Pour la nouvelle ministre de l'Education nationale, la réforme lancée en 2003, qui a été appliquée "en rangs dispersés", nécessite aujourd'hui une révision qui se fera via "la refonte de la pédagogie". Les textes existent, il suffit juste de les appliquer, notamment pour la création de l'observatoire national de l'éducation et de la formation. Epreuve réussie et avec une bonne mention pour la nouvelle ministre de l'Education nationale qui a fait montre d'une maîtrise totale de son département. La première sortie médiatique de Nouria Benghebrit-Remaoun, après quelques jours de sa nomination au sein de l'Exécutif, a été très positive. Sa prestation face aux directeurs de l'éducation, des partenaires sociaux et autres intervenants du secteur redonne réellement le souffle et laisse nourrir l'espoir d'une réforme fiable du système éducatif tant décrié. C'est une spécialiste sûre d'elle et surtout maîtrisant parfaitement son sujet qui a présidé, hier, les travaux de la conférence nationale des directeurs de l'éducation. Mme Benghebrit était dans son élément et aucun des autres responsables du département ne lui a fait de l'ombre et n'a été contraint de venir à la rescousse pour répondre à la moindre question. La ministre, qui a eu du pain sur la planche durant toute la journée d'hier : passage à la Chaîne III à l'émission "L'Invitée de la rédaction", ouverture des travaux de la conférence et premier point de presse, a véritablement réussi à capter l'attention et à convaincre. Elle y a laissé une bonne impression. Une impression et une évaluation des plus positives, y compris du côté des partenaires sociaux qui n'ont pas caché leur optimisme, qui donne du baume au cœur. L'assurance, la maîtrise du secteur, la grande volonté affichée pour redresser le système éducatif via l'implication de tous les partenaires, les premiers constats et le franc-parler de la nouvelle ministre poussent à croire que le département a enfin trouvé le responsable qu'il faut. En un mot, la première impression redonne espoir et augure d'une nouvelle ère, mais toujours est-il attendons l'application pour confirmer le premier "jugement". Et comme le pensent tout bas nombreux observateurs, il faut désormais espérer que le gouvernement, voire les autorités donnent carte blanche à cette spécialiste en sociologie de l'éducation et la laisse travailler. D'autant que Nouria Benghebrit, connue pour ses nombreuses recherches et écrits dans le domaine, arrive au département de l'Education nationale avec un constat déjà fait et une vision générale du secteur. Questions : y a-t-il une nouvelle feuille de route ? Que fait-on des mesures déjà annoncées ? Faut-il réformer la réforme ? Comment redonner à l'école sa vocation initiale ? Faut-il tout changer ou poursuivre ce qui a été commencé ? Qu'en sera-t-il du seuil des cours au bac et de la triche ? À toutes ces interrogations et tant d'autres vu la complexité et la sensibilité du secteur, la ministre a apporté des réponses concrètes lors de ses différentes interventions, à savoir l'allocution d'ouverture de la conférence, le point de presse et la Chaîne III. Première chose à retenir : même si elle ne l'a pas dit ouvertement, les déclarations de la ministre laissent croire que le problème du système éducatif n'est pas l'échec de la réforme, mais sa non-application ou sa mauvaise application. "Les textes existent, il faut juste les appliquer et avoir la volonté de le faire et moi, cette volonté je l'aie", martèle la ministre. Cette dernière expliquera que "la réforme engagée en 2003 dans la précipitation et en rangs dispersés, mais la responsabilité du non-aboutissement de celle-ci dans toute sa pertinence est partagée. Même les enseignants et les inspecteurs à l'époque n'ont pas été formés, mais découvraient les nouveaux programmes à la rentrée". Mais "il n'y a aucun mal à revoir cette réforme au bout de dix ans de mise en œuvre car c'est un processus qui est appelé à être corrigé". Refonte pédagogique, recherche, formation continue et gouvernance Et la correction ne semble pas très compliquée pour Benghebrit. "La réforme, ce n'est pas un listing d'actions à appliquer", mais un processus à engager par la refonte de la pédagogie, et ce, à l'issue d'une concertation avec tous les partenaires du secteur. Les pédagogues, à leur tête les enseignants, auront le dernier mot sur cette refonte. Et la refonte pédagogique, qui est la priorité de la remplaçante de Baba Ahmed, "nécessitera la redynamisation de la commission