Très attendu, le procès devant opposer le ministère de la Défense nationale (MDN) au directeur du quotidien Le Matin, Mohamed Benchicou, en prison depuis le 14 juin dernier, ainsi qu'à la journaliste Abla Chérif a été reporté au 9 novembre prochain, a-t-on appris, hier, auprès de leurs avocats. Un report qui a été diversement apprécié. Selon l'éminent juriste Mohand Issad, ce renvoi constitue “un déni de justice”. “Il n'est pas normal qu'un procès prévu à une date fixe soit renvoyé à une date ultérieure sans explication”, a-t-il affirmé. L'avocat Miloud Brahimi, lui, en revanche, y entrevoit une volonté d'apaisement : “Je crois que c'est une chose positive car elle me semble indiquer une volonté d'apaisement de la part du pouvoir.” “Elle a été exprimée, a-t-il ajouté, par le ministre de la Communication Haïchour, lors de la récente rencontre avec les éditeurs de presse.” “Le pouvoir manifeste ainsi, pour la première fois depuis longtemps, sa volonté de dialoguer, une volonté qu'il faut accueillir positivement”, a-t-il encore estimé. Cet optimisme est cependant tempéré par quelques griefs à l'endroit de la presse écrite. Aussi, l'avocat a exhorté les professionnels des médias à “faire preuve de disponibilité pour le dialogue tout en évitant l'affrontement”. Pour rappel, le procès porte sur les témoignages des jeunes torturés de T'kout rapportés par le quotidien Le Matin, que l'institution militaire a considéré comme “diffamation” et “outrage à une institution officielle”. Le directeur du quotidien est aussi poursuivi dans la même affaire pour une chronique consacrée aux évènements de T'kout. Mohamed Benchicou est accusé d'avoir “porté atteinte à l'honneur des moudjahidine”. Reste maintenant à savoir ce que charrie ce report. S'agit-il d'une volonté réelle chez les autorités, visiblement acculées par la mobilisation qui s'amplifie chaque jour au plan national et international en faveur de la libération des journalistes emprisonnés, de lâcher du lest ou, a contrario, une manœuvre destinée à gagner du temps ? Il serait sans doute prématuré d'y répondre avec précision, mais il semble, cependant, au regard de quelques indices, dont la récente réunion organisée par le ministre de tutelle, que le pouvoir cherche à jouer la carte de l'apaisement. De fil en aiguille, il s'agit en définitive de savoir s'il franchira le Rubicon en libérant Mohamed Benchicou et Hafnaoui Ghoul. M. B.