Les membres de la CNLTD ont eu la bonne idée de mettre de côté leurs divergences idéologiques pour se consacrer à l'essentiel : aller vers une période de transition et donner au peuple algérien, pour la première fois, la possibilité de choisir librement ses représentants. C'était sans doute le fait politique majeur de l'après-présidentielle : le 10 juin dernier à Zéralda (Alger), une conférence sur la transition a été organisée par la Coordination nationale pour les libertés et la transition démocratique (CNLTD) regroupant cinq partis (Ennahda, FJD, Jil Jadid, MSP et RCD) et l'ancien chef de gouvernement Ahmed Benbitour, avec à la clé une participation record de près de 500 personnalités algériennes. Un succès dont la portée politique a été soulignée, à juste raison, par les professionnels des médias comme par les observateurs avertis, surtout que cette initiative inédite venait de réunir autour d'une même table, pour la première fois depuis l'Indépendance du pays, toutes les sensibilités politiques du pays (laïcs, islamistes et "nationalistes''), voire des personnalités qui, par le passé, se regardaient en chiens de faïence quand elles ne s'échangeaient pas des amabilités. Un des animateurs de la CNLTD, Abderrazak Makri, a eu d'ailleurs à qualifier cette rencontre d'"historique". Elle est, expliquait-il, de nature à "améliorer la mauvaise image collée à l'opposition par le pouvoir", mais aussi à "ouvrir l'ère des libertés réelles en Algérie". Mieux, d'aucuns n'ont pas hésité à parler de tournant décisif dans la vie politique algérienne. Le monopole de l'initiative des tenants du système a été sérieusement malmené et l'opposition a, depuis, enfilé le costume d'acteur crédible, voire d'alternative sérieuse, capable de lancer des actions majeures à même d'influer sur le cours des événements. Autre fait qu'il convient de souligner : la participation du pôle du changement, mené par Ali Benflis, qui a lui-même pris part à cette conférence. Il est vrai qu'il avait mis en avant certaines "divergences de vue" avec la Coordination, mais la Conférence nationale sur la transition a fini par s'imposer comme un cadre crédible et unitaire, voire incontournable, pouvant déboucher sur une démarche consensuelle de sortie de crise. Cette prouesse de l'opposition est d'autant remarquable qu'elle intervient au lendemain de la réélection, dans les conditions que l'on sait, du candidat du système, Abdelaziz Bouteflika, pour un quatrième mandat. Par le passé, au sortir d'une élection majeure comme la présidentielle, les partis d'opposition, après avoir tiré le dernier baroud d'honneur en dénonçant la fraude, se repliaient dans leurs antres et se morfondaient dans la léthargie. Les membres de la CNLTD, eux, ne s'étaient pas laissé abattre par le plébiscite du chef de l'Etat. Ils ont, au contraire, fait preuve de pugnacité et de persévérance. La présidentielle pliée, ils s'étaient vite remis au travail en multipliant les réunions tout en produisant une plateforme politique de onze points. C'est là, il est vrai, le signe d'une maturité politique qui est, à n'en point douter, le fruit des échecs passés, mais aussi d'un patient travail de rapprochement de près d'une année. Question : comment l'opposition a-t-elle réussi cette fois-ci à préserver l'unité des rangs et à faire échec aux tentatives de déstabilisation ? Les membres de la CNLTD ont eu la bonne idée de mettre de côté leurs divergences idéologiques pour se consacrer à l'essentiel : aller vers une période de transition qui passera nécessairement par la mise en place de conditions politiques et juridiques d'une compétition saine et loyale qui puisse donner au peuple algérien, pour la première fois, la possibilité de choisir librement ses représentants. Autre facteur qui a permis à l'opposition de sauvegarder son unité : l'autisme permanent du pouvoir qui ne lui a laissé d'autre choix que celui de resserrer ses rangs pour mieux se faire écouter. La bataille de la crédibilité plus que jamais gagnée, il reste à la CNLTD de transformer l'essai. C'est-à-dire ramener les tenants du système à la table des négociations pour sortir le pays de la crise dans laquelle il s'est englué et l'engager sur de bons rails. Un gros chantier, en somme. A. C. Nom Adresse email