Une distribution bien imparfaite des crédits La journée organisée par le FCE, dimanche dernier, sur la relation banques-entreprises a permis de situer les progrès du système bancaire national, mais également de cerner les contraintes à l'accès au crédit. Le constat reste amer : les opérateurs de la sphère productive se plaignent toujours des difficultés d'accès aux financements pour leurs projets d'investissement. Les banques publiques ou privées accordent peu ou pas de crédits aux investisseurs locaux, au nom des règles prudentielles pour les uns, et la pénalisation des actes de gestion pour les autres. L'orientation des crédits, comme cela a été souligné lors de la rencontre, s'effectue au profit des circuits de l'importation. Au point de faire dire à un spécialiste : beaucoup de banques sont polluées par le commerce extérieur. Quant aux ménages, ils souffrent également de difficultés d'accès au crédit. En fait, la faute n'incombe ni aux banquiers ni aux opérateurs, mais à l'Etat. Telle est l'une des conclusions de la journée. Le système bancaire national pèche par une organisation où les banques publiques prédominantes sur le marché, sous tutelle, obéissent à des injonctions non écrites. Ce qui parasite la distribution des crédits au détriment des véritables porteurs de projets. Une caractéristique du système rentier qui est à l'origine, entre autres, de la marginalisation de la sphère productive, au profit de pseudos entrepreneurs et de barons de l'import-import. Les banques privées, elles, se sont adaptées à un environnement guère favorable aux producteurs. Il suffit que l'Etat émette des signaux favorables, en décidant une série d'avantages au profit des industriels, par exemple, pour que se libère le crédit en faveur des investisseurs. Par ailleurs, le poids de l'informel constitue l'autre frein sérieux à la réindustrialisation du pays, sans laquelle on ne peut parier un centime sur l'avenir économique de l'Algérie et le bien-être des générations futures. Pis, à court terme, l'argent qui circule dans la sphère informelle, estimé à 35 milliards de dollars, représente une menace pour la stabilité du pays. Blanchiment d'argent, corruption, transfert illicite de devises, contrebande sont autant de phénomènes qui gangrènent l'économie nationale. Le pouvoir, qui risque de conquérir ces clans détenteurs de masses d'argent sale, pourrait alors mettre à genoux le pays et en finir avec la paix sociale. Il est temps pour que les pouvoirs publics réagissent. L'appareil bancaire national devrait s'ouvrir à d'autres établissements publics ou privés, adopter un autre mode de gouvernance sous l'action régulatrice de l'Etat, en vue de faciliter l'acte d'investissement. Cette situation appelle également à une diversification des sources de financement hors circuit bancaire, à la création de banques d'investissement, à la dépénalisation de l'acte de gestion, à l'ouverture de bureaux de change ainsi qu'à un mécanisme de couverture des risques de change, notamment par la vente de devises à terme ou par anticipation. K. R.