L'hospitalisation de Bouteflika en 2013 au Val-de-Grâce et son admission, il y a quelques jours, pour officiellement y subir un contrôle de routine, ont donné une dimension politique à un litige purement financier. Certains hôpitaux français refusent, depuis quelque temps, d'admettre les malades algériens, y compris les familles de certains diplomates dans le cadre du protocole d'accord algéro-français de Sécurité sociale du 1er octobre 1980, en vertu duquel s'opère le transfert pour soins des assurés sociaux algériens salariés. Les déclarations de la ministre française de la Santé, Marisol Touraine, mercredi dernier, sur le site Internet du quotidien Le Figaro, ont irrité l'Algérie qui a réagi dès le lendemain par le biais du porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Amar Belani. Celui-ci affirme que le pays s'est toujours acquitté des créances dûment documentées entrant dans le cadre conventionnel bilatéral. Il n'existe donc, selon ce responsable, aucune dette, mais des cas litigieux avec des hôpitaux français. Le transfert de Bouteflika avait soulevé, en son temps, de vives critiques de la part des députés du Front national qui se sont interrogés sur les conditions financières de cette hospitalisation. Les journaux français ont soulevé une nouvelle fois la question, à la faveur du transfert récent du chef de l'Etat pour, officiellement, un contrôle et des bilans. Les soins du chef de l'Etat en France ont donné une dimension politique à un litige purement financier et commercial. Ce qui explique, sans doute, la promptitude des autorités algériennes à réagir aux déclarations de la ministre française de la Santé, qui s'est dite ne pas être en mesure d'expliquer les formalités et les conditions qui ont prévalu pour la prise en charge du président algérien au Val-de-Grâce. "Il faudrait que ce soit l'hôpital qui donne l'information, mais je n'ai pas de doute ni d'inquiétude sur la facture de l'hospitalisation de M. Bouteflika", a répondu la ministre française. Des médias français ont parlé de 6 milliards que l'Algérie doit au titre des arriérés médicaux. "On est dans l'excès. Oui, il y a des arriérés, et ce sont des discussions sérieuses que j'ai engagées avec l'Algérie qui ont mené à ce que celle-ci, à la fin de l'année 2012, règle une première partie de ce qu'elle doit, puisqu'une somme de 15 millions a été versée. Ça vous donne l'ordre de grandeur. On n'est pas du tout dans les milliards." Cette démarche a permis, en effet, l'assainissement des situations avec de nombreux établissements hospitaliers dont l'Assistance publique des hôpitaux de Paris (APHP), l'Assistance publique des hôpitaux de Marseille (APHM), la fondation ophtalmologique Adolphe-de-Rothschild et la clinique chirurgicale Marie-Lannelongue. Mais la non transmission par le reste des hôpitaux français des justificatifs pour le règlement des factures liées aux nouvelles prises en charge a entraîné un renouvellement de la créance litigieuse, et ce, en dépit des paiements effectués. Pour Amar Belani, "il est inapproprié de parler de dettes, car il s'agit plutôt de contentieux portant sur des montants qui restent à concilier entre les organismes compétents des deux parties, afin de ne retenir, en bout de parcours, que les créances authentiques découlant des prises en charge documentées établies par les institutions nationales compétentes et, notamment, la Cnas, conformément aux dispositions de la convention bilatérale de Sécurité sociale et du protocole de soins qui y est annexé." En effet, avant de payer, la Cnas vérifie un certain nombre de pièces devant accompagner les factures des hôpitaux français. En l'occurrence, un compte rendu médical détaillé, un bulletin de situation du patient bénéficiaire de soins et un bulletin de passage. Ces procédures de contrôle mises en place par la Cnas ont permis de relever des anomalies dans les factures des hôpitaux français : dépassement de la période des soins figurant sur les engagements de prise en charge délivrés, facturation de prestations d'hébergement sans rapport avec les soins, double facturation pour un même malade, pour les mêmes soins sur la même période... Si ce conflit dure depuis 2010, c'est à cause, tout simplement, du refus de la Cnas de payer les factures irrégulières et les surfacturations, nous explique une source qui a requis l'anonymat. L'Algérie réclame la tenue de la réunion de la commission mixte sur les affaires sociales dont les travaux sont gelés depuis 2010 pour assainir ce contentieux. Amar Belani annonce la réactivation de ce mécanisme pour le courant du premier trimestre de l'année en cours, afin d'apurer les comptes, conformément aux recommandations de la 1re session du comité intergouvernemental de haut niveau algéro-français, qui s'est tenue à Alger les 16 et 17 décembre 2013. Car, la ministre française persiste et signe : "Nous considérons qu'il y a encore des sommes que l'Algérie nous doit. Les discussions n'ont pas assez progressé à mon goût, et je souhaite, je l'ai dit à mon homologue algérien, qu'elles reprennent de façon plus rapide et plus vigoureuse." N. H Nom Adresse email