Les observateurs des élections ont fait état d'une écrasante victoire des libéraux dans plusieurs circonscriptions et bureaux de vote avec des taux dépassant parfois les 90%. Un tsunami dans un pays ayant eu son Printemps arabe. Les islamistes libyens, donnés gagnants des législatives de samedi se seraient plutôt plantés, selon les premières estimations ! La coalition des libéraux a annoncé hier être en tête dans la plupart des circonscriptions en Libye et les islamistes ont reconnu “la nette avance" de leurs principaux concurrents aux élections législatives à Tripoli et Benghazi, les deux principaux gisements électoraux du pays. Plusieurs observateurs des élections à Tripoli et Benghazi ont fait état d'une écrasante victoire des libéraux dans plusieurs circonscriptions et bureaux de vote avec des taux dépassant parfois les 90%, comme dans le quartier populaire d'Abou-Salim, dans la capitale. Le chef du Parti de la justice et de la construction (PJC), qui s'est constitué autour de la matrice des Frères musulmans égyptiens, en prévision de ces premières élections en Libye, Mohamed Sawan, a, par ailleurs, reconnu en personne l'échec de sa formation ainsi que d'autres groupuscules islamistes. L'Alliance des forces nationales (AFN), qui réunit plus de 40 petits partis autour d'architectes de la révolte de 2011, qui se sont présentés tous sous la casquette libérale, a ainsi cloué au poteau toute la mouvance islamiste pourtant soutenue non seulement par le Qatar et l'Arabie Saoudite, mais aussi par le président du CNT qui, de Benghazi libérée, avait annoncé là qu'il voulait appliquer la charia islamique, allant jusqu'à promettre l'établissement de la polygamie. Certes, il faut attendre les résultats définitifs de ces élections, mais les électeurs ont d'ores et déjà sonné le glas des islamistes. Les élections libyennes resteront ainsi le fait marquant des Printemps arabes, qui aura démenti toutes les prévisions, notamment celles des grandes capitales occidentales accordant très peu de crédit aux votes non islamistes. Une sorte de fatalité qui n'est pas sans susciter des interrogations sur la notion de vote en terre d'islam. Comme en Tunisie puis en Egypte voisines, et au Maroc, les élections libyennes auraient dû, selon ces sirènes, porter les islamistes au pouvoir. En attendant des analyses sur l'échec des islamistes en Libye, une société pourtant fortement marquée par le tribalisme et le conservatisme, cette issue est de nature à encourager les électeurs arabes qui ne croient plus au miracle islamiste et qui sont nombreux. En Egypte, à regarder de près, le frère musulman, Morsi, qui a ouvert l'étape de l'Egypte post-Moubarak, n'a gagné qu'avec un million de voix supplémentaires. Pourtant, l'Egypte est le berceau des Frères musulmans et la confrérie d'Al-Banna est sur le terrain depuis 1928. Si ces résultats se confirmaient, la Libye ferait exception par rapport à ses voisins tunisiens et égyptiens. Des élections également tenues au Maroc où le roi Mohammed VI avait engagé des réformes pour contenir les révoltes en gestation et qui ont été remportées haut la main par les islamistes modérés. La Libye rejoint ainsi l'Algérie où les législatives ont été décevantes pour la démocratie sans pour autant donner une victoire aux islamistes. Les Algériens sont certes en attente d'élections crédibles mais ils ont signifié en avril dernier ne plus vouloir de tasse islamiste. À retenir que malgré des violences et des actes de sabotage de militants autonomistes dans l'Est, où des bureaux de vote sont restés fermés en raison de l'insécurité, les Libyens ont réussi leurs premières élections libres dans une ambiance festive, après quarante années de dictature sous le régime de Kadhafi. Un taux de participation de 60% et, cerise sur le gâteau, les citoyens de la Libye post-Kadhafi ont repoussé les islamistes par voie électorale. Pour l'histoire, face au danger islamiste, et donc par prudence, les autres formations libyennes avaient exigé et obtenu du CNT d'ôter à la prochaine assemblée l'une de ses principales prérogatives, celle de désigner les membres du comité chargé de rédiger la future Constitution. La composition de ce comité devrait faire l'objet d'un nouveau scrutin, et chacune des trois régions de la Libye y enverra 20 membres. D B