Si Tizi Ouzou est considérée comme l'une des wilayas les moins sécurisées ces derniers temps, sa partie sud est certainement la plus vulnérable sur le plan sécuritaire. En plus des actions terroristes, c'est le grand banditisme et la petite délinquance qui sévissent partout. Cela se répercute aussi bien sur la vie et le quotidien des citoyens que sur le développement économique de la région. Les habitants des daïras de Mâatkas, Ouadhia, Boghni, Draâ El-Mizan et Tizi Ghennif redoutent encore un été chaud et s'estiment de plus en plus délaissés par l'Etat. Ces derniers temps, de nombreux vols, des agressions et d'autres actes de banditisme sont fréquemment signalés dans plusieurs localités du sud de la wilaya de Tizi Ouzou. Les habitants des villes et des villages de cette vaste région montagneuse souffrent chaque jour de ce phénomène inquiétant apparu ces dernières décennies et qui prend de l'ampleur au fil des années. “Notre région est complètement livrée à elle-même. La situation s'aggrave et dure depuis longtemps, et l'Etat est quasi absent. Nous sommes livrés à nous-mêmes", nous confie un quinquagénaire d'un village de haute montagne. Il faut mentionner que des localités classées chefs-lieux de commune ne sont pas dotées de structures de sécurité, et le terrain est malheureusement occupé par les délinquants de tout bord qui font leur “beurre" dans le commerce illicite de débits de boissons alcoolisées clandestins et du cartel de la drogue. Outre les affres du terrorisme avec tout ce qu'il comporte comme attentats, embuscades et kidnappings, les vols de voitures, les cambriolages des maisons, les agressions, les meurtres, les faux barrages et le racket sont devenus monnaie courante et viennent polluer l'univers de ces contrées de plus en plus saisies d'angoisse et d'une grande inquiétude. Ces mêmes localités étaient pourtant réputées jadis pour être des havres de paix. À titre d'exemple, pas moins de quatre vols de voitures ont été enregistrés en l'espace d'un plus d'un mois dans un espace géographique relativement restreint, et le dernier en date a visé un modeste enseignant, habitant tout près du chef-lieu de la commune de Mâatkas et qui a vu sa voiture subtilisée près de son domicile. Quelque temps après, ce sont deux autres citoyens qui ont été délestés de leurs véhicules, respectivement à Betrouna, dans la banlieue sud de Tizi Ouzou puis à Fekrane, à quelques encablures du chef-lieu de la commune de Souk El-Tenine. Les exemples sont légion et touchent la quasi-totalité des contrées du sud de la wilaya, à l'instar d'Aït Abdelmoumen, Boghni, Draâ El-Mizan, Béni Douala, Béni Zmenzer, Tirmitine, et se répètent à une cadence effrayante. La prolifération des vols de véhicules laisse supposer qu'il s'agit d'une bande spécialisée dans le vol et le trafic de voitures. Ces dernières seraient vendues par la suite et démontées par des tôliers pour être écoulées en pièces détachées. Les citoyens tirent la sonnette d'alarme ! À Béni Zmenzer, la population et les administrations publiques ont organisé la semaine passée une grève générale pour protester et exprimer leur ras-le-bol contre le climat d'insécurité qui gangrène leur commune. L'action a été décidée suite au meurtre d'un homme de 45 ans, poignardé dans le dos en plein chef-lieu communal, à Alma. Dans cet endroit, il y a plusieurs lieux de débauche et bars clandestins qui attirent toutes sortes d'ennuis pour les riverains. “Alma est devenu invivable, surtout la nuit, quand le village devient le point de chute de tous genres de malfrats venus des régions avoisinantes et même lointaines." “Avec cette grève, nous lançons un énième appel aux autorités de wilaya, mais je doute fort que les responsables soient sensibles à notre cri d'alarme. Autrement, l'Etat l'aurait fait depuis longtemps. Veut-on laisser la situation pourrir de manière délibérée ?", nous dira un citoyen rencontré sur place. Effectivement, tous les témoignages recueillis vont dans ce sens de l'absence et la sourde oreille des autorités “pourtant garantes de la sécurité et des biens des citoyens", soutient-on en chœur dans la région. “Que de pétitions signées, que de rencontres organisées avec les plus hautes autorités de la wilaya, que de rapports et réclamations faites à tous les niveaux de la hiérarchie des structures censées être en charge du domaine, mais en vain", nous apprend-on à chaque fois. Les autorités locales et les comités de villages ont beau conjuguer leurs efforts pour arracher l'implantation d'une structure de sécurité, sans succès, car les rues de la localité sont livrées à des bandes d'énergumènes qui sèment la terreur et le doute. Les kidnappings se multiplient À Souk El-Tenine, même son de cloche. Une pétition signée par l'ensemble des comités de village et soutenue par les élus locaux n'a rien donné, car la situation empire avec son lot de désagréments pour la population locale, notamment celle du chef-lieu communal. C'est au niveau de cette commune aussi que le dernier kidnapping, le 67e du genre, a été enregistré dans la wilaya. Il a visé un jeune entrepreneur, libéré une semaine après, suite à la pression de la population qui, à travers des actions fortes, avait exigé sa remise en liberté. C'est dire que du côté des citoyens, la mobilisation est spontanée et massive quand la situation l'exige. “Tous ces vols, ces cambriolages, ces agressions enregistrés à travers le sud de la wilaya de Tizi Ouzou sont encouragés par la passivité et l'impunité", soutient un élu de la daïra de Mâatkas en proie à ce phénomène d'insécurité qui handicape l'économie et le développement de la région. La presque totalité des chefs-lieux de daïra et de commune est devenue presque infréquentable, surtout à la tombée de la nuit. Parmi ces localités, certaines sont pourtant dotées de sièges de sûreté de daïra. Le plus angoissant et le plus intrigant est que les citoyens se sentent de plus en plus délaissés et pas du tout protégés par les services de sécurité. Cette situation vécue dans cette partie de la wilaya accentue le marasme de ses populations déjà suffisamment meurtries par le manque d'égards des pouvoirs publics dans tous les domaines. Les citoyens tirent la sonnette d'alarme pour exiger de l'Etat de nettoyer toute la région des virus et des rapaces qui y pullulent. B. R.