50 ans après la création du FFS dont il a été l'inspirateur et un des membres fondateurs, Hocine Aït Ahmed quittera la présidence du parti à la faveur du 5e congrès qu'il a convoqué pour le printemps 2013. Le leader charismatique du plus vieux parti d'opposition a décidé de constituer la «fondation Hocine Aït Ahmed». Cinquante ans après la création du FFS, Hocine Aït Ahmed quittera la présidence du parti et décide de créer une fondation. L'annonce avait, hier, l'effet d'un tremblement de terre au siège du FFS. Le leader, le grand militant politique, passe ainsi le témoin et choisit de sortir de 70 années de militantisme politique par la grande porte. «Rappelons-nous nos ‘‘devoirs de vérité et de lucidité'' : mes convictions et ma ferveur sont toujours aussi vivaces qu'aux premières heures de mes soixante-dix ans de militantisme. Mais les cycles de la vie s'imposent à tous. Je dois ainsi vous dire que le moment est venu pour moi de passer le témoin et que je ne me présenterai pas à la présidence du parti pour le prochain exercice», a-t-il annoncé hier aux membres du conseil national réunis en session extraordinaire. Dans un message empreint de solennité, Aït Ahmed invite les cadres et militants du parti à conduire le FFS sur le chemin qu'il s'était tracé il y a 50 années, celui du combat politique pour une alternative démocratique. Maintenez le cap, dit-il aux membres du CN en mettant l'accent sur deux principes fondateurs du parti «la collégialité et l'éthique». «Je vous confie dès à présent le soin de maintenir le cap, de préserver et de développer le FFS, dans la collégialité, conformément à l'éthique qui a toujours guidé nos actions», souligne le leader charismatique qui gardera tout de même un lien de filiation avec le FFS, à qui il a donné naissance et nourri de son riche parcours militant et qui est arrivé à un âge de maturation lui permettant de suivre son chemin. «Je reste encore, bien entendu, à l'écoute des militantes et des militants, et en relation de confiance avec le comité éthique et le secrétariat national à qui je demande d'engager, dès maintenant, le processus de préparation du 5e Congrès du FFS par la mise en place, conformément à nos statuts et notre règlement intérieur, de la commission de préparation du congrès national (CPCN) et de tout mettre en œuvre pour sa réussite», promet Da L'Hocine qui ne coupe pas le cordon même s'il décide de prendre du recul et d'ouvrir un nouveau chapitre de sa vie. «Je resterai, dans l'avenir, toujours proche de vous dans la réflexion et l'action, en particulier avec la collaboration de mes enfants, dans le cadre de la ‘‘Fondation Hocine Aït Ahmed'' que j'ai décidé de constituer.» Du jeune de militant de 16 ans qui a rejoint le PPA à celui de 19 ans qui a rédigé le rapport stratégique sur la lutte armée pour l'indépendance, en passant par ses positions et actions d'une importance capitale durant la guerre de Libération, notamment sur le plan diplomatique, et arriver à son engagement dans l'opposition sans concession contre la dictature qui s'est installée après l'indépendance jusqu'à nos jours, sont autant de jalons qui ont marqué non seulement sa vie d'homme de conviction et d'engagement mais aussi et surtout la vie du pays. Il quittera donc organiquement dans six mois le FFS pour une autre œuvre qui appartiendra aussi à tous les Algériens, et où il contribuera encore une fois à léguer une mémoire, des valeurs et l'espoir en un avenir meilleur qu'il a toujours semé. Aït Ahmed n'omet pas dans son message d'orienter le parti sur la voie à suivre afin de faire face aux épreuves. «Mais le FFS ne serait pas ce qu'il est, c'est-à-dire le plus vieux et le plus solide parti d'opposition démocratique, s'il n'avait su, tout au long de ces années, serrer les dents durant les épreuves, renforcer les liens entre les militants les plus sincères, faire corps avec sa base et remonter, victorieux, à contre-courant de tous les traquenards», dit-il en faisant allusion aux embûches rencontrées par le FFS depuis sa décision de prendre part aux dernières législatives. Aït Ahmed assène aux voix discordantes ceci : «En dépit de toutes les crises, fomentées dans les officines ou générées par un climat ambiant peu soucieux de sincérité et de dialogue franc, le FFS a élargi sa base militante, conquis de nouveaux citoyens et convaincus de valeureux militants de joindre leurs forces aux siennes à travers diverses régions du pays.» Mais lancera aussi à l'adresse des militants du FFS en guise de mise en garde : «Cet acquis inestimable doit être mesuré à sa juste valeur. Pour les partis comme pour les femmes et les hommes, il faut savoir grandir, si on ne veut pas finir dans les dérives infantiles.» Le message de Hocine Aït Ahmed aux membres du conseil national (CN) est aussi et comme de tradition, une analyse lucide sur la situation politique du pays. Une situation qui n'est pas sans lier à celle qui prévaut dans la région, estime-t-il. «La menace d'une guerre de déstabilisation majeure pèse lourdement sur la région du Sahel. Elle peut entraîner l'ensemble du Maghreb dans des turbulences dévastatrices. Les peuples de la région risquent de se retrouver de nouveau ballottés par des forces hostiles à leur développement, à leur cohésion et à leur liberté. Tous trois insuffisamment promus et renforcés par des régimes trop occupés à réprimer leurs peuples et à se quereller pour anticiper les mutations et les bouleversements», a-t-il averti en plaidant pour l'urgence de la «mobilisation des consciences vives de la région». Et d'ajouter : «Plus que jamais, le Maghreb devra apprendre à sortir de la politique des slogans creux pour investir la voie du dialogue et des choix stratégiques mutuellement bénéfiques.» Et de qualifier les régimes dans la région de «trop peu sincères». Hocine Aït Ahmed prévient que «le parti, le pays et l'ensemble de la région seront des sujets de réflexion et de débat constant pour les mois qui viennent» et invite le CN à inscrire ces préoccupations pour les travaux du 5e congrès du parti qu'il a convoqué pour le deuxième trimestre 2013. «Nous sommes dans le sens de l'histoire et notre peuple ne renonce jamais. Cet événement doit donner tout son sens à un véritable changement démocratique dans notre pays», conclut-il.