L'enlèvement, vendredi dernier, du jeune Mebrek Amirouche n'a pas laissé de place, hier, à l'indifférence dans la région de Beni Zmenzer où, encore une fois, la mobilisation et la solidarité n'étaient pas de vains mots. Choquée par l'enlèvement de ce père de famille, "vendeur à la sauvette" de profession, la population locale a répondu massivement au rendez-vous fixé, la veille, par la coordination des comités de villages de cette région. À 11h, les artères du chef-lieu communal de Beni Zmenzer étaient désertes. Aucun commerce n'a levé le rideau. Aucune administration ou école n'a ouvert ses portes. La paralysie était totale. Le mot d'ordre de grève générale décidée par la coordination des comités de villages, en coordination avec les élus locaux, a été massivement suivi. À Alma, la placette principale du chef-lieu communal, le rassemblement de protestation prévu à 10h venait de prendre fin. Des jeunes, par petits groupes, s'échinaient alors, malgré un temps glacial, à préparer des banderoles pour la caravane de sensibilisation dont le départ était prévu à 13h. "Libérez Amirouche sans condition" ; "Halte aux kidnappings", écrivaient-ils sur un morceau de tissu étendu parterre. Une affiche intitulée "Alerte kidnapping", et sur laquelle on pouvait voir la photo de la victime, était placardée partout. "Amirouche n'est pas un éleveur ! Il n'est qu'un vendeur à la sauvette, un vendeur ambulant, un jeune aux conditions modestes qui travaille durement pour nourrir sa famille", nous dira, en colère, un membre de la cellule de crise pour, dit-il, "remettre les choses à leur place". Entouré de plusieurs villageois et élus, un autre membre de la coordination des comités de village ajoute : "Nous sommes tous choqués et étonnés, nous ne comprenons pas pourquoi enlever un jeune aussi modeste et surtout sans histoires. Devrait-on demain s'attendre à ce qu'on enlève même des salariés pour leur paie ?" À 13h, Alma était envahi par les véhicules qui venaient allonger le cortège qui devait former la caravane qui allait sillonner toutes les localités voisines. Plus de 600 véhicules sur lesquels étaient attachées des banderoles ou des affiches de sensibilisation a pris le départ d'abord vers Oumadhen, le village de la victime, où la population compte témoigner sa solidarité agissante à la famille Mebrek, avant de prendre la destination de Souk El-Tenine, Mechtras, Ouadhias où le véhicule de la victime, une Toyota Hilux année 2003, a été retrouvé, puis Beni Douala, Beni Aïssi, Tizi Ouzou et Ihesnaouen avant de regagner Beni Zmenzer. Tout au long de cette caravane, il était question de lancer des messages aux ravisseurs pour libérer Amirouche sain et sauf et sans paiement de rançon, et aussi de sensibiliser la population en vue d'actions d'envergures au cas où l'otage ne venait pas à être libéré. La population de Beni Zmenzer est à présent rompue à la mobilisation, nous dit-on. La région vient d'enregistrer son troisième enlèvement après celui de Gater Larbi et, en avril 2013, celui du jeune Kahil Yazid. Au siège de l'APC locale, officiellement fermée, le maire, Chafa Ammar, affine les préparatifs de la caravane avec les membres des comités de village. Les traits tendus, il nous exprime toute son inquiétude sur l'insécurité dans sa région. "Désormais, nul n'est à l'abri. La sécurité incombe à l'Etat et celui-ci doit assumer ses responsabilités", déclare-t-il expliquant que sa municipalité a mis tous les moyens nécessaires pour la réalisation d'une sûreté urbaine qui a été inscrite depuis longtemps à la réalisation, mais dont les travaux avancent à pas de tortue. "Et puis, même si la sûreté est réalisée, ils n'ont même pas prévu de célibatorium", dit-il. Mais pour cet usage, le P/APC dit avoir trouvé la solution en mettant à disposition l'ancien siège de la garde communale qu'il suffira d'aménager, mais cela n'a pas aidé à avancer. Une chose est alors devenue claire pour lui : "L'Etat a abandonné tous les Algériens, mais encore un peu plus la population d'Ath Zmenzer." Il ne reste alors, dit-il, à la population qu'à se défendre comme elle peut, dans un instinct grégaire de défense et de survie. Samir LESLOUS Nom Adresse email