Saïd Bouteflika, le frère conseiller du chef de l'Etat, n'a pas usurpé le sobriquet de “Président bis”, dont l'affublent les fonctionnaires de la présidence de la République. Au palais d'El-Mouradia, où il fait la pluie et le beau temps, il est tout : directeur de cabinet, chef du protocole, chef de la sécurité, chargé de la communication, chargé de mission… Son pouvoir “illimité” a des ramifications en dehors même de la présidence. À tel point qu'il est devenu un personnage incontournable par lequel il faut transiter pour qui veut prendre attache avec la première institution de la république. Frère cadet du président, cet ingénieur en électronique, détenteur d'un doctorat en informatique est né au Maroc en 1949. Il se mêle de tout ce qui a trait aux affaires de l'Etat. Il nomme et dégomme les ministres, exerce des pressions sur les commis de l'Etat, donne des instructions aux walis, distribue l'argent à ceux qui prêtent allégeance à son frère… Pourtant, cet ancien membre du Conseil national de l'enseignement supérieur (Cnes) à la section de Bab Ezzouar, où il est chargé de cours d'informatique, n'a pas la qualification ni un quelconque parcours militant pour prétendre exercer une fonction d'envergure, disent de lui ses collègues de l'université. Vu la nature très soupçonneuse du président Bouteflika, Saïd, la seule personne en qui il a confiance, s'est imposé comme un homme incontournable. C'est en 1999, lors de la campagne pour la présidentielle que ce natif d'Oujda est sorti de l'anonymat. À cette époque, il adoptait un profil bas face aux personnalités entourant son frère Président. Mais à mesure qu'il fréquentait le palais d'El-Mouradia, Saïd Bouteflika a su se rendre indispensable. Opérant dans l'ombre, il a su étendre son pouvoir grâce à un jeu de manœuvres et d'intrigues dans lequel il s'est révélé assez habile. Il ne fait rien dans la transparence. Les fonctionnaires de la présidence rapportent qu'en quatre ans d'exercice au palais, il n'a laissé aucune trace compromettante : il ne signe rien de son nom et donne toutes ses instructions soit directement soit par téléphone. Même quand il distribue de l'argent, Saïd le fait toujours en liquide. C'est du reste ce que rapportent des sources au niveau de plusieurs wilayas du pays visitées par le président de la République. En vue de mobiliser les foules pour accueillir le Président, Saïd Bouteflika “paie cash les gens”. Mais quand même il fait tout secrètement, certains de ses agissements finissent toujours par s'ébruiter. En témoignent les révélations faites au Soir d'Algérie par l'ancien ministre de la Défense, Khaled Nezzar, sur les entreprises séditieuses de Saïd. “Nous savions depuis plusieurs semaines que le “grand” stratège Saïd Bouteflika cherchait à déclencher des zizanies tribales dans les Aurès et des émeutes à Batna, afin de réduire la dimension d'Ali Benflis à un trublion régionaliste”, dévoile-t-il. N. M.