Résumé : Je tombe enfin sur une nurse assez fiable. Un soulagement pour moi, qui dois passer ma journée dehors. Je pourrais désormais donner libre cours à mes ambitions. Youcef est de mon avis. Un soir, il me parle d'un second enfant. Je sors alors de mes gonds. Non, pas maintenant. Je n'avais pas l'intention d'y penser avant cinq ou six ans. Youcef fait la moue : - Mehdi se sentira bien seul. -Non, je vais le mettre à la crèche dans une année. Il grandira avec des enfants de son âge. Il se racle la gorge : - Tu as tout planifié à ce que je vois. - Et alors ? - Je pensais que lorsqu'un couple est marié, il doit prendre des décisions en commun. - Qui a dit le contraire ? - Toi. - Hein ? - Oui, tu prends des décisions, et tu planifies l'avenir de notre famille, sans prendre en considération ni mes aspirations ni mon avis. Je sentis la moutarde me monter au nez : - Allons donc Youcef, que vas-tu chercher là ? Je suis une mère, et comme toute mère consciencieuse, je pense à l'avenir de ma famille. C'est pour cela d'ailleurs que je voulais espacer les naissances. - Tu vas aussi décider du nombre de nos enfants. Je hoche la tête : - Bien entendu. Je n'aimerais pas en avoir plus de deux. Mon travail et mes occupations quotidiennes et même nos moyens ne nous permettront pas d'aller plus loin. Youcef me regarde un moment en silence, puis lance : - Je vais peut-être te surprendre, mais j'espérais avoir bien plus d'enfants. - Non, deux suffiront largement. Pense un peu aussi au coût de la vie qui augmente de jour en jour. Il hausse les épaules : - Nous voici devant un dilemme. Je pensais qu'on avait des affinités dans tous les domaines et voilà que tu me surprends. Moi j'aime les enfants. - Moi aussi, figure-toi, mais tu vois bien que j'ai dû passer par le bistouri pour ma première expérience, et je n'aimerais pas la renouveler. - Hum, je te comprends fort bien, seulement tu n'es ni la première ni la dernière femme à accoucher par césarienne. - Tu ne m'apprends rien là-dessus. Vous les hommes êtes tous les mêmes. Vous êtes tous des égoïstes. Aucun d'entre vous ne pourra imaginer, ne serait-ce qu'une seconde, les aléas d'une grossesse et les douleurs d'un accouchement. Vous êtes les plus gâtés aussi, car vous recevez les bébés sur un plateau d'argent, et sans même sentir une égratignure. C'est pour cela que vous êtes arrogants à souhait et insouciants pour la plupart. Emportée par ma colère, je débitais n'importe quoi. Youcef m'interrompt d'une voix ferme : - Arrête ! - Hein? - Arrête de dire des sottises. Nous les hommes, n'avons pas eu non plus à choisir notre destinée, la nature nous a elle-même désignés pour jouer notre rôle tel qu'elle l'avait conçu pour nous. Je rends hommage à toutes les femmes, et à ma mère en premier, pour cette noble mission dont elles ont la tâche et... - Tu rends hommage aux femmes. Tous les hommes disent ça, pour se disculper. - Non, tu te goures, je ne me disculpe pas. Je n'ai pas à me disculper. Et de quoi donc veux-tu m'inculper ? - De tout, de ton ignorance envers moi, de ton insouciance. Tu ne t'occupes ni du bébé, ni des courses, ni de la maison. Tu es constamment à l'extérieur et, en plus, tu me fais une scène parce que je veux planifier les naissances. - Tu ne les planifies pas, tu veux les limiter. - Exact ! Et je ne vois pas où est le mal lorsqu'une femme active comme moi prend les devants pour tracer l'avenir de sa famille car elle n'aimerait pas se faire prendre les pattes dans les couches d'une demi-douzaine de bambinos. - Et si moi je veux une demi-douzaine de bambinos ? - Eh bien, tu ne les auras pas avec moi. - Très bien ! Rappelle-toi seulement ce que tu viens de dire. - Je me le rappellerais, ne t'inquiète dons pas, je n'ai pas encore l'Alzheimer. (À suivre) Y. H