Pour l'ancien responsable de Sonatrach, même si Bouteflika est incapable d'assumer la fonction de chef d'Etat, les deux clans belligérants s'entendent sur le partage du pouvoir pour faire durer le système. Comment penser les termes d'une rupture avec le système ? Quelles peuvent y être les assises d'une démocratie pluraliste, attentive au progrès social et à la lutte contre les inégalités ? Comment mettre fin au règne de l'impunité et aux logiques mafieuses au sommet de l'Etat ? Comment penser ces enjeux tout en demeurant vigilant aux convoitises impérialistes qui pèsent sur la sous-région ? Autant d'interrogations auxquelles a tenté de répondre un panel de personnalités, dont Hocine Malti, ancien vice-président de Sonatrach, et Omar Aktouf, enseignant à HEC Montréal, lors d'une table-ronde organisée, samedi à Montréal, par le Comité international de soutien au syndicalisme autonome algérien (Cisa) et l'Association des amis de l'Algérie plurielle. Intervenant en premier avant M. Aktouf qui a brossé un tableau des plus sombres en matière économique, M. Malti a qualifié les 15 ans de règne de Bouteflika de "catastrophiques". Revenant longuement sur le violent affrontement entre le clan présidentiel et le Département de renseignement et de sécurité (DRS), le conférencier a affirmé que la charge d'Amar Saâdani, chef du FLN, contre Mohamed Mediène, dit Toufik, a repris des lieux communs. "Ce qu'a dit Saâdani contre Toufik est un secret de Polichinelle", estime, d'emblée Hocine Malti pour qui les trois mandats du chef de l'Etat sont le fait du DRS. Pourquoi alors ce conflit à couteaux tirés ? Pour l'intervenant qui a interpellé, par le biais d'une lettre ouverte, le patron du DRS qu'il a qualifié de "Rebb Dzayyer", ce conflit cache mal une guerre d'influence entre les services spéciaux et l'état-major de l'ANP. Pour lui, tout a commencé avec le séjour médical du président de la République à Paris. "L'AVC du président de Bouteflika est un facteur déclenchant qui a semé la panique entre les deux clans, le DRS et l'EM de l'Armée", fera remarquer M. Malti, non sans rappeler que la candidature de Bouteflika pour un 4e mandat a mis fin à l'affrontement entre les deux clans. Sauf que, renchérit l'orateur, le cessez-le-feu sera de courte durée, puisque les hostilités vont reprendre de plus belle sur la question de la vice-présidence que, tout indique, sera tranchée à l'occasion de la révision constitutionnelle. Pour l'ancien responsable de Sonatrach, même si Bouteflika est incapable d'assumer la fonction de chef d'Etat, les deux clans belligérants s'entendent sur le partage du pouvoir pour faire durer le système. L'intervenant estimera, par ailleurs, que l'attaque de Tiguentourine est une des implications de la guerre des clans dont les secrets ne sont pas encore dévoilés. Abordant la situation économique, le conférencier prédit un sombre avenir pour le pays. Connaissant le secteur des hydrocarbures sur les bouts des doigts, Hocine Malti considère la gestion actuelle des affaires "catastrophique" ; ce qui poussera le pays à se remettre à emprunter à l'international dans un proche avenir. L'intervenant est convaincu que le pouvoir ne pourra pas lutter contre la corruption devenue endémique. La lutte contre la corruption passe par la mise en place d'une vision stratégique, ce dont est dépourvu le pouvoir, avoue le conférencier. "Pour diversifier le tissu économique et lutter contre la corruption, il faut de la volonté politique, ce qui fait défaut au régime d'Alger", dit-il, ajoutant que la corruption est telle que 5 à 6, voire 10 milliards de dollars partent dans les poches des membres de la nomenclatura dans le seul secteur de l'énergie. M. Malti, pour qui l'héritage de Bouteflika n'est point brillant, appréhende l'après-17 avril. "La guerre des clans va reprendre", prédit-il, avant de conclure par cette imploration divine : "Rebbi yestar..." Y. A. Nom Adresse email