Résumé : Hadja Taos a vu ses enfants grandir trop vite à son goût. Hanane s'est mariée et vit en France. Abdelkarim a fait sa vie à Alger. Abdenour est resté avec elle. Ses petits-fils, tous adultes, sont jaloux de leur cadette qui vient de décrocher le bac. En plus d'être intelligente, elle est très belle. Trop belle à leur goût ... Si la fête a pu réunir toute la famille et leurs amis dans la joie et la bonne humeur, les seuls à garder une mine renfrognée sont les frères de Lynda. Ils n'apprécient pas le succès de leur sœur à sa juste valeur. Au lieu d'en être fiers, ils en sont malades comme jamais ils ne l'ont été de toute leur vie. Hadja Taos en est peinée même si toutefois elle ne leur a fait aucune remarque. Elle craint de provoquer une querelle et qu'ils ne se donnent en spectacle devant tous. Non, elle s'efforcera de garder pour plus tard les reproches qu'elle a envie de leur crier. Elle comprend qu'ils aient peur pour elle et de la voir tomber dans les pièges de la vie. Elle est même d'accord, avec eux, sur ce point. Cependant, elle trouve qu'ils en font trop. Ils ne partagent pas la joie de leur sœur. Tous sont venus la féliciter. Les plus jeunes, tous ceux et celles qui ont été au lycée avec elle, dansent sur des airs à la mode. Lynda rayonne de joie parmi eux. La grand-mère la trouve belle dans sa robe rouge fendue sur les côtés. De taille moyenne, presque mince, avec des rondeurs juste là où il faut, elle doit en faire rêver plus d'un. Ici, tous, par respect, ne la draguent pas mais qu'en sera-t-il lorsqu'elle sera loin d'eux ? A la fac, ils seront nombreux à lui tourner autour et à tenter leur chance. Si elle ne garde pas la tête froide, elle tombera vite dans le piège. Elle délaissera les études et qui sait comment se passeront les choses. Hadja Taos a décidé de la mettre en garde. Elle prie du fond du cœur pour qu'elle ne les déçoive jamais. Aussi, pendant que tous s'amusent, chantent et dansent, elle en profite pour appeler son fils Abdelkrim et sa belle-fille Fella. A eux aussi, le succès de Lynda ne leur a pas échappé. Ils partagent sa joie. Ils le trouvent normal. C'est une jeune fille, pleine de vie et qui a tout pour plaire. Hadja Taos ne le sait que trop. Seulement, si elle tient à profiter du bruit pour discuter tranquillement avec eux, c'est pour leur demander une faveur. - Est-ce que Lynda pourra vivre chez vous au lieu d'être à la cité de jeunes filles ?leur demande-t-elle. Je me ferais moins de soucis en la sachant chez vous, insiste-t-elle. Je ne vous ai jamais rien demandé ces vingt dernières années ... Si maintenant je le fais, c'est parce que vous êtes sa famille ... Il n'y a que vous qui puissiez prendre soin d'elle ! - Tu te fais du souci pour rien, la rassure son fils. Elles sont nombreuses à vivre à la cité ! Mais si cela peut te tranquilliser, elle est la bienvenue ! - Jure-moi de garder un œil sur elle, insiste-t-elle. L'inquiétude des garçons m'a gagnée, remarque-t-elle tout en regardant vers sa petite-fille. J'espère que je me trompe ! - Vraiment tu te fais du souci pour rien ! lui dit sa belle-fille. Tu ne devrais pas !lui reproche-t-elle. Comme tu viens de le dire, nous sommes sa famille, elle restera chez nous ! Hadja Taos les remercie et les embrasse avant d'aller vers d'autres invités, pour savoir comment ils trouvent la fête. - On est heureux pour elle ! Elle mérite de réussir, lui dit-on à plusieurs reprises. Elle est unique en tout ! Elle ne le sait que trop. La fête dure jusqu'au milieu de la nuit. Elle a beau être fatiguée et avoir mal à la tête, elle reste, attendant que tous les invités soient partis, pour se retirer dans sa chambre. Comme d'habitude, sa famille l'y rejoint. Lynda ne tient toujours pas en place. Elle apporte les cadeaux qu'on lui a offerts, pour les montrer. Ses frères qui viennent d'entrer échangent un regard, en la trouvant et sortent. Ses fils ne tardent pas. Ils semblent n'avoir rien remarqué. Une fois seule avec sa petite fille, Hadja Taos lui confie ses peurs. - Tu es jeune et belle ... Les compliments des étudiants risquent de te faire tourner la tête ! Je le comprendrais ... Seulement, tes frères ne te le pardonneront pas ... Il faut que tu te mettes en tête qu'à la moindre erreur, tu payeras le prix fort ! Lynda en rit. Elle ne semble pas avoir pris conscience du danger qu'elle courait si par malheur elle fait le moindre faux pas ! _Ils se sentent diminués, lui répond-elle. Comment pourraient-ils digérer ma réussite alors ils ne me pardonnent pas d'avoir réussi là où ils ont échoué ! Tu comprends, moi, j'ai vu clair en eux ! Dommage pour eux, ils auraient pu s'amuser ! Cela ne leur aurait pas fait de mal de rire un peu ! _ Et moi, je te préviens que tu risques gros si tu fais la moindre erreur, l'avertit-elle. M'as-tu seulement écoutée ? Lynda hausse une épaule indifférente. Elle met sa grand-mère en colère, ne semblant pas comprendre pourquoi ces avertissements, maintenant. Où est le danger ? (À suivre) A. K.