Résumé : Hadja Taos a une conversation avec son fils. Elle a tenté de le raisonner mais il ne veut rien entendre. Lynda est punie pour son erreur. On lui interdit de sortir et de reprendre ses études. On ne veut plus parler d'elle. Hadja Taos est très peinée. Son petit-fils tente de la réconforter. - Laisse le temps chasser la tristesse de nos cœurs, dit Tewfik à sa grand-mère. - J'ai hâte de voir ce temps arriver, soupire-t-elle. S'il tarde, je crains de ne plus être de ce monde. - Cesse de parler de mort, grand-mère ! Tu me donnes la chair de poule, lui répond Tewfik en ne finissant pas le café qu'il s'est servi. Tu sais combien je t'aime et j'ai horreur que tu joues avec mes sentiments ! - Je n'en ai pas le cœur. Mais dis-moi, comment pourrais-je aspirer à vivre plus longtemps quand votre sœur est déjà enterrée alors qu'elle n'a pas vingt ans ? J'en ai le cœur brisé. - Qu'est-ce que tu veux grand-mère ? Qu'est-ce que tu veux que je fasse ? Hadja Taos lui demande de s'asseoir. Elle a l'intention de profiter de son inquiétude pour elle, pour faire pencher la balance en faveur de Lynda. Sans le soutien du reste de la famille, elle ne pourra rien pour elle. Elle prend la main de son petit-fils et la serre contre son cœur. Elle sait qu'il va l'écouter et même l'aider. Elle a conscience que ce ne sera pas facile mais s'il persiste et insiste, Abdenour finira par les écouter, d'ici quelque temps. - Je ne te demanderais pas l'impossible, lui dit-elle. Je voudrais que tu parles à ton père ! Lynda ne risque plus de faire les mêmes erreurs ! Il faut qu'elle termine ses études pour être indépendante financièrement, plus tard. Aujourd'hui, tu es jeune et célibataire mais dans quelques années, tu vas te marier et avoir une famille à ta charge. Imagine qu'elles ne s'entendent pas, il te faudra alors tout partager ! Ce sera invivable tandis que si elle travaille, tu n'auras que sa présence à supporter ! Est-ce que tu me comprends ? Je ne veux pas que vous ayez des problèmes, plus tard ! - Je ne te promets rien, répond son petit-fils. Mais je te promets que je lui parlerai. Dès que ces derniers sont partis à leur travail, Lynda peut enfin sortir de sa chambre. Elle a entendu sa mère l'appeler. - Viens prendre ton petit-déjeuner ! Lynda comme d'habitude, va au salon où elle passe un bon quart d'heure à discuter avec sa grand-mère. Celle-ci a tenu à la mettre au courant. - Il n'a pas dû sauter de joie, remarque-t-elle. Je ne le reconnais pas. Enfin, je croyais connaître papa. - Il est seulement en colère. Son orgueil en a pris un coup, répond Hadja Taos. Ce n'est pas facile pour lui. Il croit avoir pris la meilleure solution pour te mettre à l'abri des coups de la vie pour t'éviter de mettre les pieds là où il ne faut pas. - Je peux le comprendre, murmure la jeune fille. Mais il a juré, il ne me laissera pas mettre les pieds dehors. Même pas pour aller voir un médecin. En fait, elle a besoin de voir un psychologue. Elle ne dort plus beaucoup. Son sommeil est toujours troublé par des cauchemars. Heureusement pour elle, sa grand-mère dort avec elle. Elle est toujours là, pour la réveiller et la tirer des bras de son agresseur. Puis, elle lui parle à l'oreille, si doucement qu'elle finit par s'endormir, en paix, rassurée, se sachant en sécurité. - Mon ange gardien, dit-elle à sa grand-mère en la serrant dans ses bras, les larmes aux yeux. Tu te donnes tout ce mal pour moi. Que je serais-je devenue sans toi ? Lynda se rappelle sans joie le jour où elle est rentrée de la maternité. Sans la présence de sa grand-mère, elle ignore comment se serait passé son retour. Son père l'aurait certainement battue à mort tant la colère l'aveuglait. Même quand elle est dans sa chambre et qu'elle l'entend marcher dans le couloir, elle sent dans chaque pas qu'il fait sa colère et son envie de s'en défaire. Il ne veut plus la voir ni même l'entendre. Cela fait des semaines qu'elle surveille son départ et son retour du travail. Le vendredi, elle ne quitte pas sa chambre. Sa mère Ourida lui apporte son déjeuner. Elle sent combien cette journée pèse lourd sur les épaules de son père. Il sort parfois pendant une heure ou deux pour respirer tranquillement mais il rentre quand même, n'ayant pas où passer la journée. Il a besoin de se reposer. Lynda sait qu'il n'en peut plus. À ce rythme, tous deux feront une dépression. Elle voit bien que toute personne qui prononce son prénom rend son père nerveux. Si la discussion tarde, il laisse sa colère exploser. En l'entendant claquer les portes, ce matin, elle a deviné que sa grand-mère a encore osé lui parler d'elle. Sans joie, elle pense que cela doit gâcher toute la journée de son père, surtout si son frère prend la relève et tente de lui donner une autre chance. Lynda craint la réaction de son père car il ne tardera pas à rentrer et à crier ce qu'il a sur le cœur. Elle sait que ce soir, elle doit s'attendre à tout, à avoir une nouvelle chance ou à subir une nouvelle sentence. (À suivre) A. K.