Le magistrat a jugé utile de consacrer à cette affaire très complexe une audience spéciale et a proposé de ce fait deux dates à la défense : les 11 ou 18 octobre. Après une brève concertation, les avocats ont opté pour le 18 octobre prochain. Me Khaled Bourayou a été le seul à prendre la parole pour réitérer la demande incessante du collectif d'avocats de convoquer en tant que témoin Fermine Dominique, l'employé de la banque Natixis basée au Luxembourg. “Je pense que pour la tenue d'un procès équitable et juste, il faut que la justice convoque Fermine, car on s'est basé sur ses déclarations pour inculper Chani. Le banquier en question a fait une déclaration pour dire que Boukhari et Chani ne se connaissent pas. Or toute l'accusation a été basée sur ce lien", nous déclare Me Bourayou à sa sortie d'audience. Il faut savoir que cette affaire a éclaté à l'occasion de l'instruction entamée dans le cadre du dossier de l'autoroute Est-Ouest, suite à une commission rogatoire internationale ayant conduit le juge d'instruction de la 9e chambre près du pôle judiciaire de Sidi-M'hamed au Luxembourg. Selon le dossier judiciaire, Mohamed Boukhari, ancien cadre dirigeant d'Algérie Télécom, et l'homme d'affaires Chani Majdoub auraient perçu des pots-de-vin pour avoir facilité la conclusion de transactions douteuses (en matière de télécommunications et d'Internet) entre Algérie Télécom et les deux sociétés chinoises ZTE Algérie et Huawei Algérie. Plus précisément, les sociétés chinoises sus-citées auraient versé en contrepartie de ces transactions avec Algérie Télécom des “commissions" au profit de deux sociétés de consulting appartenant à Boukhari et Chani dans des comptes “offshore" ouverts au Luxembourg. La défense pense qu'il est préjudiciable de plaider cette affaire, sans la présence de témoins-clés, car c'est sur la base de leurs déclarations que les deux accusés ont été inculpés. Les avocats ont, à plusieurs reprises, demandé au magistrat de reproduire tous les documents afin de les discuter en audience. Ils insistent surtout sur le procès-verbal de l'audition de Fermine Dominique par la Police judiciaire luxembourgeoise en octobre 2011 dans lequel il raconte ses différentes rencontres avec Boukhari et le comment de l'ouverture des comptes offshore. Dans ce même procès-verbal d'audition, Fermine déclare, selon la défense, que “Chani ne connaissait pas Boukhari". L'avocat français de Chani, un pénaliste spécialiste du délit économique qui était présent, hier, pour la première fois parmi le collectif de la défense estime, lui aussi, que dans ce dossier “il y a un très grand absent, c'est la banque Natixis". “L'argent n'a pas d'odeur ? On connaît la cupidité des banques. Dans cette affaire, cette banque a failli à toutes ses obligations. Ce n'est pas Chani qui doit être dans le box. On ne peut pas baser toute l'inculpation sur de simples dépositions." Chani et Boukhari ont été condamnés en première instance à 18 ans de prison et à s'acquitter d'une amende de 5 millions de dinars chacun pour corruption au détriment d'Algérie Télécom. Le tribunal de Sidi-M'hamed avait également décidé de saisir les biens de Mohamed Boukhari au Luxembourg, ainsi que ses comptes bancaires. Trois cadres des sociétés chinoises ZTE-Algérie et Huawei-Algérie avaient été également condamnés à dix ans de prison ferme par défaut pour “trafic d'influence". Des mandats d'arrêt internationaux ont été lancés contre eux. N H