Le long-métrage a été projeté, pour la presse dimanche matin à la salle Ibn Zeydoun (Riadh El Feth), et en avant-première durant la soirée. Dans ce film, cet objet d'art, Tariq Teguia met en lien les luttes d'individus aspirant à la liberté et esquisse une réflexion sur une sorte de «mondialisation des luttes» dans un monde d'injustices. Si la liberté est complexe et indéfinissable, le désir de liberté sommeille en chacun d'entre-nous. On ignore ce qui peut le réveiller : un mot, une phrase, un regard. Pour le journaliste Ibn Battutâ (Fethi Ghares), ce sera un mot, «Zendj», prononcé par un jeune qu'il a rencontré lors d'un reportage qu'il réalisait pour un quotidien algérien sur les affrontements communautaires à Ghardaïa. «Zendj» –qui renvoie à la révolte d'esclaves au IXe siècle à Bassora en Irak, contre le pouvoir des Abbassides– sera le déclic, le début d'une quête initiatique, qui mènera Ibn Battutâ sur les traces de ce mouvement. Le journaliste, intriguée par le propos du jeune et ne sachant pas exactement ce qu'il cherche à comprendre, formulera une demande auprès de sa rédaction pour se rendre en Irak, mais il sera envoyé à Beyrouth (Liban), «ville qui incarna toutes les luttes et les espoirs du monde arabe». A Beyrouth, Ibn Battutâ rencontrera Nahla (Diyanna Sabri), une exilée palestinienne en Thessalonique (Grèce) qui se rend dans la capitale libanaise pour apporter de l'argent récolté auprès d'étudiants anarchistes grecs, et ce, pour soutenir la cause palestinienne. Ibn Battutâ et Nahla, hantés par des fantômes (du passé et du présent) se croisent, se recroisent et déambulent dans une ville de contrastes. Alors que l'histoire s'écrit au présent, notamment celle des étudiants grecs qui organisent leur mouvement, Ibn Battutâ plonge dans le passé, celui de révolte des Zendj pour tenter de comprendre le monde dans lequel il vit ainsi que le concept de révolution qui a traversé les siècles et les âges mais qui a toujours pour seul moteur la liberté. Nahla, de son côté, tente de savoir qui elle est et ce qu'elle doit faire de son héritage familial. Pendant ce temps, les véritables décideurs, ceux dont les ambitions sont façonnées par l'argent, essaient de redessiner une nouvelle cartographie du monde, en prenant en compte la colère qui monte, sans pour autant négliger leurs intérêts. «Revolution Zendj», dont les premières images ont été tournées en novembre 2010 à Athènes, propose plusieurs écrans sur le monde, raconte plusieurs histoires dans plusieurs territoires, tout en formulant une question relative à «la mondialisation des luttes». «L'enjeu de ce film c'était de mettre en lien, en liaison les combats des uns et des autres, les luttes ici et là et pour montrer que ce qui se passait d'un côté de la méditerranée ça concernait aussi le nord, que les questions qui se posaient au sud de se posaient aussi au nord de la Méditerranée. Un entrecroisement de lignes avec la volonté comme dans ‘Inland' de dessiner une carte, une carte des tensions, une carte des résistances, une carte des échecs aussi. Le film essayait de donner une réponse possible à la mondialisation en cours, celle du marché évidemment, mais on s'est posé la question de savoir s'il n'y avait pas une mondialisation des luttes», a expliqué Tariq Teguia, qui a également signé le scénario de «Revolution Zendj», son troisième long-métrage (après «Roma wela ntouma» et «Gabbla» ou «Inland»). Concernant la relation entre la révolution Zendj et les foyers de révolte dans le monde aujourd'hui, le cinéaste signalera qu'«il faut voir en le modèle de la révolution Zendj comme un paradigme des luttes ancestrales qui perdurent, qui persistent, dont les visages changent, fantomatiques certes mais toujours là, toujours à réinventer». Pour lui, «il s'agissait de filmer aussi des obstinations». Outre les clins d'œil et les références artistiques (selon le réalisateur, ce sont des «rappels, des branchements entre les formes et les mouvements artistiques»), la belle image qui traduit tout le désarroi des personnages et leur effondrement qui rappelle (et interpelle sur) celui du monde, «Revolution Zendj» réfléchit sur les mécanismes de la révolution et sur le sens à lui donner dans le contexte actuel. Mais les luttes d'hier ne sont pas si différentes de celles d'aujourd'hui. S.K Légende photo : Scène du film «Revolution Zendj» de Tariq Teguia. Nom Adresse email