L'Alliance présidentielle, qui a porté en 2004 la candidature de Abdelaziz Bouteflika à la présidentielle, arrive à sa fin. Une fin quelque peu prématurée. Un peu triste aussi. Le MSP, le RND et le FLN s'étaient jurés, face à l'adversité qui s'était développée autour de la candidature de l'actuelle locataire du palais d'El Mouradia, d'affronter « vents et tempêtes » et imposer des choix politiques.Avant d'établir le pacte, les concepteurs de la stratégie avaient mis en place un « plan » de récupération du FLN dirigé alors par Ali Benflis, lui-même candidat à la présidentielle. Les « redresseurs » apparaissaient et des voies tortueuses de la justice faisaient le reste. RND et FLN oubliaient les petites rancunes nées en 1997, date à laquelle le parti de Tahar Benbaïbèche, destitué depuis, devait servir de majorité à Liamine Zeroual. Le RND ignorait son animosité vis-à-vis des islamistes et acceptait avec joie de pactiser avec le MSP. L'élection présidentielle passée, l'Alliance devait se remettre en forme pour appliquer le programme de Bouteflika. Elle voulait même donner d'elle l'image d'un groupe homogène capable de faire taire les voix de la contestation politique. L'ambiguïté entre les projets de ces trois partis et le programme qui les unit étaient apparus comme un détail. Ahmed Ouyahia, appelé pour la troisième fois pour diriger le gouvernement, était même arrivé à dire ceci : « L'Alliance présidentielle dérange ceux qui ont été incapables de s'entendre, qu'ils soient islamistes ou démocrates. » Prise dans l'engrenage de la léthargie postprésidentielle, l'Alliance donnait l'impression de temporiser, reconnaissant l'existence de divergences sur certains dossiers comme le code de la famille. Mais voilà que le congrès refait du FLN vient troubler les eaux dormantes. Abdelaziz Bouteflika, resté militant du vieux parti, accepte la proposition des congressistes de devenir président du FLN. Bouteflika a entrepris ce que Zeroual a refusé de faire en 1997 lorsque proposition lui a été faite de prendre la direction du RND. Le poste de président du RND est demeuré vacant jusqu'à ce qu'il soit « effacé » par des amendements statutaires. Que le poste de président du FLN soit « honorifique » ou pas n'a pas d'importance. La symbolique est elle-même suffisante. Même s'il a promis, dans son message adressé au congrès, de « resserrer les rangs de la coalition nationale », Bouteflika, en prévision de prochaines échéances, concentrera son énergie sur son parti. Cela va de soi. Le FLN, pour rappel, est majoritaire au Parlement et dans les Assemblées locales. Position à renforcer probablement, à la faveur des élections législatives et locales de 2007. Bouteflika, qui envisage d'organiser un référendum sur l'amnistie générale, compte s'appuyer, en dehors des circuits traditionnels, sur le FLN pour mener la campagne de persuasion. Abdelaziz Belkhadem, consacré secrétaire général du parti, a, lors de l'ouverture du congrès, appelé les militants à être aux premières lignes de « la bataille » pour l'amnistie générale. Le RND et le MSP, qui se sont mobilisés presque instinctivement pour ce même projet, pourraient bien être amenés à jouer les seconds rôles. Dorénavant, et c'est la loi de la nature, le FLN ne se sentira pas obligé d'être redevable de quoi que ce soit à ses « alliés ». Mieux. Il pourrait bien les ignorer. Le FLN n'a jamais vu d'un bon œil le RND ni pardonné ce qui apparaît comme une « trahison ». Le FLN sera l'instrument d'une véritable politique du « rouleau compresseur » qui fera sauter des verrous, taire des contestations et passer des lois et des projets. Que Ahmed Ouyahia, secrétaire général du RND, soit chef du gouvernement ne changera rien à la donne. Et il n'existe mathématiquement aucun risque pour que le MSP se mette à l'« opposition ». Même au FLN, les causes de la division sont presque annihilées. C'est simple. Le comité central (CC) du FLN est mort. Il n'existe plus dans les nouveaux statuts du parti adoptés par le 8e congrès bis tenu cette semaine à Alger. Le CC, héritage sémantique des vieux partis communistes, est remplacé par le CN, conseil national. Ce conseil est chapeauté par un secrétariat exécutif qui lui-même est sous l'autorité d'un secrétariat national. Cela fait trop de barrières étanches qui n'ont pas seulement vidé le congrès, instance suprême du parti, de ses prérogatives, mais mis le secrétaire général sous contrôle. Si les leaders du RND et du MSP rêvent d'un sommet de l'Alliance pour sauver les meubles, il y a des raisons de croire que la page de 2004 est tournée.