Son ombre planera encore sur les travaux du 5e congrès qui s'ouvre cet après-midi à Alger. “Mes convictions et ma ferveur sont toujours aussi vivaces qu'aux premières heures de mes soixante-dix ans de militantisme. Je dois ainsi vous dire que le moment est venu pour moi de passer le témoin et que je ne me présenterai pas à la présidence du parti pour le prochain exercice." En annonçant en décembre 2012 aux membres du conseil national du FFS sa décision de ne plus postuler à la présidence du Parti, Hocine Aït Ahmed venait sans doute, de l'avis de nombreux militants mais aussi des observateurs, de mettre un point d'honneur à une formidable vie militante, sans pareille parmi ses contemporains, exaltante et riche. Ce n'est pas sans raison que ses admirateurs et les militants du parti ont été unanimes ce jour-là pour proclamer à l'unisson : sa place est irremplaçable. Oui, on ne remplace pas aisément un des grands monuments de l'histoire du mouvement national, l'un des rares encore en vie, “le dernier des Mohicans", pour emprunter une expression d'un film. Hocine Aït Ahmed, natif d'Aïn El-Hammam, en Kabylie en 1926, n'est pas seulement un simple militant politique, c'est aussi un diplomate, un révolutionnaire et un intellectuel. C'est dans les rangs du Parti du peuple algérien (PPA) au début des années 1940, alors jeune lycéen, qu'il entame sa carrière militante. Très vite, il montre de grandes capacités d'organisation de la lutte armée. Désigné à la tête de l'Organisation secrète (OS), il se distingue par l'attaque de la poste d'Oran, un événement qu'il avouera “regretter" il y a quelques années. Victime de ce qui est communément appelé la crise berbériste, un épisode encore tabou à ce jour et dont les aspects sont méconnus du grand public, Aït Ahmed, recherché par les autorités coloniales, gagne Le Caire en 1952 d'où il entame le travail diplomatique au profit de la Révolution avec plusieurs succès à son actif. À l'Indépendance, après plusieurs péripéties, hostile à ceux qui ont confisqué la Révolution, il fonde le FFS, le premier parti d'opposition du pays. Depuis, il n'a pas cessé de militer en faveur de l'instauration de la démocratie dans son pays. Un objectif contrarié par le régime en 1992, mais qu'il entrevoit encore une fois à la faveur du Printemps arabe bien qu'il ne croie pas aux réformes du régime. “On en parle (réformes, ndlr) à chaque fois qu'on ne sait pas que faire, quand il y a eu de vraies réformes, ils ont fait une guerre pour les stopper. Je reste sceptique sur les capacités du régime à faire mieux que d'habitude", disait-il récemment. Selon lui, le problème est dans l'absence de volonté politique. “Il manque la volonté de faire les choses sérieusement. Il y a trop de mensonges, de dribbles, de jeux malsains. Ce pays croule sous les manigances et les coups tordus. Et au milieu de tout cela, une incroyable légèreté dans la gestion de cette colère qui gronde. On dirait que le pouvoir n'est même plus capable de prendre la mesure de tout ce qui a été gâché. Les vrais décideurs ont toujours imposé le savoir-faire de la police politique, sans oublier le rôle et la longue expérience de Bouteflika dans l'art de faire échec par la ruse et la violence à toute possibilité de démocratisation. Quand il n'y a plus de confiance, il faut d'abord restaurer la confiance. On n'imagine pas un dialogue sans ce préalable." Aït Ahmed, visionnaire ? Seulement un homme aux positions constantes et aux convictions chevillées. Et son ombre planera encore sur les travaux du 5e congrès qui s'ouvre cet après-midi à Alger. K K Nom Adresse email