassements ayant émaillé le scrutin du 10 mai. En sus des dizaines de cas notifiés par ses propres observateurs au niveau local, la commission a été destinataire de 150 plaintes émanant de partis politiques et candidats sans chapelle partisane. Au-delà de la procédure réglementaire, des démarches de nature purement politique sont entreprises pour saborder le verdict de l'urne. Dix-huit formations, représentées à la chambre basse du Parlement, le Mouvement de la société pour la paix (MSP), le Front national algérien (FNA), le Front de la justice et du développement (El-Adala), le Front du changement (FC), le Mouvement El-Infitah (ME), le Parti Jil Jadid (PJJ), le Parti El-Fedjr El-Jadid (PFJ), le Front de l'Algérie nouvelle (FAN), le Parti de la liberté et de la justice (PLJ) et le Mouvement des nationalistes libres (MNL), se concertent pour adopter une position commune traduisant le rejet des résultats des législatives. Le MSP, qui s'est, jusqu'alors, arrivé au pouvoir par le truchement de son alliance avec le RND et le FLN, se retrouve à pactiser avec des formations politiques de création récente pour faire entendre sa voix. D'autant que les partis, ayant confirmé leur existence sur l'échiquier politique comme le FFS et le Parti des travailleurs, se mettent en retrait de cette initiative, orientée sur le boycott de l'APN. Profondément déçu de n'avoir fait gagner à sa formation — le Parti de la liberté et de la justice (PLJ) — aucun siège à l'APN, Mohamed Saïd prend option pour son retrait définitif de la scène politique. Au lendemain des législatives, il a déclaré que les résultats, annoncés par le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales “sont en deçà des aspirations du peuple et constituent une surprise. Ils consacrent une logique de pouvoir qui ne renforce ni l'autorité de l'Etat ni un jeu politique sain”. En somme, le pouvoir est accusé, de toutes parts, d'avoir manipulé les résultats de telle manière à asseoir son hégémonie sur le Parlement. Peut-être que ce qui compte, pour lui en fin de compte, c'est la caution qu'il a reçue de la communauté internationale, visiblement soulagée que l'Algérie soit épargnée par une montée en puissance des islamistes, comme ce fut le cas en Tunisie, au Maroc et en Egypte. S H