À quelques mois de la fin du plan quinquennal 2009-2014, mis en œuvre par le gouvernement, aucun bilan des projets lancés jusque-là n'a été fait. Pis, l'Exécutif n'a pas jugé utile d'annoncer les autres actions à entreprendre afin de conforter le développement économique projeté. Cela peut être considéré comme une lacune d'autant plus que l'opinion publique nationale a besoin de savoir en toute légitimité comment ont été utilisées les ressources du pays. Quid des perspectives assignées à ce programme notamment la relance des secteurs productifs telle que l'industrie et l'agriculture pour lesquels l'on a alloué la bagatelle de 3 000 milliards de dinars. Le plan vise, également, in fine, de porter la part de l'industrie à 10% du produit intérieur brut (PIB)... Or, force est de constater que le programme présidentiel, confié au gouvernement, a évolué sans que l'on ne tienne compte des objectifs tracés initialement. L'équipe de M. Sellal a-t-elle pris des mesures additionnelles à même d'apporter des correctifs ou a-t-elle opté carrément pour un nouveau programme ? Auquel cas, quel sort sera réservé à l'ancien programme ? Autant de questions que se pose le Dr Salah Mouhoubi, économiste, invité à donner son avis sur la situation économique qui prévaut actuellement dans le pays. Cet expert relève une "panne" de l'économie nationale qui bloque le processus de lutte contre le chômage et freine la croissance du pays. "L'Algérie ne crée pas des emplois permanents et durables comme l'attestent les mesures prises en faveur de l'emploi des jeunes dont la précarité ne contribue ni à créer des richesses ni à réduire le chômage", constate le Dr Mouhoubi. La versatilité a touché aussi la croissance, devenue "molle", car tirée exclusivement des dépenses publiques. "Une croissance saine et durable doit être, cependant, soutenue par 4 facteurs essentiels, à savoir les investissements, la consommation, la dépense publique et les exportations", explique-t-il. Les investissements dans les secteurs productifs capables de construire une économie hors hydrocarbures paraissent, selon ce spécialiste, "dérisoires". Ce qui dénote, ajoute-t-il, l'"absence d'une stratégie de développement reposant sur des secteurs créateurs de richesses comme ceux de l'industrie, de l'agriculture et du tourisme". Un tel constat pousse les décideurs à prendre des décisions de nature conjoncturelle pour faire face à des problèmes urgents. Salah Mouhoubi cite l'exemple des mesures circonstancielles en faveur de l'emploi des jeunes pour parer au plus urgent alors que le problème est plus grave est structurel. "Absence d'une véritable stratégie de développement" "Ce ne sont pas les secteurs productifs créateurs de richesses qui offrent du travail mais c'est plutôt l'embellie financière qui le crée. Par conséquent, cela va intensifier la précarité de ces postes d'emploi", avoue-t-il. Sur un autre registre, la volonté politique affichée pour la lutte contre l'informel est, certes, louable mais demeure insuffisante et s'est avérée inefficace. Car, cette démarche s'effectue, déplore l'expert, sans une stratégie globale de développement. "Il ne suffit pas de déloger quelques vendeurs à la sauvette pour dire que le combat contre l'informel est engagé", affirme-t-il. Il faut, au contraire, suggère-t-il, éliminer les causes à l'origine de ce phénomène à travers une politique commerciale et fiscale rénovée et fondée sur les règles de droit. "L'ouverture du pays ne correspond pas actuellement aux besoins économiques mais contribue en revanche à l'émergence d'une économie de bazar", constate le Dr Mouhoubi. Le caractère conjoncturel des mesures décidées par l'Exécutif se vérifie encore dans l'instruction du Premier ministre, Abdelmalek Sellal, adressée au ministère des Finances ayant trait à la lutte contre la fuite des capitaux. "Il est surprenant d'attendre à ce que ce soit le Premier ministre qui a pris une telle décision à ce propos, au lieu et place du ministre des Finances alors que c'est un problème récurrent mais qui a pris des proportions inquiétantes ces dernières années", souligne l'économiste. Toutefois, cette lancinante et épineuse problématique nécessite une stratégie. À commencer par trouver une solution au florissant marché parallèle de la devise du square Port-Saïd d'Alger-Centre qui évolue depuis plusieurs années dans l'impunité la plus totale. L'on s'interroge d'ailleurs sur les personnes qui alimentent au quotidien ce vaste espace de change informel sis non loin des institutions les plus... officielles du pays dont la DGSN, l'APN, la Banque centrale et... la Bourse d'Alger ? L'on devrait préciser que pareils marchés noirs existent partout en Algérie. L'on se demande d'ailleurs comment des résidents algériens puissent acheter des biens dont des villas, des cafés, des restaurants... à l'étranger sans aucun contrôle ou même une déclaration d'ordre fiscal...? Fuite de capitaux, transferts illicites de devises, blanchiment d'argent... Les réponses à cette question existent mais serviraient-elles à faire changer le cours naturel des choses une fois données ? Pas si sûr ! B. K. Nom Adresse email