Un immense travail attend les spécialistes dans le domaine de la sauvegarde du patrimoine matériel et immatériel. Cependant, cette prise en charge et ce chantier tardent à venir. L'oubli et la détérioration, hélas, n'attendent pas ! Selon l'Unesco (Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture), le patrimoine culturel immatériel regroupe la tradition orale, les arts du spectacle et les rituels. Nous pouvons partager des expressions culturelles qui ont été transmises de génération en génération, ont évolué en réponse à leur environnement et contribuent à nous procurer un sentiment d'identité, d'appartenance et de continuité. Il y a des choses qu'il est important de préserver pour les générations futures. Leur importance peut tenir à leur valeur économique ou à une certaine émotion qu'elles éveillent en nous, ou encore au sentiment qu'elle nous donne de notre appartenance à quelque chose – un pays, une communauté, une tradition, un mode de vie. Il peut s'agir d'objet qui tient dans la main, comme de bâtiment à visiter, de chansons à chanter ou d'histoire à raconter. Le patrimoine immatériel, bien que fragile, est un facteur important du maintien de la diversité culturelle. Le patrimoine immatériel dépend de ceux dont la connaissance des traditions, des savoir-faire et des coutumes est transmise au reste de la communauté de génération en génération. En Algérie, considérée comme pays des contrastes, la richesse en matière de patrimoine immatériel est mondialement connue. Dans le pays chaoui (le grand Aurès), ce patrimoine [le conte chaoui, le proverbe, la tradition orale (chant), les jeux traditionnels...] trouve refuge dans les zones rurales, recluse surtout. En effet, le mérite ne revient point aux grandes agglomérations où, pourtant, existent de grandes infrastructures culturelles (maisons de culture, maisons de jeunes...), censées répertorier et protéger ce patrimoine. Selon le professeur Hadad Mostefa (chercheur associé des organismes en Afrique du Nord et en France, professeur à l'université de Batna), l'urbanisme sauvage et sans planification ainsi qu'un exode rural effréné menaçaient et menacent encore des pratiques ancestrales qui n'étaient de simples jeux de société, mais un vrai ciment social, car souvent ces pratiques se font en groupe, ce qui renfonce le sentiment d'appartenance au groupe et chasse l'exclusion. Et d'ajouter : "La transition rapide entre ruralité et urbanité risque de faire perdre à nos sociétés leur identité culturelle, ce qui est vraiment dommage. Ce patrimoine culturel immatériel inclut les traditions orales, les arts du spectacle, les pratiques sociales, les rituels et les événements festifs, les connaissances et pratiques concernant la nature et l'univers et les savoir-faire liés à l'artisanat traditionnel, qui sont protégés par l'Unesco. A titre d'exemple, le jeu ilakafen est fort heureusement encore pratiqué par les petites filles dans les villages, ou encore le jeu hakourth que les Auressiens pratiquent encore à travers les Aurès. On a constaté par ailleurs que dans l'Aurès occidental, plus précisément à Menaâ, ce même jeu est réservé à la gent féminine." Pour rester vivant, le patrimoine immatériel doit conserver sa pertinence et être régulièrement pratiqué et appris au sein des communautés et d'une génération à l'autre, ce qui n'est pas toujours le cas, nous confirme Djamel Nahali, maître assistant en linguistique amazighe et chercheur en toponymie des Aurès. Le chercheur déclare : "Le patrimoine immatériel touche une grande diversité, tels le conte, les coutumes, la langue, la littérature, mais aussi et surtout la toponymie qui est une véritable mémoire. En effet, en plus de nommer et de décrire les paysages en inscrivant des marques visuelles dans les noms attribués, il y a aussi l'habitude de nommer les territoires en commémorant les souvenirs de personnages importants et des lieux de mémoire. A titre d'illustration, la variété des toponymes traduit entre autres la diversité des pratiques humaines, sociales et culturelles, ancrée dans une profonde unité attestant de la permanence du fait historique et de l'appartenance amazighe depuis des millénaires." Si rien ou presque rien n'a été fait d'une manière concrète par les établissements et structures pour la sauvegarde de cette richesse, l'effort individuel ou du groupe reste comme un salut pour cette richesse. A titre d'exemple, la réédition d'un ouvrage sous le titre Le conte chaoui des Aurès, ou mieux encore la réalisation et édition d'un recueil de proverbes chaouis (Inzan t'achawit) où plus de 1000 proverbes du grand Aurès sont regroupés. Concernant l'ouvrage, l'enseignant Uydir Salah nous fait remarquer que le travail s'est fait presque dans l'urgence pour sauver ce legs, mais aussi et surtout il concerne tout l'Aurès et pas uniquement une région, ce qui lui a donné une grande diversité. R H Nom Adresse email