L'Algérie vient de découvrir qu'elle a des enfants et qu'il faut les protéger. Et comme toujours, quand l'Algérien découvre un nouveau phénomène, il le démultiplie à l'excès, jusqu'à saturation. Et si tout cela participe à entretenir la violence ? C'est un haut responsable de la DGSN qui est venu, fort justement, mettre un bémol à cette psychose réelle — ou entretenue — sur les kidnappings ou les homicides d'enfants. Il a replacé ces cas dans leur contexte et donné des chiffres assez hallucinants car erratiques : seulement 11 enfants kidnappés et tués ces dix dernières années ! Le chiffre paraît dérisoire face à la panique générale qui s'est emparée de la société algérienne après l'affaire de Constantine. Le directeur de la Police judiciaire est un sécuritaire qui connaît sans doute le poids des chiffres, et le plus étonnant est qu'il les eut énoncés face à des ONG et des associations de protection de l'enfance qui ont validé cette statistique et ont même fait leur mea-culpa ! Alors de deux choses l'une : soit l'Algérie est devenue un pays sans lois, sans raison, sans justice, où les enfants sont tués à tous les coins de rue, ou alors la peur du kidnapping hante tellement nos esprits, ces derniers jours, qu'on ne prête plus attention à la réalité des choses. Ceux qui avancent des chiffres catastrophiques sur les kidnappings (comme sur les suicides, la pédophilie, la drogue, la prostitution ou encore le logement ou le chômage au Sud ou ailleurs) sont confrontés à leurs propres limites et à leurs propres délires. Est-ce qu'on exagère les données réelles pour en faire un moyen de pression politicien ? La criminalité ambiante ne sert-elle pas à justifier les réactions démesurées et donc l'impunité ? La violence des chiffres donnés à l'emporte-pièce n'encourage-t-elle pas une contre-violence sociétale où les lois de la République sont mises de côté ? À force de “sur-réagir" dans la peur ou la panique, l'Etat entérine la colère paranoïaque de la société. Ces phénomènes criminels existent aussi sous d'autres cieux. Parfois dans des proportions bien plus dévastatrices qu'en Algérie. Les Algériens doivent également s'abstenir de mettre l'Etat partout. Devant leurs écoles, ou parce qu'ils n'ont pas un job, ou parce qu'il manque deux pièces au logement social que le gouvernement leur a gratuitement donné. Tout le monde est responsable de la situation. À commencer par certains parents qui ont fait le choix de laisser la rue éduquer leurs enfants à leur place. Car dans une Algérie où le terrorisme islamiste a tué des fœtus, carbonisé des bébés et égorgé des enfants, il serait malvenu de faire comme si ce phénomène de violence est surprenant.