L'ex-Chef du gouvernement en appelle à la contribution de l'armée, des partis politiques, des autres candidats à la magistrature suprême, ainsi qu'à la société civile pour assurer la transition démocratique. Selon Ahmed Benbitour, ex-Chef du gouvernement et candidat à la prochaine présidentielle, la transition démocratique qui doit découler de ce scrutin suppose un partenariat politique tangible dont la réussite à moyen terme dépend du strict respect de certaines règles d'éthique et d'engagements. Dans un “Manifeste pour l'Algérie” rendu public, hier, l'ancien Premier ministre fait l'énoncé de ces résolutions en préconisant la ligne de conduite suivante : “Ne plus jamais conduire à un monopole du pouvoir par des groupes immoraux et/ou incompétents, ni au détournement de l'Etat au profit d'intérêts privés. Privilégier les règles de l'élection sur celles de la cooptation et de la fraude, pour éviter de faire de la loyauté envers les tenants du pouvoir la seule source de promotion au détriment de la compétence. Ecarter les dangers des solidarités claniques, corporatives ou tribales. Mettre en place les mécanismes de l'alternance au pouvoir par le renforcement du rôle des partis politiques et ainsi donner à la démocratie les moyens de réussite…” Se défendant de faire ici la promotion d'un programme politique, Benbitour présente son manifeste comme “une vision”, “un projet” pour une Algérie du XXIe siècle, en somme, une proposition de sortie de crise qui tient compte de la participation de tous les acteurs politiques et de la société civile. D'après lui, c'est l'occasion, ou jamais de sauver le pays et d'en finir avec un pouvoir monolithique, affermi après l'investiture du président Abdelaziz Bouteflika en 1999. Poussé à la démission par ce dernier, Benbitour est acerbe. Il a connu le système de l'intérieur et prévient contre toute velléité visant à le faire perdurer. “L'Algérie effritée et paralysée ne pourra plus supporter cinq longues années encore, après l'enterrement de la presse indépendante et les partis d'opposition sous l'imposture, l'inaptitude, l'injustice et l'irresponsabilité d'un monarque absolu”, estime l'ex-Chef du gouvernement. À cet égard, la création d'“un front patriotique unifié pour une véritable transition démocratique” est, à ses yeux, fondamentale, car, écrit-il, “le pays est réellement en danger”. Benbitour associe quatre partenaires à son initiative. D'abord, les partis politiques qu'il invite à “une concertation partagée”, ensuite l'armée. Gratifiant la grande muette de nombreux qualificatifs comme “le centre de décision”, “le groupe d'influence” ou “le laboratoire des grands choix”, le candidat à la présidentielle est forcé de constater que l'institution militaire a son mot à dire. Cependant, il en appelle à sa clairvoyance pour éviter de nouveaux échecs. “Sa mission, de notre point de vue dans cette phase cruciale, n'est ni de reproduire le passé et consacrer le statu quo, ni d'observer le silence en signe d'une neutralité politique, mais plutôt de démilitariser les esprits et de contribuer avec d'autres acteurs politiques, économiques, intellectuels ainsi que les médias, à un engagement irréversible du pays dans une transition démocratique, qui, à chaque avancée de la société civile, permettra à l'institution militaire de réoccuper ses espaces naturels et constitutionnels”, suggère Benbitour. À l'adresse de la société civile, son appel traduit la déception. D'après lui, les différents acteurs sociaux doivent se débarrasser d'une certaine “culture victimaire” en faisant de la critique un pas sur la voie d'une plus grande responsabilisation. “Le temps est venu pour que cette société civile s'organise, se définisse une place et des tâches permanentes et devienne une source de visions et de programmes alternatifs”, stipule le manifeste. De même, le document préconise un engagement franc des postulants au scrutin présidentiel. “Que tous les candidats à programme dépassent leur “moi” et travaillent ensemble.” Le rendez-vous électoral du printemps prochain doit, selon Benbitour, “éviter le clonage politique et la reproduction du statut quo”. Dans le temps, l'ancien Premier ministre inscrit la rupture dans une double phase. La première d'une année (2004-2005) sera consacrée à l'assise des bases de bonne gouvernance pour l'endiguement des différentes crises. La seconde (2005-2009) verra “l'achèvement des transitions” S. L.