"C'est la fraude qui a parlé au moment même où le peuple algérien était, une fois encore, bâillonné (...). Il y a eu distribution des voix de la part de l'administration", a-t-il déploré. "Je ne décevrai pas les femmes et les hommes qui ont cru en mon projet politique de renouveau national et qui a bénéficié d'une vaste mobilisation populaire. Je les invite à rester soudés et mobilisés pour le nouveau combat politique qui nous attend. Ce combat commun exige du courage, de la détermination et un souffle long et je sais que nous n'en manquons pas." Cette déclaration est de Ali Benflis, candidat malheureux à l'élection présidentielle du 17 avril. L'ancien chef de gouvernement s'inscrit au lendemain du rendez-électoral dans une perspective d'avenir et projette de capitaliser politiquement la mobilisation suscitée autour de sa candidature lors de la campagne électorale qu'il a menée dans les 48 wilayas. Comment ? À travers la création d'une formation politique. C'est lui-même qui l'a laissé entendre hier à l'occasion de sa déclaration faite en réaction à l'annonce officielle des résultats de la présidentielle à son quartier général de campagne, à Ben Aknoun. "Prochainement, j'annoncerai la forme et le contenu de ce combat politique d'avenir", a-t-il annoncé avant de préciser qu'il est question d'un "cadre politique organisé" pour poursuivre son combat politique. Cette annonce a grandement réconforté les soutiens du candidat, révoltés par les résultats de l'élection ainsi que des intimidations et provocations des partisans du Président-candidat qui se voit reconduit. En effet, les partisans de ce dernier sont venus manifester leur joie devant le QG de campagne de Benflis au moment même où ce dernier s'apprêtait à faire sa déclaration à la presse. Mais l'annonce de la création d'une formation politique réunissant les soutiens du candidat a eu pour effet d'atténuer grandement la colère de ces derniers. Ali Benflis a souligné qu'un rassemblement avec les forces du changement procède d'une "profonde conviction" fondée sur la faillite et l'échec du système politique en place. "Le système politique algérien a conduit le pays à l'impasse totale dont nous sommes les témoins aujourd'hui. Ce système a fait encore la démonstration irréfutable de son incapacité à faire sa propre mue pour répondre aux attentes de notre peuple et s'adapter aux changements que connaît le monde qui nous entoure", relève-t-il avant d'estimer que "la sortie de cette impasse commande inéluctablement le changement de ce système" pour aller vers une véritable alternative démocratique. Cette alternative, Benflis la veut "consensuelle, ordonnée et pacifique". Aux yeux de l'ancien chef de gouvernement, cela signifie que la démarche "devra s'assurer la mobilisation politique et sociale la plus large". Il la veut "ordonnée", en ce sens qu'elle "devra agencer ses priorités en distinguant l'essentiel du secondaire et entre le plus et le moins pressant", alors qu'il la conçoit "pacifique", tant elle "devra avoir pour mot d'ordre le dialogue politique comme moyen de sa réalisation". "Je ne reconnais pas les résultats annoncés" Benflis a usé de mots très durs pour disqualifier les résultats de la présidentielle du 17 avril. "Le scrutin d'hier n'en était pas un (...) je ne reconnais pas les résultats de ce scrutin sinon je serais complice de la fraude... Il n'y a pas eu d'élection hier", a-t-il entonné dans une salle archicomble scandant "Ulach smah ulach" ou encore "Benflis, président". Tout en assurant qu'il contestera ces résultats par "toutes les voies politiques et légales", Benflis a estimé que "c'est la fraude qui a parlé au moment même où le peuple algérien était, une fois encore, bâillonné". "Le 17 avril, il y a eu distribution des voix de la part de l'administration. Certains ont été récompensés. D'autres sanctionnés", a-t-il déploré avant de rappeler que son "projet de renouveau national" a eu "un large soutien". Sur le même ton acerbe, il fera remarquer que "contrairement au candidat du pouvoir, absent, mon projet a eu un large soutien des Algériens. Je n'ai été ni vaincu ni battu le 17 avril. Si cette élection avait été transparente, j'aurais accepté le vote. Les résultats annoncés ont été préparés et planifiés par l'alliance de la fraude, l'argent sale et une certaine presse instrumentalisée. C'est la vérité". Pour démontrer la préparation en amont de la fraude, Benflis évoque l'attribution "des portefeuilles ministériels-clés aux proches du président Bouteflika. L'annonce de la candidature de Bouteflika par le Premier ministre devenu son directeur de campagne, le parti pris du Conseil constitutionnel ayant accepté la candidature d'une personne qui ne répond pas aux conditions requises pour être éligible à ce poste, notamment la présentation d'un certificat attestant de la bonne santé physique et mentale pour le candidat à la présidentielle". Aux yeux de Benflis, l'importance de la fraude a été telle que "même Staline n'aurait pas fait mieux". Ce trucage des urnes décrédibilise d'entrée le Président élu, estime encore Benflis pour qui "la fraude entame gravement la légitimité de celui qui en bénéficie. Le bénéficiaire principal de cette fraude est au vu et au su de tout le monde dans l'incapacité d'assumer les hautes charges nationales". Dès lors, il considère que "c'est donc une gestion par délégation de la République que notre pays et notre peuple vont désormais connaître". Tout en la décriant et la dénonçant à la fois, l'intervenant pense que "cette situation inédite est d'une gravité extrême. Elle n'est ni acceptable ni tolérable. Elle exige une réaction patriotique de toutes les forces politiques et sociales soucieuses des intérêts vitaux de notre grand peuple et de la grandeur de notre patrie. Il s'agit ici d'une résistance populaire qui doit s'exprimer". N. M Nom Adresse email