Visite programmée ou simple coïncidence, le secrétaire d'Etat américain, John Kerry, débarque à Alger au même moment que l'émir du Qatar, Cheïkh Tamim Ben Hamad al-Thani. Le premier, pour présider avec son homologue algérien, Ramtane Lamamra, la deuxième session du dialogue stratégique entamé à Washington en 2012, et l'autre pour relancer le dialogue bilatéral après un froid de plusieurs années provoqué par les attaques incessantes d'Al-Jazeera et le soutien sans équivoque accordé par Doha aux islamistes dans le sillage du Printemps arabe. Les deux responsables, l'un représentant la première puissance mondiale et l'autre une puissance régionale en ascension, viennent en Algérie à deux semaines de la présidentielle du 17 avril. Si le secrétaire d'Etat a commenté très diplomatiquement le prochain scrutin en affirmant que les "USA attendent avec impatience une élection transparente", on n'a pas entendu, en revanche, de l'émir qatari sur ce dossier. Mais, dans les deux cas, Washington et Doha partageraient le même sens des intérêts. Les Américains souhaitent que l'Algérie puisse jouer un rôle régional en vue de stabiliser le Sahel, aider à la structuration de l'Etat libyen, coopérer plus étroitement avec la Tunisie et constituer un pivot de la lutte antiterroriste. Les Qataris, qui ont investi ailleurs qu'en Afrique du Nord, ne sont pas moins lotis en Algérie avec le contrat signé pour le complexe sidérurgique de Bellara et l'investissement dans la téléphonie mobile à travers Ooredoo. À eux seuls, ces investissements pèsent plusieurs milliards de dollars. Dans le même temps, il n'y a pas que le business, le Qatar est aussi intéressé par la profondeur de la relation politique. Il semblerait que la visite de l'émir serait motivée ou plutôt intéressée par la médiation que pourrait jouer Alger dans le conflit opposant le Qatar à l'Arabie saoudite. L'Egypte ne pouvant plus jouer ce rôle en raison de son instabilité, c'est à l'Algérie que reviendrait la mission d'apaiser la tension entre les deux pays. Riyad, Dubaï et Manama, qui ont rappelé leurs ambassadeurs à Doha, accusent le Qatar de mener une politique déstabilisatrice dans la région en raison de son soutien à la mouvance islamiste. C'est précisément sur la question de la gestion de l'islamisme qu'est attendu le Qatar dans sa nouvelle approche diplomatique. Attendons pour voir. S. T Nom Adresse email