Une opération militaire contre le régime de Bachar Al-Assad semble imminente. Intervention qui pourrait se faire sans le consentement de l'ONU en raison d'un veto de l'allié indéfectible de la Syrie, la Russie et de la Chine. Décryptage. Les capitales occidentales sont à la recherche d'autres sources de légitimation d'une intervention militaire en Syrie, donnée comme imminente. Leur dernier argument sur l'utilisation par le régime de Bachar Al-Assad d'armes chimiques n'ayant pas convaincu Moscou et Pékin qui ont averti utiliser leur droit de veto au Conseil de sécurité des Nations unies. Depuis le début de la crise syrienne, en mars 2011, la Russie, alliée d'Al-Assad, et la Chine ont opposé à trois reprises leur veto de membre permanent à des projets de résolution qui condamnaient le président syrien et appelaient à des mesures de rétorsion contre son gouvernement. Mais, leur attitude semble avoir évolué ces derniers jours, face à la mobilisation internationale contre leur "protégé". Le ministre des AE russe a, certes, mis en garde contre la solution militaire, réaffirmant la position de son pays au Conseil de sécurité mais il a clairement laissé entendre que les Russes ne s'opposeraient pas frontalement à une attaque contre Damas. Cette subtilité diplomatique pourrait être également interprétée comme un sérieux avertissement à Bachar Al-Assad sommé de faire des concessions, faite de quoi, la Russie l'abandonnerait au sort que lui réservent les Occidentaux. La menace est plus lourde avec le basculement de Washington dans le camp des faucons contre Damas mené au pas de charge par la France et la Grande-Bretagne avec en sous-main l'Arabie Saoudite et bien entendu le Qatar. Une "obscénité morale" qui devrait heurter la conscience du monde, a jugé lundi soir le secrétaire d'Etat américain John Kerry, pour lequel l'emploi d'armes chimiques est "indéniable", tandis que la Maison-Blanche estimait que la responsabilité du régime syrien fait très peu de doute désormais. Jusqu'ici, les Etats-Unis même s'ils se mobilisaient, préconisaient la solution politique à travers notamment Genève II. Obama s'est même rallié à la position franco-britannique consistant à mettre en œuvre une frappe contre la Syrie sans l'approbation du Conseil de sécurité. Le Conseil de sécurité de l'ONU avait été contourné au moment du Kosovo, où l'intervention armée de l'Otan en 1999 dans l'ancienne province serbe contre les forces de Slobodan Milosevic s'est faite sans mandat de l'ONU, Moscou menaçant d'utiliser son veto. Laurent Fabius, ministre français des AE et son homologue britannique, W. Hague, ont évoqué l'idée de "coalition de volontaires" dont les contours s'esquissent déjà. Le ministre turc, A. Davutoglu a précisé que 36 ou 37 pays discutent de cette option. Une réunion des chefs d'état-major des forces armées de plusieurs pays occidentaux, dont les Etats-Unis, et moyen-orientaux s'est par ailleurs tenue à Amman. Comme l'OTAN au Kosovo, la Ligue arabe pourrait également appuyer cette action militaire contre le régime syrien. Selon des exégètes du système onusien, rien n'empêche les Nations unies, hors Conseil de sécurité, d'apporter un "cadre" à une intervention contre les forces d'Al-Assad. L'article 51 de la Charte des Nations unies évoque ainsi "le droit naturel de légitime défense, individuelle ou collective, dans le cas où un membre des Nations unies est l'objet d'une agression armée, jusqu'à ce que le Conseil de sécurité ait pris les mesures nécessaires pour maintenir la paix et la sécurité internationales". Les exégètes ont découvert une autre voie, la résolution adoptée en 1950, "Union pour le maintien de la paix" qui permet à l'Assemblée générale des Nations unies de se réunir dans l'urgence dans tout cas où "paraît exister une menace contre la paix, une rupture de la paix ou un acte d'agression et où, du fait que l'unanimité n'a pas pu se réaliser parmi ses membres permanents, le Conseil de sécurité manque à s'acquitter de sa responsabilité principale dans la maintien de la paix et de la sécurité internationales". C'est ce texte qui a permis aux Etats-Unis et à leurs alliés de mettre en échec l'Union soviétique lors de la Guerre de Corée (1950-1953). Washington, Londres et Paris travaillent en coulisses pour tenter d'obtenir un soutien politique de l'Assemblée générale de l'ONU via un texte non contraignant. Celle-ci accepterait-elle de se mettre à dos la Chine et la Russie ? D. B Nom Adresse email