Les campagnes électorales sont propices à la montée du sentiment antimusulman en France. C'est, en tout cas, ce que démontre le bilan annuel 2012 de l'Observatoire contre l'islamophobie publié hier par son président Abdallah Zekri. Selon cette instance mise en place par le Conseil français du culte musulman (CFCM), les actes antimusulmans ont baissé en novembre et décembre 2012 après une forte hausse en septembre et octobre de la même année, imputée à la campagne interne au parti de droite, UMP. Au total, 201 actes antimusulmans (53 actions et 148 menaces) ont été enregistrés en 2012 (155 en 2011), soit une hausse de 28%. Entre 2010 et 2011, la hausse était de 34%. En 2012, “ce sont les mois de septembre et octobre qui ont vu progresser les actions et menaces", a noté l'Observatoire contre l'islamophobie, son président Abdallah Zekri imputant cette hausse au “silence des hommes politiques et à la campagne interne à l'UMP" pour la conquête du poste de président du parti. “Lors de la campagne des élections internes de l'UMP, les musulmans étaient une cible idéale", a déploré le document de l'Observatoire. M. Zekri a déposé une plainte contre l'un des deux candidats, Jean-François Copé, pour ses propos sur les “pains au chocolat" tenus lors de cette campagne à Draguignan. Mais la plainte doit être retirée après un accord entre M. Copé et le Conseil français du culte musulman (CFCM). Pour autant, l'enquête peut se poursuivre si le parquet le souhaite. “La plainte contre M. Copé a donné à réfléchir aux hommes politiques car il n'est plus question pour nous d'accepter d'être insultés ou stigmatisés sans réagir", met en garde l'Observatoire. Les actes “antimusulmans" ont été de 35 en septembre et de 34 en octobre, avant de baisser à 15 en novembre et à 11 en décembre 2012. La campagne présidentielle avait aussi été suivie d'une baisse : les actes antimusulmans sont passés de 7 en février à 15, 17 et 18 en mai, avant de descendre à 5 en juin et à 8 en juillet puis de remonter à 18 en août 2012. Par région, l'Île-de-France, où vit la plus importante communauté musulmane de France, est celle qui a enregistré le plus grand nombre d'actes antimusulmans (28). Elle est suivie par Rhône-Alpes (18) et Midi-Pyrénées (16). À l'inverse, le Languedoc-Roussillon et l'Auvergne ont enregistré les chiffres les plus faibles avec respectivement deux et trois actes. Aucun n'a été enregistré dans l'Outre-mer, selon l'Observatoire. Cette instance se charge de collecter, enregistrer et analyser les témoignages de victimes et des témoins d'actes islamophobes ainsi que les documents, les discours politiques et les textes qui prônent ou encouragent la haine des musulmans de France ou de leur religion. “Chaque acte antimusulman, soigneusement répertorié dans notre base de données, est préalablement contrôlé et analysé. Le but est d'obtenir un maximum de renseignements afin de conseiller et d'accompagner au mieux les victimes et, le cas échéant, de prendre les dispositions qui s'imposent selon les circonstances. Face à un acte antimusulman, l'Observatoire national contre l'islamophobie s'efforce de déterminer, en concertation avec la ou les victimes, la solution la plus appropriée. À noter néanmoins que tous les actes antimusulmans ne sont pas portés à la connaissance de l'Observatoire national contre l'islamophobie, certaines personnes pouvant éprouver une appréhension à témoigner", explique l'Observatoire en présentant son bilan.“Les appels au passage à l'acte et autres mots propageant la haine de tous ceux qui se réclament de l'Islam aboutissent à un recours à la violence qui tend à se banaliser et à se multiplier, comme ce fut le cas lors de certaines affaires. Il s'agit d'actes d'une nature nouvelle auxquels sont confrontés les musulmans de France, parfois à titre individuel", déplore-t-il, dénonçant “un climat particulier où se mêlent allègrement la banalisation des propos racistes anti-Arabes, les invitations dans certains discours d'hommes politiques à s'en prendre aux musulmans sans distinction, l'inculture face aux questions de discrimination, la méconnaissance de faits historiques (participations de centaines de milliers de musulmans, venus essentiellement du Maghreb pour défendre et libérer la France durant les deux Guerres Mondiales passées 1914-1918 et 1939-1945) et une accoutumance à la violence des paroles et des actes". A. O