L'Arabie Saoudite reconnaît qu'elle n'a aucune emprise sur les organisations caritatives du royaume, qui brassent “des montants massifs d'argent”, dont elle ignore la destination. Après les accusations portées par des institutions du renseignement américain contre le royaume saoudien sur le financement du terrorisme, ce dernier réagit par le biais du conseiller diplomatique du prince héritier Abdallah interrogé par la chaîne d'information CNN. Il s'est contenté de minimiser les assertions, tout en reconnaissant qu'“un certain nombre d'organisations caritatives n'avaient pas suffisamment de mécanismes de contrôle”. “C'est une carence à laquelle nous avons remédié”, a-t-il ajouté. Riyad fait donc son mea culpa et affirme qu'il existe effectivement des problèmes dans le fonctionnement des organisations caritatives islamiques. Mieux, les autorités saoudiennes s'apprêteraient même à annoncer, dans les prochains jours, de nouvelles mesures plus strictes de contrôle et d'audit. Des dizaines de millions de dollars de fonds saoudiens ont pu avoir été mal affectés, a reconnu un responsable à Riyad, sous le couvert de l'anonymat. “Nos organisations charitables ont engrangé des montants massifs d'argent liquide, sans avoir aucune idée sur la destination de cet argent. Ce que l'on a là, c'est une fraude massive au nom de la religion”, a précisé l'interlocuteur de la revue Newsweek. Des organisations en Bosnie et en Somalie ont été carrément fermées par l'Arabie Saoudite, qui affirme avoir transmis les noms des responsables, actuellement en fuite, à l'ONU. Il y a lieu de rappeler les accusations portées à l'encontre de la princesse Haïfa Al-Fayçal, épouse de l'ambassadeur saoudien à Washington. Des paiements tirés sur les comptes bancaires de cette dernière avaient abouti entre les mains d'associés de deux terroristes impliqués dans les attentats du 11 septembre. Devant tous ces faits, Washington se retrouve dans une position très délicate, en raison des rapports très étroits qui la lient à Riyad. Craignant des effets négatifs sur les relations diplomatiques bilatérales entre les deux parties, les responsables américains ont tempéré l'ardeur de leurs enquêteurs en leur demandant de faire preuve de prudence dans leurs investigations. Ainsi, une déclaration destinée à la justice, par le FBI, qui détaillait un montant de 450 000 dollars de transferts reçus par l'Internationale du secours islamique (IIRO) a été expurgée de toute référence à l'Arabie Saoudite. L'information rendue publique parlait d'une ambassade d'un gouvernement étranger. La protection qu'accordent les Etats-Unis à l'Arabie Saoudite freine toutes les enquêtes en ce sens, même si un responsable américain a déclaré : “Les Saoudiens nous aident plus qu'avant… mais pas autant que nous le voudrions.” Selon des parlementaires américains, le Congrès pourrait réduire l'aide militaire accordée à Riyad et limiter les visas aux citoyens saoudiens, si l'Arabie Saoudite ne sévit pas contre ses ressortissants accusés de financer le terrorisme. Jusqu'à quand durera l'absence de réaction énergique du côté de Washington ? Tout dépendra de l'importance de ses intérêts avec la péninsule arabique. K. A