Le public béjaoui a eu à suivre avec intérêt la conférence-débat animée samedi dernier au théâtre de la ville par la politologue et docteur en sociologie Feriel Lalami. L'invitée de Ballade littéraire – née de la scission avec le café littéraire de Béjaïa – en a profité pour revenir sur la genèse du mouvement féministe algérien. Et sur son évolution après la parenthèse imposée par la décennie rouge, où tous les espaces d'expression étaient fermés. La thématique retenue était autour de son livre les Algériennes contre le code de la famille. La lutte pour l'égalité, publié sur les Presses de Sciences Po Paris en 2012. Un livre dans lequel la docteure en sociologie est revenue longuement sur le code de la famille, promulgué en 1984, qui allait "à l'encontre de l'égalité entre les hommes et les femmes", alors que c'était le serment fait par les architectes de la Révolution pendant la lutte pour l'indépendance et "énoncée par la Constitution" au lendemain du recouvrement de la souveraineté nationale. L'auteure a également rappelé que l'environnement politique est "fait d'obstacles et de contraintes, poids de la période coloniale qui a réduit le statut des femmes à un enjeu d'identité nationale ; limites imposées aux libertés publiques par un régime autoritaire". Le livre de Feriel Lalami s'est donc voulu comme une contribution visant à réintroduire la femme dans l'histoire contemporaine de l'Algérie. L'occasion de relater l'histoire d'un mouvement féministe algérien, né au lendemain de l'indépendance pour contrer une Constitution qui ne répondait plus aux attentes des femmes algériennes. Feriel Lalami a, en outre, expliqué dans le menu détail la manière avec laquelle le mouvement s'est renforcé depuis la promulgation de ce code de la famille que d'aucuns avaient qualifié de "code de l'infamie". Pour la conférencière, cette "loi discriminatoire" s'est inspirée largement des "stéréotypes hérités d'une période coloniale où la préservation de l'authenticité identitaire et le statut de la femme étaient confondus." Mme Lalami a également souligné l'essor qu'a connu le militantisme féministe algérien alors qu'il évoluait dans une sévère fermeture politique dans les années 1970, l'Union nationale des femmes algériennes (UNFA) étant la seule organisation de masse qui portait la voix des "militantes". Des années de lutte qui ont contribué à l'émergence de nouveaux acteurs, dont le gros va encadrer les futurs cadres sociopolitiques avant d'être stoppé ensuite par l'épisode sanglant de la décennie noire. Un cycle de violences extrêmes durant les années 1990 qui finira par réduire "l'activité politique et (compromettre) la poursuite du mouvement ; les associations ont toujours su, avec pragmatisme, trouver de nouvelles ressources, en particulier au niveau international". Feriel Lalami est revenue enfin sur les textes de loi que les réformes sur le code de la famille n'ont pas touchés, notamment dans les chapitres concernant le mariage et la succession. Textes de loi qu'elle juge "discriminatoires et humiliants". Après avoir fait un récit de la lutte des Algériennes pour le changement de leur statut, ponctué d'interrogations sur les perspectives qui leur sont ouvertes depuis la révision en trompe-l'œil du code de la famille en 2005, Feriel Lalami rendra un vibrant hommage à la mémoire de la grande féministe béjaouie, Nabila Djahnine, assassinée le 15 février 1995 par une horde terroriste dans la ville de Genêts. M. O Nom Adresse email