Deux cents dix membres du comité central du FLN ont signé l'acte de destitution de leur chef actuel, Belkhadem. Une majorité absolue et pas loin des deux-tiers. Dans n'importe quelle démocratie, le leader d'une formation politique qui obtient 48% des sièges à l'Assemblée nationale est porté aux nues. Ce qui se passe au FLN prouve seulement que cela n'a rien à voir, l'action d'une direction de parti et les résultats électoraux de ce parti. D'ailleurs, les membres du CC, occupés presque tous, soit à révoquer Belkhadem, soit à le maintenir, n'ont pas vu passer les élections législatives. Pour priver Belkhadem des dividendes politiques de ce score, ils en ont généralement attribué le mérite à Bouteflika, ancien candidat indépendant, président de la République et néanmoins président honorifique du parti. Lui s'en défendrait d'avoir volontiers intervenu même indirectement dans ce résultat. Quel charivari ! Ces élections semblent avoir semé la stupéfaction dans les partis, du moins dans ceux qui escomptaient un meilleur butin que le maigre quota qu'ils ont glané. Le RND s'est muré derrière un quasi-silence avant de lâcher une “satisfaction” de forme ; le FFS a fait de même avant d'émettre une protestation toute aussi formelle ; le PT a rouspété, mais ce parti a toujours camouflé sa normalité par sa sonorité. Reste les sept ou huit partis islamistes et crypto islamistes qui menacent de se réunir. Ils ne semblent pas pressés de renoncer à leurs sièges et trouveront bien l'argument qui concilie une spoliation de leurs voix, qu'ils dénoncent, et leur présence dans la future Assemblée. Ce qui est remarquable, c'est qu'il y a finalement moins de crise chez les vainqueurs, le seul FLN, que chez les vaincus, les quarante-trois autres partis. Sauf que la crise du FLN n'a rien à voir avec son résultat électoral ; elle l'a précédé. Mieux, elle l'a anticipé. Celui qui a programmé le triomphe du FLN a donc programmé la révocation de Belkhadem. Mais alors, pour qui a-t-on fait gagner le Front ? Après avoir longtemps cherché dans sa gestion autoritaire un motif à leur cabale contre leur secrétaire général, les “frondeurs” ont fini par en trouver un dans son penchant islamiste. La découverte ? Où était Goudjil et les autres quand Belkhadem pactisait en 1991 avec l'ambassadeur d'Iran… à l'APN ? À regarder les profils des “meneurs”, ils ne sont pas hommes politiques à concevoir des desseins d'initiative autonome. Celui qui a programmé le triomphe du FLN et a programmé la révocation de Belkhadem a, donc, programmé la fronde du CC du FLN. Mais, encore une fois, pour qui ? Le FLN, Belkhadem compris, ne nous le dira pas. Le RND ne nous le dira pas. Les autres ne le savent pas. À moins que les premiers, comme les seconds, ne le savent pas non plus. Comme au temps du “coup d'Etat scientifique”, comme au temps de “la justice de la nuit”, il n'y a que celui qui tient les manettes de cet étrange mécanisme national de redistribution des positions qui le sait. Qu'importe ! La première “qualité” du sérail, c'est son respect “historique” de la règle d'omerta. À moins que toute “la réforme” ne soit que cela : une lente mais irrépressible mise en œuvre d'une opération d'alternance au pouvoir à l'algérienne. M. H. [email protected]