nationale des programmes qui deviendra conseil national de la pédagogie et de la formation". Pas question de tout effacer, "ce serait grave", mais poursuivre le chemin parcouru en y apportant sa propre touche. Et cette touche, c'est la cohérence et le sens de la refonte qui doit reposer sur l'élève qui doit revenir au centre des préoccupations. Le plan d'action qui sera soumis au gouvernement sur la base de l'évaluation d'étape déjà engagée par les cadres du secteur axera la réforme sur trois paliers : la refonte pédagogique, son accompagnement par la recherche et la ressource humaine sans laquelle rien ne peut se faire et qui ne peut réussir sa mission sans la formation. La priorité sera donc axée aussi sur la formation des enseignants, des formateurs et tous les cadres du secteur. La ministre insiste aussi sur la gouvernance à partir de l'amélioration de la gestion dans une démarche participative. Tous les syndicats et associations de parents d'élèves doivent s'y impliquer. Le seuil porte atteinte à la réputation du bac La réforme des examens passe par cette question récurrente du seuil des cours pour le baccalauréat. Selon toute vraisemblance, 2014 sera la dernière année où les cours ont été limités pour les candidats. La ministre n'en semble pas du tout satisfaite. "Le seuil porte atteinte à la réputation de cet examen qui mobilise une partie importante des ressources financières et matérielles de l'Etat. Il a été dicté dans des conditions particulières : des grèves difficiles en 2008 et qui ont coïncidé avec l'application de la première version réforme." Question : quelle est la crédibilité du bac quand les cours sont limités ? "Sans démagogie aucune, cela a des incidences. Le taux d'échec important en première année à l'université prouve que le seuil a une incidence sur les candidats. La note ne correspond plus à ce qui est attendu en termes de compétence et de capacité, et c'est devenu une machine à répétition. Ce qui intéresse les parents et la société, c'est de préparer nos élèves à la maîtrise des outils de la pensée." La solution ? Proposer de nouvelles alternatives qui ont été déjà annoncées, à savoir des épreuves anticipées, la fiche de synthèse... Les nouvelles mesures seront débattues lors des assises de l'éducation prévues en juillet prochain. Les candidats de Ghardaïa ont achevé le programme La ministre, le directeur de l'éducation de la wilaya de Ghardaïa et le chef de cabinet ont coupé court aux "rumeurs" faisant état du non-achèvement des programmes à Ghardaïa. Pour Mme Benghebrit, "le seuil défini par le MEN est la résultante d'une large consultation de toutes les wilayas". Abondant dans le même sens, M. Hedouas dira : "J'étais en contact quotidiennement avec la DE de la wilaya pour des orientations." Le DE, de son côté, révélera que "toutes les mesures ont été prises pour ne pas interrompre la scolarité des candidats au bac des deux communes touchées par les incidents. Le bac est une ligne rouge à ne pas franchir. Les candidats ont été scolarisés dans d'autres quartiers et ont achevé le programme à hauteur de 85%." La fraude au bac 2013 est "un grave indicateur" Abordant la tricherie collective qui a entaché le bac 2014 et les incidents de Constantine après l'annonce des résultats, la ministre soulignera que "cette tricherie est extrêmement triste car c'était une première dans le secteur. C'est un indicateur grave et puissant qui renseigne sur la place de l'autorité". Pour Mme Benghebrit, "il faut vraiment comprendre et analyser ce message et voir comment on en est arrivé là". Pour un pacte avec les syndicats S'engageant à ouvrir la concertation et le dialogue avec tous les partenaires sociaux qu'elle compte recevoir prochainement, la ministre a lancé un appel pressant "pour un pacte" en leur direction afin d'éviter les grèves qui déstabilisent le secteur. "Il faut que l'élève soit la force du lien qui lie la ministre à ses partenaires sociaux. S'il y a un secteur où l'engagement de la responsabilité doit être primordial, c'est bien celui de l'éducation. Soyez responsables car l'enjeu est fondamental. Donnez-nous du temps car si vous faites la grève, nous ne pourrons pas travailler et on va s'occuper des négociations." Les syndicats présents, dont la majorité nous ont fait part de leur "optimisme" et de leur "impression positive", se disent prêts à prêter main forte à la ministre, mais il faudrait qu'elle veille à l'application des engagements pris et énoncés dans les PV. M B Nom Adresse email