Le film d'ouverture du Fica 2012, en compétition pour l'une des deux distinctions dans la catégorie Fictions (Grand prix ou Prix spécial du jury), très proche du documentaire, interroge le passé et dessine les contours du présent d'une Palestine meurtrie. Zehira Yahi, commissaire du Festival international du cinéma d'Alger, dédié au film engagé, a donné le coup d'envoi officiel, au nom de la ministre de la Culture, de la deuxième édition, jeudi soir à la salle Ibn Zeydoun (Riadh El-Feth). Elle a précisé, lors de son allocution, que la projection des films se fera en format DCP (Digital Camera Package), tout en rappelant que le festival investira, jusqu'au 13 décembre, trois salles : Ibn Zeydoun (fictions), Cinémathèque algérienne – Musée du cinéma – (documentaires) et le cercle Frantz-Fanon (rencontres avec les réalisateurs et deux tables rondes). Au total, treize longs métrages (dix fictions, dont huit en compétition, et treize documentaires) seront projetés durant ce festival qui mettra à l'honneur l'Algérie (célébration du cinquantenaire de l'indépendance) et la Palestine. Trois hommages seront également rendus, notamment au réseau Shashat de cinéastes palestiniennes, à Costa Gavras et à Madeleine Riffaud. La cérémonie d'ouverture, sobre et sans artifices, a également été marquée par la présentation des membres du commissariat du festival et du jury (les deux sections). Le jury de la section Fictions est présidé par Djamel-Eddine Merdaci et composé de Zoubeida Mameria, Abderezak Hallal, Arslane Lourari et Mario Serenellini. La section Documentaire est présidée par Kamel Dahane et composée de Boualem Aïssaoui, Nadia Cherabi, Mina Kassar et Abdenour Zahzah. Avant la projection de son long métrage, “Zindeeq" (hérétique), Michel Khleifi a expliqué à l'assistance que son film “interroge le cinéma du réel et la Palestine d'aujourd'hui. C'est un questionnement sur le conflit israélo-palestinien et la société palestinienne à travers une histoire personnelle". Le réalisateur de “Noces en Galilée" et “le Cantique des Pierre" a également signalé que, pour lui, “l'engagement, c'est la dialectique entre l'individu et la société". Dans la fiction “Zindeeq", très proche du documentaire, Michel Khleifi interroge le passé et filme le présent d'une Palestine meurtrie. Le personnage central, qui n'a pas de nom (première violence dans le film), est un réalisateur, installé en Europe, qui retourne à An-Nasirah (Nazareth) pour y enterrer son oncle et pour tourner un film sur la naissance de l'Etat d'Israël. Son film interroge des Palestiniens sur les raisons qui les ont poussés à quitter la Palestine en 1948. à côté de la thématique centrale de son documentaire, le personnage pose des questions aux fantômes de ses souvenirs, ses parents, sur les raisons qui les ont poussés à rester. à la suite d'un autre événement familial dramatique, ce réalisateur passe la nuit à déambuler dans les rues désertes d'une ville presque fantomatique. Ce réalisateur, cet étranger dans sa propre ville, cet être perdu éprouvant un fort sentiment de dislocation, est confronté à la réalité de son pays qu'il a quitté depuis trop longtemps. Il s'interroge sur le passé, mais trouve en le présent, tout aussi dramatique, des suggestions et bribes de réponses à ses questionnements. La violence l'atteint mais il ne riposte pas, il l'assimile, il l'absorbe et s'en abreuve pour comprendre le drame de son pays, son drame à lui. La métaphore a été le lien dont a usé jusqu'à la corde Michel Khleifi, jusqu'à créer un certain malaise ou une distance entre le propos nettement politique, la démarche poétique et la description d'une société accablée et affligée. Michel Khleifi utilise également les images du film réalisé par son personnage (les témoignages), et les souvenirs de ce dernier (de femmes qu'il a connues et aimées furtivement), pour maintenir ce lien avec le passé et expliquer la complexité du personnage. “Zindeeq", un film presque sans dialogue, est complexe, mais ses lourdeurs, ses silences pesants ont presque annihilé tout son propos. Heureusement que la suggestion et la métaphore ont réussi à sauver le film, dont les contours ne se dessinent qu'aux dernières minutes. S K