De 35%, il y a deux années, le nombre d'entreprises publiques déstructurées est passé à 75%. “Avec une croissance encore incertaine, l'économie nationale peine à s'extraire de la morosité qui l'affecte, soulignant par là que malgré de nombreuses dispositions et signaux en faveur de la reprise de la croissance, les problèmes structurels continuent de gripper les principales activités économiques”, note le Conseil national économique et social (CNES) dans son projet de rapport de conjoncture économique et sociale du premier semestre 2002. Le CNES affirme que les dynamiques sectorielles sont de plus en plus déséquilibrées et perdent de leur efficacité. Elles ne sont plus en mesure de pouvoir créer un effet de synergie porteur de croissance. La lenteur qui caractérise la mise en œuvre des réformes économiques renforce le sentiment de l'incapacité de l'économie à se structurer et à faire face à des exigences de redéploiement “nécessaire sinon vital”, souligne le CNES. Il est reconnu, soutient le CNES, que les réformes économiques, à l'image de la privatisation, n'avancent pas vite. Les blocages relevés par le CNES sont dus à la fois au programme de privatisation incohérent sur le plan de la démarche et de la mise en œuvre opérationnelle, au consensus social mou, au manque de conviction de la nécessité de faire avancer les réformes économiques et enfin aux intérêts fortement ancrés sur des surfaces du pouvoir et qui jouent comme facteur de blocage. Résultat : la situation des entreprises publiques se dégrade de plus en plus et d'une façon accélérée. Si 35% des entreprises, note le CNES, étaient déstructurées, il y a deux années, leur nombre a atteint, aujourd'hui, près de 75%. Le conseil économique et social affirme qu'avec la dissolution des holdings, les entreprises publiques ne disposent plus d'un espace opérationnel pour les assister dans la recherche de solutions aux nombreuses contraintes en matière de financement, de régularisation de patrimoine, d'avancement de projet de partenariat, de traitement des actifs dormants dont l'entretien et la sauvegarde sont onéreux. Ce constat, semble-t-il, trouve son explication, selon le CNES, dans l'inexistence des organes statutaires des sociétés de gestion des participations et dans la lourdeur du processus décisionnel. Pour le CNES, les SGP ne sont pas différents des holdings et les nouveaux textes ne permettent pas de clarifier les questions liées aux prérogatives (Qui est propriétaire ? Qui dirige les affaires ?…) et la responsabilité du directoire de la SGP n'est pas bien située. L'évolution de la situation du secteur industriel au cours du premier semestre 2002 et les résultats enregistrés à fin juin 2002 montrent bien le marasme dans lequel se trouve l'entreprise publique, du fait du décalage entre les exigences d'une économie de marché et la réalité du terrain, en matière de mise en œuvre des réformes pourtant entamées depuis plusieurs années. En effet, le secteur industriel a enregistré un recul de l'indice de production du secteur public de – 6,3% par rapport à la même période de 2001, selon les données même du secteur. Le constat du CNES, sur ce plan, est alarmant. Le secteur public est en déshérence. La perte des potentialités et des moyens qu'il subit est énorme. Le retard d'une mise à niveau des entreprises risque de mettre hors course de nombreuses entreprises publiques et privées par rapport à l'importation, dont l'accroissement serait lourd de conséquences. Les hésitations dans la mise en œuvre des décisions de refonte profonde des capitaux marchands hypothèquent le devenir des entreprises publiques comme elles inhibent les initiatives du capital privé national et étranger. Pourtant, sur le plan des finances, l'Algérie ne s'est jamais portée aussi bien. L'évolution monétaire et financière au premier semestre 2002 montre une accumulation substantielle des réserves de change et une viabilité des balances de paiement et des indicateurs de la dette extérieure, accompagnées de la stabilité du taux de change effectif réel et une bonne tenue du marché interbancaire. Le trésor a accumulé, deux années de suite, une épargne financière appréciable. Le montant des surliquidités disponibles dans les banques primaires avoisine les 250 milliards de dinars. Pour le CNES, le secteur bancaire est déconnecté de la sphère économique ; son organisation et ses moyens d'intervention souffrent encore d'archaïsme par rapport aux standards internationaux. Son faible engagement dans la sphère productive pèse sur les conditions de la relance. L'implication du privé dans le paysage bancaire algérien n'a, pour ainsi dire, rien changé dans la pratique bancaire. La sphère économique reste caractérisée par son manque de prévisibilité, lequel aurait aider les opérateurs à faire des choix tout en réduisant les facteurs d'incertitude. Ce manque de visibilité est dû essentiellement au déficit en matière d'information économique et sociale, à un défaut d'orientation en termes de guidage ou de politique promotionnelle de la part des pouvoirs publics, lesquels semblent se cantonner dans une expectative prudente… M. R.