Le torchon brûle entre le ministre de l'Intérieur et les policiers. Ces derniers ont marché jeudi sur la place de la Kasbah, épicentre de la contestation à Tunis depuis de la chute de Ben Ali, pour protester contre toute instrumentalisation politique. “Sécurité républicaine, ni Ennahda (le parti islamiste au pouvoir) ni destouriens" en référence aux militants du Destour, le parti au pouvoir après l'indépendance, scandaient des agents des forces de l'ordre, rassemblés à l'appel des syndicats de forces sécuritaires intérieures (SFSI). “Nous voulons une loi fondamentale qui nous protège des hommes politiques", criaient-ils. La police, faut-il le rappeler, a réprimé dans le sang des manifestations lors du soulèvement populaire de décembre 2010/janvier 2011 ayant abouti à la chute de l'ancien président Zine El Abidine Ben Ali et sa fuite en Arabie saoudite. Quelque 338 Tunisiens ont été tués et 2 174 blessés durant ce soulèvement, les forces de l'ordre étant tenues responsables de 79% des décès, selon un bilan officiel. En revanche, la justice a condamné mardi deux officiers de police à 10 et 20 ans de prison pour la mort de cinq Tunisiens à Regueb (centre-ouest) lors du soulèvement. Fin avril, deux agents ont été condamnés à 20 ans de prison chacun pour la mort d'un jeune au sud, un jugement critiqué par les syndicats de la police qui avaient dénoncé des “condamnations sans preuve par la justice militaire dans des procès politiques et populistes". Ali Laârayedh, ministre de l'Intérieur, est sorti de son mutisme jeudi pour répondre longuement aux syndicats des forces de l'ordre qui ont appelé à sa démission lors d'une manifestation organisée samedi 26 janvier 2013 et l'accusant de vouloir “politiser l'institution policière". Le ministre a affirmé qu'ils sont “motivés par des considérations politiques et des agendas dictés par des parties étrangères". I. O.