La décision du président égyptien Mohamed Morsi d'écarter les militaires du pouvoir a fait la une de la presse mondiale. Le journal britannique The Telegraph, qui a repris l'information dans le détail en citant les changements opérés par le chef d'Etat islamiste, a souligné que les mesures surprises marquent “un nouveau tournant dans la relation difficile entre Morsi et l'armée, au-delà du fait qu'elles présentent un test pour l'équilibre du pouvoir entre le premier président civil de l'histoire de l'Egypte et un militaire qui avait entrepris de limiter son pouvoir", à travers la déclaration du 17 juin que Morsi a également annulée. Le journal reprend l'argumentaire du président égyptien selon lequel les décisions prises s'inscrivent dans la préservation de “l'intérêt de la nation" et que l'armée doit désormais s'occuper de ses missions constitutionnelles, à savoir la défense et la sauvegarde du pays. Le journal s'interroge, par ailleurs, sur les prochaines décisions que pourrait prendre Morsi, notamment dans le secteur de la justice. De son côté, le New York Times, qui titre “Les chefs militaires out", estime que l'attentat du Sinaï a donné de bons arguments au nouveau locataire du palais présidentiel du Caire qui avait entamé la purge dans les rangs de l'armée par l'éviction du patron du renseignement. En renforçant ses pouvoirs, le chef de l'Etat égyptien a “cimenté un changement majeur dans la puissance qui a commencé avec son élection en dépit de l'opposition intense de l'armée". Pour le quotidien New Yorkais, “Morsi a reçu une impulsion décisive ce mois-ci après la mort de 16 soldats égyptiens tués dans le nord du Sinaï, une situation qui a profondément embarrassé les généraux et qui les a affaiblis politiquement". Cependant, le journal s'interroge si “les généraux accepteraient les dernières mesures de M. Morsi, même si un haut responsable militaire avait indiqué, dimanche, que le remaniement a été fait en “consultation" entre M. Morsi et l'armée et qu'une entente a été trouvée avec les jeunes officiers". Le Washington Post a qualifié les décisions de Morsi de “geste audacieux pour arracher le pouvoir des forces armées et marginaliser les anciens du règne de président déchu, Hosni Moubarak". Et d'ajouter que si “les chefs militaires ont été évincés tranquillement, les analystes estiment que cette décision pourrait déclencher une réaction et polariser l'attention sur un pays dont beaucoup de monde se méfie des intentions du président". Le Washington Post estime que “Tantaoui était un interlocuteur de longue date des Etats-Unis et que l'Egypte a reçu des dizaines de milliards de dollars d'aide militaire en échange du maintien de la paix avec Israël. Les mesures portant sur son éviction ont pris de court les USA. Panetta a visité l'Egypte il y a deux semaines et semblait repartir avec le point de vue que Tantaoui et Morsi coopéraient normalement". “De mon point de vue, sur la base de ce que j'ai vu, le président Morsi et le maréchal Tantaoui ont une très bonne relation et travaillent ensemble pour les mêmes objectifs", avait déclaré Panetta. Pour le Los Angeles Times, la purge des militaires a commencé. Le journal qui s'oppose aux mesures radicales prises par l'islamiste Morsi craint l'émergence d'un islam politique en Egypte dont les conséquences toucheront sa politique étrangères. “L'armée n'a pas de commentaires sur un remaniement de Morsi. Il y avait des questions, dont celle de savoir si le président avait le pouvoir de passer outre la déclaration constitutionnelle, qui a été essentiellement soutenue par le plus haut tribunal du pays. L'avenir du Parlement n'étant pas clair et le pays manque toujours d'une constitution qui énonce les pouvoirs du gouvernement", écrit le Los Angeles Times, qui souligne que, malgré cette purge, le poids de l'armée reste important vu les défis sécuritaires qui attendent l'Egypte. La presse française est également revenue sur l'événement. Pour Libération, “le président égyptien a pris tout le monde de court". Depuis son investiture, le 30 juin, Mohamed Morsi a alterné compromis et bras de fer avec l'armée pour tenter de s'imposer. Mais le signe le plus inquiétant pour Libération, “c'est l'interdiction faite à deux journalistes égyptiens de quitter le pays". Le quotidien Le Monde, qui titre “Le président égyptien frappe l'armée à la tête", considère que le “président Morsi a fait preuve, dans cette manœuvre périlleuse, d'un doigté et d'un sens audacieux du timing". Mais, en même temps, estime Le Monde, “il est difficile d'imaginer que cette série d'initiatives ait été décidée sans l'assentiment de hauts responsables militaires". Cette série de nominations fait toutefois craindre la mise en place accélérée d'un “Etat frériste".