Un manque flagrant de moyens, un réseau de distribution insignifiant, des cinéastes exilés, le cinéma algérien n'arrive pas à retrouver ses repaires. Peut-on alors parler de critique cinématographique en Algérie devant un constat aussi triste ? C'est en tout le thème du Forum culturel du quotidien El Moudjahid animé par Abdelkrim Tazaroute qui a réuni un trio de spécialistes comme Djamel-Eddine Merdaci, journaliste, écrivain, et scénariste, Abdelhakim Meziani, l'un des pionniers du ciné-club, journaliste et auteur, Nabil Hadji, journaliste et cinéaste, tous des critiques de cinéma. Ils ne feront pas dans la dentelle pour converger vers la léthargie dans laquelle est plongé le cinéma algérien depuis plus de deux décennies. Ils regrettent la belle époque des années 1970 où la critique allait bon train devant une production, nationale s'entend, dont on peut dire qu'elle nous manque cruellement aujourd'hui. Pour D. E. Merdaci, “le démantèlement a commencé avec le désengagement de l'Etat qui a vu alors le cinéma algérien frappé par une lame de fond", relayé par Abdelhakim Meziani qui s'en va dans un réquisitoire enflammé déplorer l'état des lieux loin d'être reluisant. Ce mordu du cinéma rappellera aux nostalgiques comme lui “l'engagement considérable qui caractérisait la critique cinéma durant la période faste, même si elle était liée à la pensée de l'époque et qu'elle n'accordait pas d'importance à la création artistique mais reflétait plutôt le rapport de force lié à l'engagement politique, néanmoins cette critique était différemment appréciée". Et si telles étaient les choses, que peut-on dire de l'Algérie de 2013, sinon qu'elle ne dispose pas d'une cinématographie, pas même d'une école. “Ceux qui ont jeté l'eau du bain avec le bébé se sont trompés", répondra M. Meziani avant d'ajouter que “l'histoire jugera un jour ces gens qui ont miné tout un cinéma, toute une dynamique". “Comment peut-on parler aujourd'hui de critique quand on sait qu'en 2012 deux films seulement sont sortis et trois avant-premières célébrées ?", soulève Nabil Hadji abordant le manque de manifestations cinématographiques, tout en faisant observer le peu d'intérêt accordé par la presse à ce volet qui ne trouve plus sa place parmi tant de rubriques. Du moins rarement. Revenant à la charge, D. E. Merdaci explique que “le critique cinéma est aujourd'hui devant la confluence distribution-exploitation, alors que le cinéma a parallèlement perdu son public. Les causes sont connues dont on peut citer la bêtise d'avoir fonctionnarisé les cinéastes". Peut-on donc, au vu de ce constat parler de relance du cinéma en Algérie ? Difficile de répondre. De l'avis général, le cinéma algérien est grabataire. La décennie noire a détruit autant de salles qu'elle a fait fuir d'artistes à l'étranger et terrorisé de spectateurs. Depuis, il a beaucoup de peine à se remettre sur pied et les beaux jours des années 60/70 ne sont que de bons souvenirs. Les jeunes créateurs nationaux trouvent énormément de difficultés à concrétiser leurs projets. Et d'ailleurs où les salles obscures ? Rien que pour ce motif, beaucoup de jeunes réalisateurs optent pour l'autre rive de la Méditerranée. Bien que disposant d'un institut de l'audiovisuel et d'un autre de la communication, l'Algérie contrairement à nos voisins, notamment le Maroc, ne possède pas d'école de cinéma. Pour la relance, il est, comme l'ont souligné les intervenants à ce forum, nécessaire de ramener le public dans les salles et assurer une bonne communication. Ceci en attendant que les salles de cinéma en projet soient prêtes et que les autres soient programmées pour le même but. Mais ce n'est pas demain la veille. A F