Ils ont accepté d'être de la course malgré la fraude annoncée, mais Ali Benflis et les quatre autres candidats, qui passent aux yeux de l'opinion pour des lièvres dans cette élection présidentielle, ont désormais une nouvelle raison de se retirer : Bouteflika va consacrer son quatrième mandat à travailler pour le "renouveau de la République". Exactement comme l'a suggéré Zeroual et d'autres avant lui. Bouteflika révisera la Constitution et mènera encore d'autres réformes pour aller à "plus de démocratie" et il redonnera leur place aux partis politiques qu'il associera à la prise de décision. Promesse en a été faite par le candidat lui-même dans sa "lettre aux Algériens" et elle a été réitérée hier encore par Sellal, son directeur de campagne. À ce rythme, les partisans du boycott eux-mêmes devraient se raviser pour non seulement cesser de faire la promotion de leur mot d'ordre, mais aussi appeler les Algériens à voter massivement pour Bouteflika, désormais garant du renouveau démocratique et de l'ouverture politique. Ce message aurait pu être pris au sérieux, si Bouteflika n'était pas le maître d'œuvre d'un retour à l'ère et aux pratiques du parti unique et de l'instauration de la présidence à vie. Trop tard, donc. On ne peut avoir quelque chance de convaincre lorsqu'on prétend vouloir réaliser en cinq ans (et encore !) un projet politique dont on a combattu jusqu'à l'idée pendant quinze ans. Les promesses que fait Bouteflika aujourd'hui sont, à ce titre, un aveu de ses échecs d'hier. Car, ne l'oublions pas, la démocratie, les droits de l'Homme, la liberté de la presse et autres attributs de la citoyenneté et de la République, ils les avaient promis dès son premier mandat, lorsqu'il citait Jefferson parmi ses références. On sait ce qu'il en est advenu. Mais Bouteflika et Sellal ne cherchent pas à convaincre. Ils n'en ont pas besoin, puisque tout se fera dans l'obscurité de la nuit du 17 au 18 avril, une nuit sans lune, selon les astronomes de la politique. Bouteflika et ses soutiens surfent aujourd'hui sur les revendications de l'opposition démocratique par défaut, non par conviction. Pour paraître en phase, eux aussi, avec les espérances et l'exigence historique de changement. Pour être dans l'air du temps, en somme. Mais ils sont hors de leur temps. Irrémédiablement. Nom Adresse email