Ceux qui s'inquiétaient de ce que le pays ne soit pas géré sont rassurés, depuis hier. Certes, il n'y a toujours pas de Conseil des ministres depuis décembre 2012, mais il y a mieux : un remaniement ministériel. En fait, l'on n'a pas bien lu la lettre de la révision de la Constitution de 2008, sinon on aurait compris que les ministres ne sont pas faits pour constituer un Conseil ; ils ont juste besoin d'être coordonnés par un Premier ministre. Et d'être, au préalable, nommés. En politique, gérer, c'est commander ; et commander, c'est nommer. À l'évidence, dans ce changement, les départs ne peuvent pas avoir le même sens. Si pour Medelci, Ould Kablia et, peut-être, Ziari, il peut s'agir de mise à la retraite, à leur demande, pour certains, il ne peut s'agir de cela pour Rahmani et pour les ministres FLN (Tou, Harraoubia et peut-être Ziari et Benaïssa que le revirement de dernière minute n'a pas sauvés). C'est le "redressement" des partis du pouvoir qui s'est poursuivi jusque dans l'Exécutif. Voilà une question qui vient d'être clairement tranchée par Bouteflika : il est encore là, et bien là. Indépendamment de la nature du fonctionnement qu'il devra adapter aux institutions, le message que la question de la continuité ne devrait plus se poser. Jusqu'en avril 2004, au moins. D'ailleurs, entre la propulsion de Saïdani à la tête du FLN, les restructurations opérées dans le DRS et le remaniement ministériel, l'évènement n'est pas forcément celui que l'on croit. C'est la nature du système qui définit lequel de l'appareil politique, de l'appareil policier ou de l'appareil exécutif, est le plus déterminant pour la maîtrise du pouvoir. Ce sont justement des moyens de l'action politique, d'orientation de la communication et d'investigation sur les agissements des responsables dans les institutions qui, un à un, viennent d'être récupérés par l'Exécutif, juste avant de procéder à sa "mue". On comprend, a posteriori, pourquoi le Président s'est mis à médiatiser, dans le même temps, ses "activités". La prise en main est résolue et cela doit se savoir. Les arrivants, pour l'essentiel issus de la haute fonction publique, ne sont pas marqués politiquement. Ce qui fait que ce remaniement, qui touche un gouvernement déclaré "de technocrates" lors de sa nomination, donne cette fois-ci un ton réellement technocratique à une équipe qui ne l'était point. La preuve en est que les démis l'ont été, pour la plupart, pour des raisons politiques. Mais "l'apolitisme" a des limites qu'on le sait dans un système où le pouvoir se confond avec l'Etat : la "technocratie" n'est pas dispensée d'obédience politique. C'est même le secret de son autoritarisme total. Maintenant que les structures de l'APN sont pourvues par le FLN version Saïdani, c'est donc avec un Exécutif "technique" que Bouteflika doit aborder la dernière ligne droite de son troisième mandat et, peut-être, affronter les obstacles à son quatrième. Il semble avoir soigneusement, et un peu à la hussarde, déblayé, "dans le système", la route à ses projets. Il reste à savoir si l'état du pays lui est toujours favorable. Et si ce pays peut souffrir, avec ou sans Abdelaziz Bouteflika, un mandat d'affaissement de plus. M. H. [email protected] Nom Adresse email