Contrairement à Béjaïa où son meeting a été violemment empêché la veille, Abdelmalek Sellal, directeur de campagne de Bouteflika, a réussi, hier, à Tizi Ouzou, à éviter d'essuyer un second affront, mais son meeting, qui n'avait rien de populaire, n'a pu se dérouler sans grande tension. Pour éviter le scénario bougiote de la veille, Sellal a préféré, cette fois, devancer son auditoire à la grande salle de la maison de la culture Mouloud-Mammeri où il était arrivé dès 8h, alors que son meeting ne devait avoir lieu qu'à 10h. Un dispositif impressionnant de gendarmes et de policiers veillait scrupuleusement sur la porte dérobée de la salle. Cependant, à la porte d'entrée, des membres du directoire local de campagne de Bouteflika s'échinaient minutieusement à filtrer les invités triés sur le volet qui devaient former l'assistance. Sans invitation ou badge, aucune chance d'y accéder. Il s'agissait là d'un second, même un troisième contrôle. À 200 mètres de la Maison de la culture, des barricades et un cordon de forces de police sont déjà mis en place depuis 7h. Filtrage systématique. Plus loin encore, des centaines de policiers en uniforme et en civil sont aux aguets tout autour de la Maison de la culture. Et l'on saute sur tout ce qui bouge. La veille, un appel a été lancé par les étudiants pour un rassemblement de protestation contre la venue de Sellal et contre le régime de Bouteflika devant la Maison de la culture. Ce qui a motivé un déploiement massif de la police dans toute la ville. Le campus Hasnaoua, d'où devait s'ébranler la manifestation qui devait se diriger vers la Maison de la culture, a été cerné par les fourgons des forces antiémeutes depuis les premières heures de la matinée. Dans la ville, il y avait visiblement plus de policiers que de citoyens. À 9h30, les étudiants surgissent quand même devant l'avant-dernier rempart qui les sépare de la Maison de la culture. Ils sont plus d'une centaine. D'autres citoyens se joignent à eux. De nombreuses pancartes commencent alors à être visibles au-dessus des têtes, et les slogans, tant redoutés, commencent à fuser. Les arrestations aussi. Pendant que dans la cour de la Maison de la culture Sellal simulait "un petit bain de foule" parmi une clientèle choisie, à l'extérieur, une trentaine d'étudiants sont déjà interpellés. À l'intérieur du commissariat situé à une cinquantaine de mètres du lieu du meeting, les étudiants arrêtés scandent : "Pouvoir assassin", "Djazaïr hourra démocratia". Les mêmes slogans que la foule scandait à l'extérieur. "Bouteflika dégage", "DRS dégage", "Vous avez semé la dictature", lit-on sur des pancartes exhibées aux nez des policiers qui formaient le cordon. Dans la foulée des interpellations, plusieurs journalistes ont été malmenés et intimidés. "L'Ajcto alerte l'opinion publique et interpelle les responsables des services de sécurité à l'effet de cesser ces pratiques qui n'honorent ni les institutions de la République ni la pratique démocratique, mais qui portent, plutôt, atteinte à la liberté d'expression en général et à l'exercice du métier du journaliste en particulier", lit-on dans un communiqué de l'association des journalistes rendu à l'occasion. À 11h30, Sellal achève son meeting et quitte la salle, comme lors de sa venue, par une porte dérobée, escorté par des gendarmes. Le rassemblement des manifestants, quant à lui, s'est poursuivi jusqu'à 13h. Les manifestants, toujours cernés par les forces antiémeutes, continuent de scander des slogans contre le pouvoir et d'arracher puis incendier les portraits de Bouteflika. Ce n'est que vers 13h30 que les manifestants ont commencé à se disperser. S L Nom Adresse email