Depuis l'élection de François Hollande, on assiste à un ballet de chefs d'état africains à l'élysée. Entre le 2 et le 7 juillet, ce sont au total trois chefs d'état africains qui ont été reçus à Paris. Tout d'abord, le président de la Guinée-Conakry, Alpha Condé, le surlendemain son homologue gabonais Ali Bongo Odimba et, vendredi 6 juillet, le Sénégalais Macky Sall a bouclé la boucle. Cet agenda exceptionnel, qui a transformé Paris pendant 48 heures en capitale africaine, doit-on le lier à la proximité du sommet de la francophonie qui devrait se tenir en automne en République démocratique du Congo et sur lequel le président français risque de faire boycotter ou aux lobbys multiples de la Françafrique, en France mais aussi en Afrique subsaharienne ? En attendant la décantation, à retenir qu'à chacune des audiences accordées, François Hollande a eu le même mot à la bouche : il n'a cessé de marteler l'attachement de la France aux relations bilatérales, le soutien de son pays aux réformes économiques et sociales. Il semble que le motif principal de ces arrivées en rangs d'oignons de chefs d'état africains soit la question de la dette de leurs pays respectifs dont ils ont sollicité l'annulation d'une partie du stock. François Hollande y aurait souscrit mais, contrairement aux anciens locataires de l'élysée, le socialiste aurait fait savoir à ses hôtes que les cadeaux bancaires de son pays sont assortis de conditionnalités bien contraignantes. Les bénéficiaires sont tenus “de respecter les principes fondamentaux de la démocratie et des droits de l'homme, la bonne gouvernance, d'engager des réformes sociales importantes, d'être regardants sur l'exode de la jeunesse de leur pays vers l'Europe et principalement vers la France". C'est en substance, dit-on aujourd'hui à Paris, la ligne de conduite avec les dirigeants africains. à en croire le nouveau président français et ses proches, l'ère François Hollande va donc sonner le glas de cette traditionnelle conception de l'élysée à considérer que les dirigeants africains sont fréquentables en fonction de leur adhésion à la Françafrique. La réorganisation des institutions françaises en charge du continent noir est en soi un premier acte tangible de la politique africaine de François Hollande. Contrairement à de Gaulle, Pompidou, Giscard, Mitterrand, Chirac et Sarkozy, les “conseillers Afrique" de l'élysée ne dépendent plus directement d'Hollande, mais sont placés sous la tutelle de son conseiller diplomatique, Paul Jean-Ortiz. Au Quai d'Orsay, le ministère délégué à la Coopération devient le ministère délégué au Développement, et son décret d'attribution ne comporte plus le mot Afrique. Les hommes des grands réseaux africains comme Jack Lang ou Roland Dumas ne sont pas sur le devant de la scène. Est-ce à dire que la France se défait de son système franco-africain ? Autre question, le dispositif d'une Afrique gérée en liaison étroite avec les Affaires étrangères résistera-t-il à l'usage ? Les chefs d'état africains proches de la France sans doute vont souhaiter bénéficier de relations particulières. Il reste que François Hollande lui-même n'entretient pas de liens particuliers avec le continent, au contraire de Valéry Giscard d'Estaing, François Mitterrand ou Jacques Chirac. Son expérience du continent se limite à l'Algérie, et à un stage en Somalie à l'époque où il étudiait à l'ENA. “Cela peut être une qualité, il a un regard neuf, dépourvu de toute charge émotive", a avancé Pouria Amirshahi, député de la diversité, de la 9e circonscription des Français de l'étranger et secrétaire national du Parti socialiste à la coopération, à la francophonie et aux droits de l'homme. D. B