C'est une action qui fera certainement date : des partis et personnalités de divers courants politiques, dépassant leurs divergences idéologiques, se retrouveront à Alger pour débattre de la situation d'une Algérie enlisée depuis plusieurs années dans une crise aiguë et, surtout, dégager des perspectives. En tout et pour tout, ce sont quelque 500 personnes qui prendront part à la conférence nationale initiée par la Coordination nationale pour les libertés et la transition démocratique (CNLTD) qui se tient aujourd'hui à l'hôtel Mazafran (Alger). Presque tout le gratin de la vie politique algérienne assistera à cette rencontre que d'aucuns présentent, d'ores et déjà, comme le congrès de l'opposition : des personnalités de premier plan (Mokrane Aït Larbi, Abdenour Ali Yahia, Mohamed Mechati, Saïd Sadi, etc), d'anciens chefs de gouvernement (Ali Benflis, Sid-Ahmed Ghozali, Mouloud Hamrouche et Mokdad Sifi), des ex-ministres comme Ali Benouari – il était candidat à la candidature pour la dernière présidentielle — qui venait de confirmer sa participation pour remettre sur la table l'essentiel des idées défendues pendant sa précampagne et même d'anciens dirigeants de l'ex-FIS à l'image de Ali Benhadj, de Abdelkader Boukhemkhem, Ali Djeddi. La rencontre, qui s'ouvrira vers 13 heures, sera gérée par un bureau qui, selon une source proche de la CNLTD, sera constitué de 3 membres (l'ancien chef de gouvernement Ahmed Benbitour, l'avocat et président de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (Laddh) Me Salah Dabouz et une universitaire). Après explicitation du projet de la CNLTD et la lecture de sa plateforme politique rendue publique fin mai dernier, un débat sera ouvert et chaque participant aura droit à une intervention de 7 minutes. Une commission sera ensuite mise en place pour recueillir et synthétiser les propositions des uns et des autres. Indépendamment des résultats sur lesquels débouchera cette grande messe démocratique, sa tenue en elle-même est à considérer comme un exploit. Pour la première fois depuis l'indépendance du pays — hormis la réunion de San Egidio (Rome, 1995) —, des acteurs politiques de différentes chapelles, longtemps adversaires car otages de leurs a priori idéologiques, ont décidé de solder les comptes du passé pour se consacrer à la construction d'une perspective d'avenir pour le pays. Ce qui dénote, à coup sûr, d'une maturité politique certaine et d'une grande prise de conscience quant aux enjeux cruciaux auxquels fait face l'Algérie. C'était en juin 2013, à l'occasion de la convention nationale du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) pour une Constitution pérenne, que le rapprochement entre ce parti démocrate et des partis islamistes comme le Mouvement pour la société de la paix (MSP) et Ennahda avait eu lieu. L'idée de réunir l'ensemble des partis d'opposition est alors née. L'objectif principal était d'impulser une dynamique de changement radical mais pacifique, c'est-à-dire par la voie des urnes. L'on s'était alors mis à exiger les conditions pour la tenue d'une élection présidentielle propre et transparente et l'on avait réussi à rallier à cette cause d'autres partis et personnalités, baptisée groupe des 19, qui, à l'occasion d'une conférence de presse tenue en novembre 2013 à Alger, avaient posé deux préalables (de la révision constitutionnelle pour l'après-présidentielle et l'installation d'une commission nationale indépendante pour superviser les opérations électorales lors de ce scrutin) à même d'assurer une compétition loyale lors de la présidentielle d'avril 2014. Face à l'autisme des tenants du pouvoir qui avaient alors ignoré leurs doléances, un front du boycott de la présidentielle avait alors vu le jour. Au sortir d'une présidentielle qui est une pâle copie des précédentes élections, les animateurs de ce front, comme confortés dans leurs analyses, ont passé la vitesse supérieure en exigeant une période de transition pour, expliquent-ils, sauver le pays d'une désagrégation certaine. C'est ainsi qu'ils ont rendu publique, fin mai dernier, une plate-forme politique. Et les ralliements du FJD d'Abdallah Djaballah, en février dernier, et du FFS, début juin, à la cause de la CNLTD ne fera que conférer davantage de consistance et de légitimité à la revendication d'une transition démocratique et consensuelle. A. C. Nom Adresse email