Anniversaire - La Tunisie célèbre aujourd'hui les deux ans de la fuite du président Zine El Abidine Ben Ali, marquant le début, de ce qui est désigné comme : «le Printemps arabe». Mais l'euphorie du 14 janvier 2011 a laissé place aux tensions sociales et politiques, une menace jihadiste accrue et à une impasse sur la Constitution. Le chef de l'Etat tunisien Moncef Marzouki, le Premier ministre Hamadi Jebali et le président de la Constituante Mustapha Ben Jaafar se sont recueillis ce matin en présence d'une large partie de la classe politique place de la Kasbah, à quelques mètres du siège du gouvernement. Peu après, M. Jebali, le secrétaire général de l'Union générale tunisienne du travail, Houcine Abassi, et la chef du patronat tunisien, Wided Bouchamaoui, ont signé un «pacte social» à l'Assemblée nationale constituante (ANC). La signature de ce texte a une portée symbolique importante, misère et chômage étant les causes majeures de la révolution de l'hiver 2010 et 2011. Or depuis l'été 2012 les grèves, les manifestations et les heurts entre manifestants et policiers se sont multipliés. Dernier exemple en date, l'armée a été déployée, hier, à Ben Guerdane (sud) après une semaine d'affrontements entre manifestants et policiers. Durant cette même journée, à Sidi Bou Saïd, banlieue touristique de Tunis, quelque 150 habitants ont conspué le ministre de l'Intérieur, Ali Larayedh, figure du parti islamiste Ennahda, venu visiter un célèbre mausolée incendié la veille. «Dégage, Dégage» scandaient-ils. «C'est un acte criminel, mais ce n'est pas à la police de garder tous les mausolées, c'est aux gens en charge de ces mausolées de le faire», avait déclaré le ministre, déclenchant la colère de la foule. «Ce crime (...), contre notre culture et notre histoire ne doit pas rester impuni», a jugé toutefois la présidence tunisienne, dans un communiqué, appelant les forces de l'ordre à «n'épargner aucun effort pour arrêter les criminels». Le village de Sidi Bou Saïd, perché sur une colline dans la banlieue de Tunis, est un site touristique très prisé, connu pour ses petites ruelles et ses maisons traditionnelles aux portes bleues cloutées. De nombreux mausolées, dédiés à des saints musulmans, ont été incendiés ou saccagés ces derniers mois. Des actes attribués aux salafistes, mouvance rigoriste radicale de l'islam sunnite qui considère comme impie d'honorer des saints. A Tunis, l'ambiance était plus festive : des concerts et des expositions de rue ont animé tout le week-end l'avenue Habib Bourguiba, haut lieu du soulèvement de l'hiver 2010-2011. Détracteurs et partisans du pouvoir, islamistes et laïques, ont prévu de défiler demain sur cette artère, alors que des heurts les opposent régulièrement. «Dans quelques heures on saura si les Tunisiens dans leur diversité plurielle pourront cohabiter (...) c'est un véritable test de la pratique démocratique qui aura lieu aujourd'hui au cœur de la capitale», relèvait hier le journal Le Quotidien. Selon un responsable sécuritaire, les forces de l'ordre craignent aussi des actions d'un groupuscule islamiste armé, alors que la mouvance jihadiste a mené plusieurs attaques, certaines sanglantes, depuis la révolution.