Les premiers résultats de la commission chargée de la révision du code de la famille ne sont pas satisfaisants. À l'installation de la commission pluridisciplinaire, chargée de réfléchir sur la révision du code de la famille, le ministre de la Justice a insisté sur le caractère d'urgence de deux amendements : la suppression du tutorat matrimonial et l'octroi systématique du logement conjugal à l'épouse divorcée qui a la garde de ses enfants. Les conclusions préliminaires de la structure s'avèrent en deçà des attentes des femmes. Elles suscitent plutôt l'inquiétude, car les membres de la commission, composée pourtant majoritairement d'intellectuels, sans accointances apparentes avec les milieux islamistes, ont laissé en instance les articles injustes ou discriminatoires envers les femmes, pour ne prendre en charge que des dispositions accessoires. L'exemple de la présentation obligatoire d'un certificat médical avant la conclusion d'un mariage est assez édifiant. “Nous avons à l'esprit la problématique du sida. Nous pensons qu'exiger des tests de dépistage de HIV avant le mariage protégera les enfants à naître d'une éventuelle contamination, si l'un des parents est porteur du virus”, explique un membre de la commission, qui a requis l'anonymat par respect à l'obligation de réserve. Selon toute vraisemblance, la disposition envisagée a été inspirée par la campagne médiatique commandée par le président de la République, en décembre dernier, sur la sensibilisation des risques du sida. Sinon, comment expliquer la promptitude des membres de ladite commission à s'appesantir sur un problème qui ne saurait trouver sa solution dans une disposition contenue dans le code de la famille ? “Notre travail n'est pas terminé. C'est un premier résultat amené à être amélioré ou carrément modifié”, rassure un membre de la structure. Notre interlocutrice a affirmé que de simples suggestions sont émises. “Nous étudions les codes de statut personnel ou de la famille de tous les pays arabes, pour connaître l'interprétation qu'on donne à la charia”, nous dit-elle. La commission s'est scindée en quatre groupes de travail, appelés ateliers. “Nous ne nous sommes pas partagé des thèmes. Dans chaque groupe, qui se réunit en moyenne deux fois par semaine, nous discutons des articles équivoques du code de la famille. L'ensemble des membres de la commission se retrouve, à chaque fois que c'est nécessaire, pour examiner les propositions d'amendement”, nous explique-t-on. Des propositions conséquentes de modification du code de la famille seront bientôt rendues publiques, selon notre interlocutrice. “Aucun délaiI ne nous a été imparti, mais nous ne devons pas nous éterniser sur ce travail”, affirme-t-elle. À l'approche du scrutin présidentiel, la révision ou l'abrogation du code de la famille — c'est selon les sensibilités politiques — sera assurément au cœur des batailles électorales. Cette fois-ci, le chef de l'Etat, qui ambitionne de gagner un second mandat, se place en première ligne de ceux qui projettent d'utiliser ce dossier comme arme électorale. Ce qui explique, a priori, la célérité de la commission à communiquer ses premières conclusions, soit quelques semaines à peine après son installation. Il est naturel de se demander alors si les femmes gagneront quelques acquis de cette opération, qui ne semble pas du tout dénuée de calculs politiciens. D'autant que de nombreuses initiatives, entreprises dans un esprit aussi calculateur, n'ont jamais abouti. L'on se rappelle les ateliers de la femme, qui se sont échinés, en 1997, à mettre au point laborieusement 22 amendements. Plus de six ans après, le fruit du travail des associations féminines, parrainées par le gouvernement de l'époque, est jeté à la poubelle. On occulte le combat des associations de femmes qui a duré vingt ans, on fait l'impasse sur des initiatives des gouvernements précédents, dans une volonté de rendre le président de la République l'artisan de la révision du code de la famille, même si ladite révision ne répond pas réellement aux aspirations des femmes. S. H.