L'Algérie n'a pas réussi à construire une économie puissante et diversifiée pour la libérer progressivement de la dépendance à l'égard des hydrocarbures. Cette contreperformance a fait de l'Algérie un pays rentier. Le choix d'une telle option l'a rendue encore plus vulnérable vis-à-vis de ses… vulnérabilités. Ce sont ces vulnérabilités qu'aborde d'ailleurs Salah Mouhoubi, docteur d'Etat en sciences économiques et politiques dans son livre édité aux éditions Enag. Intitulé les Vulnérabilités, cas de l'Algérie, l'ouvrage du Dr Salah Mouhoubi évoque à la fois les faiblesses et les potentialités du pays, ainsi que les méthodes pour mieux exploiter les dernières dans le but de réduire les premières. L'auteur met en exergue l'incohérence de la politique économique prônée par les différents régimes qui se sont succédé. Pour lui, l'Algérie a libéralisé rapidement son commerce extérieur sans prendre des mesures minimales de protection de son économie. Résultat des courses : des pans entiers de l'industrie nationale sont en crise majeure. L'économiste relève également la dépendance de l'extérieur qui reste le reflet de fragilités d'ordre structurel, des économies faibles. Importations massives et exportations marginales caractérisent les activités économiques du pays. L'Algérie importe pratiquement tout pour se nourrir, se soigner et s'équiper, alors que ses exportations hors hydrocarbures sont insignifiantes. L'autre vulnérabilité, et non des moindres, que traîne toujours l'Algérie est l'échec de son système éducatif avec un taux d'analphabétisme élevé. Cette situation n'a pas pu encourager l'émergence de ressources humaines de qualité sur lesquelles s'appuient de nombreux pays développés. Outre le manque ou l'absence de vision, le Dr Mouhoubi constate un déficit en matière d'infrastructures et ses conséquences sur les plans politique, économique et social. L'instabilité institutionnelle appelle, selon Salah Mouhoubi, à une mise en œuvre urgente de projet de réforme et de modernisation de l'Etat. Abordant un volet qu'il a consacré au management de l'économie, M. Mouhoubi ne s'est pas empêché de souligner “le grand paradoxe : l'Algérie gère la transition de l'économie de marché avec des réflexes qui prévalaient dans l'économie dirigée”. Poursuivant son constat, il affirme que rien n'est facilité pour libérer les initiatives, encourager la création de richesses… “Tout est soumis à l'autorisation administrative, d'où le développement de la corruption et du laxisme”, déplore-t-il. Par ailleurs, l'auteur avoue qu'en Algérie, il n'existe pas de stratégie industrielle. Les leviers censés servir d'appuis au secteur industriel sont répartis, ajoute-t-il, entre une douzaine de ministères et institutions. “Le ministère de l'Industrie ne maîtrise pas, en outre, tous ces leviers”, estime le Dr Mouhoubi. Quelles solutions pour éradiquer toutes ces vulnérabilités ? Salah Mouhoubi propose dans son livre une feuille de route détaillée, mais qu'on résume dans cette déclaration : “Il faut arriver à instaurer un Etat de droit et de démocratie, d'une part, et promouvoir l'économie de marché, d'autre part.” À compter de 2010, il serait vital, suggère M. Mouhoubi, que les investissements publics soient relayés par des investissements productifs pour asseoir la croissance économique sur des bases durables et saines. “Si l'Algérie ne réalise pas cet objectif, c'est-à-dire en encourageant les IDE et l'investissement privé national, elle risque de se retrouver avec des infrastructures de base importantes et modernes mais dont l'utilité économique serait amoindrie”, prévient-il. À l'horizon 2020, projette-t-il, il faut que les exportations hors hydrocarbures, le tourisme et l'apport de notre communauté à l'étranger représentent 50% des revenus en devises du pays et les 50% restants proviendraient des hydrocarbures. Une chose est certaine, le Dr Salah Mouhoubi accorde à l'Algérie un délai de 30 ans pour qu'elle puisse mettre un terme à ses vulnérabilités et sortir définitivement de la zone rouge et incertaine du sous-développement.