Le chef du gouvernement a fait cette déclaration à quelques journalistes, en marge de la clôture de la session parlementaire. “Ces jours-ci, vous manquez apparemment de matière ! Et de temps en temps, c'est vous-mêmes qui créez l'événement”, a répondu en substance Ahmed Ouyahia à une question d'un journaliste relative à un probable changement gouvernemental. Il poursuivra en interrogeant le journaliste en question : “Pourquoi voulez-vous un changement gouvernemental ? Vous voudriez qu'on procède à un changement à chaque fois que cela vous chante ?”. Expliquant que les commentaires et les spéculations de la presse sont en grande partie liés à un flagrant manque de communication de la part du gouvernement, le journaliste a donné l'exemple de l'absence de communiqué pour expliquer la défection du général de corps d'armée, Mohamed Lamari, lors de la visite de la ministre française de la défense Michèle-Alliot-Marie. Ouyahia ré-pliquera : "Pourquoi un communiqué ?” “Car, il s'agit d'une question importante”, a précisé le journaliste avant de voir Ouyahia affirmer : “Non ! C'est seulement vous qui vous vous occupiez de cette question”. “Peut-être que Lamari est en vacances, en mission ou alors malade”, a ajouté le chef de l'exécutif, tout en commentant : “parfois, vous (les journalistes) créez des évènements à partir de non-évènements.” Et d'ajouter : “on ne va pas vous suivre dans votre descente à un niveau qui n'est pas celui de l'état.” Le ton acerbe et peu amène du chef du gouvernement, secrétaire général du rassemblement national démocratique (RND) par ailleurs, ne s'arrêtera pas là. Il poursuivra : “il est fini le temps où vous (les journalistes) pensiez faire les nations et où vous pensiez faire l'opinion publique”. “Il est temps que les médias prennent des leçons et mettent les pieds dans l'eau froide !”. Ces déclarations inattendues du premier responsable du gouvernement ont surpris, par ailleurs, l'ensemble des représentants des médias venus couvrir la clôture de la session de printemps de l'APN. Paradoxalement, Boujemaâ Haïchour, le ministre de la communication, qui représente l'interface entre les pouvoirs publics et les médias, a eu un langage plutôt conciliant. Il a exprimé son souhait de voir les journalistes emprisonnés libérés : “j'espère qu'ils sortiront”, a-t-il dit sur un ton rassurant. “J'ai dit lors de ma dernière rencontre avec la presse qu'il ne faut pas pourrir les choses et qu'il faut aller plutôt vers l'apaisement.” “Je suis d'ailleurs là pour aller vers cet apaisement et pour créer des passerelles entre les pouvoirs publics et les médias, tout cela pour rétablir la confiance entre les deux parties”, a-t-il expliqué conciliant. Sur sa lancée, il annoncera la mise sur pied avant la fin du mois en cours d'une commission prélude à l'installation des ateliers d'étude de l'avant-projet de la loi organique sur l'information. Cette structure sera composée, expliquera Haïchour, d'une centaine de journalistes, d'éditeurs, d'imprimeurs, d'universitaires et de spécialistes en information. L'objectif de la mise sur pied de cette entité est de tracer les grandes lignes de l'avant-projet de loi organique sur l'information et du code de l'éthique et de la déontologie. Interrogé sur les raisons de l'immixtion du gouvernement dans l'éthique de la corporation, le ministre a expliqué que son objectif n'est pas d'imposer “quoi que ce soit aux journalistes”. “Nous voulons seulement rajouter la disposition, selon laquelle le conseil de l'éthique pourrait avoir la prérogative de se saisir et de s'autosaisir”, dira-t-il. S'agissant de la carte professionnelle de la presse, Haïchour a indiqué que tout ce qui a trait à cette question sera stipulé dans le statut du journaliste. Pour ce qui est du fonds d'aide à la presse, le ministre a affirmé, en faisant référence au programme du gouvernement, qu'il sera réactivé. N. M.