Cette participation, qui continue à faire jaser de part et d'autre de la Méditerranée, n'a pas encore livré les motivations politiques qui la sous-tendent. Le fait est sans doute inédit : trois soldats algériens ont paradé hier sur la célèbre avenue parisienne des Champs-Elysées, en compagnie de soldats de plusieurs autres nations, dans le cadre des festivités du 14 Juillet qui célèbrent, cette année, le centenaire de la Première Guerre mondiale. Une première pour ce qu'elle représente comme symbolique et au vu du contentieux mémoriel, loin d'être soldé, qui continue de rythmer les relations algéro-françaises. Cette participation, qui continue à faire jaser de part et d'autre de la Méditerranée, n'a pas encore livré les motivations politiques qui la sous-tendent. S'agit-il d'une réelle volonté de transcender les aléas de la guerre des mémoires ? D'une volonté d'aller vers une normalisation des relations ? Ou alors le fruit de quelques considérations politiques ? Pour le président de la République, à l'origine, sans doute, de cette décision de participation, la France vient de faire preuve de reconnaissance aux sacrifices du peuple algérien et il salue l'hommage qu'elle leur a rendu. "En décidant de rendre hommage aux milliers de victimes algériennes de la Première Guerre mondiale, à l'occasion de ces célébrations du 14 Juillet, vous avez su, M. le président, reconnaître les sacrifices du peuple algérien et son attachement aux idéaux de liberté qui lui ont permis de recouvrer chèrement son indépendance et sa souveraineté et de participer au recouvrement de la liberté du peuple français", a écrit le président Bouteflika dans un message adressé à François Hollande. "Cette reconnaissance des sacrifices du peuple algérien nous conforte dans notre élan partagé de construire, entre nos deux pays, un partenariat d'exception qui répond à nos intérêts mutuels et aux attentes de nos deux peuples", se réjouit-il. Selon lui, Alger et Paris ont su dépasser les clivages liés à la mémoire depuis la venue, en Algérie, du président Hollande. "Depuis votre visite d'état en Algérie, en décembre 2012, nous avons su éviter les clivages suscités par un passé douloureux, en ouvrant tous les dossiers liés à la mémoire commune de nos deux peuples, dans un esprit constructif qui, j'en suis certain, permettra de consolider nos relations dans tous les domaines", a indiqué Abdelaziz Bouteflika. Mais si Bouteflika trouve là un motif de satisfaction, évitant au passage de faire allusion à la "repentance", ou encore "aux demandes d'excuses" réclamées par certains, comme la puissante Organisation nationale des moudjahidine, visiblement tenue à l'écart des discussions ayant conduit à cette participation et qui se mure dans un silence embarrassé, tel n'est pas le cas de certains partis politiques encore réfractaires à l'idée d'une normalisation avec l'ancienne puissance coloniale en dehors du règlement du contentieux mémoriel. "Les Algériens ayant pris part aux Deux Guerres ne l'ont pas fait en tant que Nation souveraine ou de leur propre gré. Ils y ont été forcés. Des militaires algériens n'ont pas à se montrer aux côtés de Français qui refusent la repentance, alors qu'ils la demandent aux Turcs pour les Arméniens", affirmait encore récemment le leader du MSP, Abderrezak Makri. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, le FLN et le RND, les deux béquilles du pouvoir, ont dit "comprendre" et "approuver" la décision de participation. "L'Algérie a besoin d'apaiser ses relations avec son environnement", soutient Saïd Bouhadja du FLN, non sans observer une certaine évolution des relations depuis l'arrivée des socialistes au pouvoir qu'illustre la reconnaissance par François Hollande des massacres du 17 Octobre. "Le président, des ministres et des responsables se font soigner en France, leurs secrets médicaux sont entre les mains des Français tout comme des secteurs économiques importants... Pourquoi cette sensibilité à la participation d'officiers algériens aux cérémonies ? La dénonciation et la condamnation ne sont que surenchère et hypocrisie", soutient, de son côté, Mohamed El-Korso, l'ex-président de la fondation du 8-Mai-1945. Mais cette polémique n'est-elle pas née de l'absence de transparence dans la gestion d'un dossier aussi sensible ? "Ce qui choque le plus, ce sont nos partenaires qui nous informent et qui nous donnent les arguments. Il y a un déficit en communication et un manque de respect à l'opinion. C'est la participation en catimini qui a provoqué ce débat", estime l'ex-ministre et diplomate, Abdelaziz Rahabi. "La participation en soi ne gêne pas car il faut arriver un jour à une normalisation des relations, mais ce qui choque, c'est la gestion de cette question sensible", dit-il encore. Pour lui, cette gestion est l'expression d'un pouvoir personnel. "Bouteflika a fait ça tout seul. Les moudjahidine n'ont pas été informés. Ce sont des décisions qui sont l'expression du pouvoir." Décidée en mai dernier, la participation de l'Algérie n'a été confirmée par Lamamra que la semaine dernière. K K Nom Adresse email